Sujet : poésie médiévale, poésie réaliste, auteur médiéval. ballade, folk médiéval.
Auteur : François Villon (1431-?1463)
Titre : Ballade de Mercy (Merci)
Période : moyen-âge tardif, XVe siècle.
Interprétes : Corvus Corax. Album: Seikilos 2006
Bonjour à tous,
oilà quelque temps que nous n’avons parlé à la fois de François Villon et de Folk médiéval et ce sont, cette fois-ci, les allemands de Corvus Corax qui nous en fournissent l’occasion. En 2005, le groupe enregistrait en effet, dans le texte, La Ballade par laquelle Villon crye mercy à chascun, connue encore sous le nom de Ballade de Mercy, en nous proposant cette poésie médiévale avec force orchestration et rien moins qu’une sérieuse touche celtique.
Corvus Corax: rock folk néo-médiéval
a postérité de François Villon a dépassé les frontières de la France auprès des amateurs de poésie médiévale et même de poésie tout court, mais il demeure toujours amusant de constater les étranges travers que les auteurs prennent, quelquefois, pour nous revenir. Cette fois-ci, ce n’est donc pas par la Russie (voir article), mais par l’Allemagne que Villon le fait.
Fondé à l’origine et en 1989 par deux allemands de l’Est ayant profité de la chute du mur de Berlin pour passer en RFA, en laissant derrière eux un Corbeau apprivoisé ( d’où le nom du groupe), Corvus Corax a gratifié depuis, son public, d’une bonne trentaine de productions entre albums studio, opéras, dvd et albums live.
Toujours actifs depuis leur création, avec quelques changements de musiciens et d’artistes en cours de route qui n’ont pas affecté l’existence du groupe, ils se produisent principalement en concert en Allemagne, avec quelques dates dans d’autres pays européens en proposant leur style néo-médiéval, soit une musique aux tendances rock et folk et aux accents celtiques et nordiques prenant sa source d’inspiration dans le moyen-âge. La bande utilise de nombreux instruments d’époque. cornemuses et autres chalumeaux et en fabriquent même de spéciaux pour chercher de nouvelles sonorités aux accents anciens.
Ajoutons que cette ballade de Villon, tiré de leur album Seikilos, sorti en 2002 est la seule de l’auteur du CD. Cet album est disponible à la vente en ligne, sur le lien suivant : Seikilos de Corvus Corax
Pour suivre de plus près les Corvus Corax, vous pouvez consulter leur site web (en allemand et en anglais).
La Ballade par laquelle Villon
crye mercy à chascun
Dans cette ballade, Villon, se sachant condamné, implore la pitié de tous, en égratignant encore au passage, les tortionnaires et bourreaux qui l’ont soumis au dur régime du pain, de l’eau et de la torture et, avec eux, Thibaud d’Aussigny, le sévère et puissant évêque d’Orléans, responsable de son enfermement à Meung-Sur-Loire et que Villon fit entrer dans la postérité avec lui. Et Villon crie ici, du fond de sa geôle, même si cette poésie semble plutôt être déclamée dans la rue, à l’attention de tout ce petit peuple qui y vit et que le poète connaît si bien. Dans le second tome de son excellent ouvrage sur la vie du poète médiéval « François Villon, sa vie, son temps » (1913), Pierre Champion y verra même, de son côté, une référence certaine aux crieurs de corps qui annonçaient alors les noms des morts.
Pour en terminer, les paroles utilisées par Corvus Corax dans leur interprétation de cette ballade de Villon, étant un peu modernisée, nous avons préféré publier ici une version plus fidèle à la langue originelle de Villon. Elle est tirée des oeuvres de Maistre François Villon, par Jean-Henri-Romain Prompsault (1835) dont nous avons déjà parlé ici; l’ouvrage nous sert d’ailleurs aussi de guide principal pour les annotations.
A Chartreux et à Célestins,
A Mendians et à Dévotes,
A musars et claquepatins (1),
A servans et filles mignottes
Portants surcotz et justes cottes,
A cuideraulx d’amours transis, (2)
Chaussant, sans méhaing, fauves bottes,
Je crye à toutes gens merciz.
A fillettes montrans tétins,
Pour avoir plus largement hostes,
A ribleurs meneurs de hutins (3)
A basteleurs traynant marmottes,
A folz et folles, sotz et sottes,
Qui s’en vont sifflant cinq et six
A marmousetz et mariottes, (4)
Je crye à toutes gens merciz,
Sinon aux trahistres chiens mastins
Qui m’ont faict manger dures crostes, (5)
Et boire eau maintz soirs et matins,
Qu’ores je ne crains pas trois crottes.
Pour eulx, je feisse petz et rottes ;
Voulentiers, si ne fusse assis;
Au fort, pour éviter riottes, (6)
Je crye à toutes gens merciz.
S’on leur froissoit les quinze costes
De bons mailletz, fortz et massis ;
De plombée, et de telz pelotes. (7)
Je crye à toutes gens merciz.
Notes
(1) Musars : badauds. oisifs. Cliquepatins ; « galopins » qui court les rues.
(2) Cuideraulx : de « cuideor »: présomptueux. Vaniteux élégamment chaussés.
(3) Ribleurs : coureurs de nuit, crapules faisant du tapage de nuit
(4) Marmousets : petits garçon et petites filles
(5) Crostes : croûtes de pain
(6) Au for pour éviter riottes ; Du reste pour éviter toute querelles
(7) De plombées et de tels pelotes : garnis de plombs ou de choses semblables.
En vous souhaitant une très belle journée.
Fred
Pour moyenagepassion.com
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