Pour faire suite à notre article d’hier sur le Festival Historia. Certes, ne le nions pas, c’est une ânerie mais, au final, je suis certain que cela leur fera bonne presse.
Une belle journée à tous !
Fred A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.
Sujet : musique, chanson médiévale, poésie médiévale, humour, trouvère, biographie, ménestrel, jongleur, auteur médiéval, vieux-français Période : moyen-âge central, XIIIe siècle. Auteur ; Colin Muset (1210-?) Titre : « Sire Cuens, j’ai viélé » Interprètes : Les productions Perceval(livre MM Le moyen-âge la renaissance, Editions J. M. Fuzeau, 1989
Bonjour à tous,
ous partons aujourd’hui aux abords du XIIIe siècle pour parler d’un trouvère célèbre du nom de Colin Muset: portrait, détails sur l’homme et sur l’oeuvre donc et, bien sûr, présentation d’une de ses chansons pour compléter le tableau.
Eléments (flous) de biographie
A l’image de nombreux autres trouvères ou troubadours de son temps, quand ils n’étaient pas eux-même des seigneurs suffisamment notables pour entrer dans l’histoire, on sait peu de chose de la vie de Colin Muset. Originaire de Lorraine ou de Champagne, il serait né au début du XIIIe siècle, autour de 1210. On ne connait pas non plus la date de son trépas mais on sait qu’entre les deux, il aurait été poète, musicien et joueur de Viole (vièle à archet).
Si l’on se fie au contenu de ses poésies, il allait de cour en cour pour proposer son art et pour subsister. Pour autant, nous ne sommes pas là face à un artiste miséreux puisque, à l’en croire toujours, il avait une servante pour assister sa famille et il avait même encore une valet pour s’occuper de sa monture.
De fait, en son temps et sur la base des poésies du Ménestrel, Gaston Paris nous a dépeint Colin Muset comme un bon vivant, menant somme toute, une existence assez bourgeoise. Marié avec au moins un enfant, il aurait été sédentaire l’hiver et plus itinérant durant l’été. « Poète, amoureux et parasite » ainsi qu’il se voyait lui-même, sa poésie oscille entre légèreté, images bucoliques, amourettes et encore des aspirations à une vie confortable et jouisseuse, entourée de bons vins et de bonne chère. On retrouvera sans peine quelques uns de ces traits dans la chanson que nous vous présentons aujourd’hui pour accompagner ce portrait et qui est une de ses plus célèbres.
Contemporain de Thibaut de Champagne, roi de Navarre, Colin Muset a-t-il fini par entrer au service et sous la protection de ce dernier ? Si on le trouve affirmé ça ou là, cela ne semble pas faire l’unanimité chez les nombreux auteurs qui se sont penchés sur lui.
Le legs de Colin Muset : comptages, débats d’experts, corpus, etc…
Signe d’une certaine reconnaissance et popularité de cet artiste médiéval en son temps, on peut trouver les oeuvres de Colin Muset dans de nombreux manuscrits anciens qui s’échelonnent entre le milieu du XIIIe et le début du XIVe siècle. Deux d’entre eux en contiennent le plus grand nombre, le MS 389 ou Le Chansonnier français de la Burgerbibliothek de Berne, et encore le Chansonnier U connu encore sous le nom de Manuscrit de Saint-Germain des près (MS français 20050). Véritable mine d’or de la chanson française (et provençale) du moyen-âge central, ce dernierest en tout cas le plus ancien dans lequel on puisse trouver des pièces de Colin Muset aux côtés de 304 autres trouvères, 333 chansons et encore 29 compositions provenant de troubadours. La chanson du jour se trouve, quant à elle, dans quatre autres manuscrits dont le manuscrit MS 5198de l’Arsenal et encore dans le MS Français 845 dont est tirée l’image ci-dessous.
Quoiqu’il en soit, du XIXe siècle jusqu’à des dates encore très récentes (2007), entre poésies non signées, simplement émargées après coup par un « rubriqueur » ou un copiste, mais aussi entre approches déductives, comptage de pieds ou longues analyses stylistiques et métriques, le nombre exact de pièces attribuées à notre trouvèredu jour a oscillé d’une douzaine à un peu plus d’une vingtaine. Les débats n’étant toujours pas clos sur le sujet, au delà de la douzaine, on se retrouve en face d’un corpus aux contours flottant différemment en fonction des experts.
Au demeurant, cela reste une production plutôt chiche, si on la compare avec celle d’autres trouvères ou jongleurs contemporains du XIIIe siècle comme un Adam de la Halle ou unRutebeuf. En dehors du fait que certaines de ses oeuvres se sont peut-être perdues, sans doute Colin Muset chantait-il, en plus de ses propres pièces, des oeuvres empruntées à d’autres. Comme nous le montrent les manuscrits d’époque, il n’aurait eu, dans cette hypothèse, que l’embarras du choix dans le large répertoire des trouvères dont il était contemporain.
Sire Cuens, j’ai viélé
n ne peut pas s’empêcher de trouver, dans cette chanson de Colin Muset sur les déboires de l’activité de trouvère, quelques similitudes avec certaines complaintes de Rutebeuf, sur le fond au moins en tout cas. L’humour est à l’évidence présent, et il faut bien avouer que l’interprétation de la pièce du jour le renforce encore, mais au delà, le texte met en scène ce fameux « je » poétique dont nous avions déjà parlé avec Rutebeuf (voir article)et que nous avions ré-abordé en parlant de la poésie deMichault Taillevent. (voir article sur le passe-temps de Michault).
Entre poésie goliardique, fabliaux et notes satiriques, le XIIIe se signe aussi par une forme d’émancipation de certains de ses auteurs d’avec la lyrique courtoise. Colin Musset reste un de ceux là.
« L’ami Barde n’eut point ripaille Parti sans pain et sans fruit Quand chanta pour les funérailles Du roi Loth mort dans son lit. Niah, niah, niah, niah! » Le Barde ( Didier Bénureau) –
Kaamelott, Alexandre Astier
Sans parler du clin d’oeil fait par Alexandre Astier dans Kaamelott au sujet du barde mal reçu, que cette chanson de Colin Muset ne peut manquer d’évoquer pour ceux qui connaissent la série, on trouvera cette complainte sur les mauvais donneurs, reprise par d’autres chanteurs et artistes du moyen-âge. Il faut bien dire qu’un certain idéal de pauvreté, synonyme peut-être d’une forme authenticité pour certains artistes ou auteurs romantiques du XIXe n’a rien de médiéval. Les trouvères ou troubadours du moyen-âge ne se cachent pas, en effet, de vouloir gagner quelques deniers bien mérités et un bon traitement en échange de leur art.
Les paroles de « Sire Cuens, j’ai viélé »
dans le vieux-français de Colin Muset
Sire Cuens* (Comte), j’ai viélé Devant vos, en vostre ostel : Si ne m’avez rien doné, Ne me gages acquités ; C’est vilanie ! Foi que doi Sainte Marie, Ensi ne vos sieuré je mie ; M’aumoniere est mal garnie Et, ma borse mal farcie !
Sire Cuens, car commandez De moi vostre volenté ; Sire, s’il vos vient à gré, Un biau don car me donez Par cortoisie ! Car talent ai, n’en dotez mie De raler a ma mesnie* : (retourner en ma maison) Quant g’i vois borse d’esgarnie, Ma fame ne me rit mie,
Ainz me dit : « Sire Engelé, En quel terre avez esté Qui n’avez riens conquesté ? Trop vos estes deporté Aval la vile ! Vez con vostre male plie : El est bien de vant farsie ! Honi soit qui a envie D’estre en vostre compaignie ! »
Quand je vieng a mon ostel. Et ma fame a regardé Derrier moi le sac enflé Et ge, qui sui bien paré De robe grise. Sachiez qu’elle a tost jus mise La quenoille ; sanz faintise Ele me rit ; par franchise, Ses deux braz au col me lie.
Ma fame va destrousser Ma male sans demorer* (sans attendre) ; Mon garçon va abuvrer Mon cheval, et conreer* (en prendre soin, le nourrir) ; Ma pucele* (servante, jeune fille) va tuer Il chapons, por deporter* (célébrer) A la janse aillie* (sauce à l’ail) Ma fille m’aporte un pigne* (peigne) En sa main par cortoisie… Lors sui de mon ostel sire A meolt grant joie, sanz ire, Plus que nus ne porroit dire.
En vous souhaitant une belle journée.
Frédéric EFFE
Pour moyenagepassion.com. A la découverte du Moyen-Age sous toutes ses formes.
Sujet : dizain, poésies courtes, rondeau, poésie de cour, renaissance. humour, poésie gaillarde, Période : XVIe, renaissance, fin du moyen-âge Auteur : Mellin Sainct-Gelays
ou Melin (de) Saint- Gelais (1491-1558) Média : « les petits renaissants » programme culturel, chaîne nationale,1953. lectures audios, chaîne youtube Eclair Brut Ouvrage : Oeuvres complètes de Mellin Sainct- Gelays, Prosper Blanchemain, 1873.
Bonjour à tous,
l’ambition littéraire, au sérieux et quelquefois, il faut bien le dire, une certaine pédanterie des certains auteurs de la pléiade, le XVIe siècle oppose aussi une poésie légère de divertissement, gaillarde même quelquefois, et un verbe mis au service de l’esprit et de l’amusement de cour. Même s’ils ont fait quelques émules, Clément Marot et Melin de Saint Gelais en sont sans doute les auteurs les plus représentatifs et assurément les plus talentueux.
A travers les notes les plus humoristiques de cette poésie : pastourelles détournées, moines buveurs et chaud lapins et autres grivoiseries, les références aux fabliaux ne peuvent manquer de venir à l’esprit et, avec elles, l’ancrage dans une tradition satirique bien antérieure au XVIe siècle; finalement, le « sombre » moyen-âge est, sans doute ici, bien moins loin que les nouveaux auteurs de la Pléiade l’auraient souhaité.
Les « petits renaissants », programme culturel « historique » de la chaîne nationale
ssues d’un programme, devenu lui-même historique puisqu’il date de 1953, voici donc un peu plus de vingt minutes en compagnie de Melin Saint Gelays et de sa poésie renaissante. Produite par l’acteur et homme de théâtre Marcel Lupovici, l’émission était alors présentée par le poète Pierre Emmanuel (Noël Mathieu). On reconnaîtra sans peine, les intonations et les voix d’époque, et à travers le court portrait de l’auteur du XVIe, on remarquera aussi la qualité du français : soigné, appliqué et très écrit.
Passé l’introduction, les lectures audios qui sont données ici des poésies de Melin Saint-Gelais sont un vrai régal.
Diffusé à une heure tardive, le programme autorisait aussi une certaine liberté de ton et, permettait d’aborder des poésies un peu plus « gaillardes ». Le dizain ci-contre en est un exemple, il est même à ce point grivois qu’on l’a prêté longtemps à Marot, dont c’était tout de même plus une des spécialités, Melin Saint-Gelais ayant, en général, habitué ses lecteurs à une poésie en général moins osée.
En vous souhaitant une belle journée à tous.
Fred
Pour moyenagepassion.com A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.
Sujet : humour, Kaamelott, série télévisée, série culte, lectures, livres, quête du Graal, légendes arthuriennes, comédie, médiévalisme, Guillaume Briat, Burgondes. Période : moyen-âge central pour le roman arthurien & haut moyen-âge pour la légende. Auteur:Alexandre Astier Distribution : CALT production, M6 Médias : détournement, humour
Bonjour à tous,
uste pour la détente, voici un autre détournement humoristique autour de la série Kaamelottet de la quête du Graal, à la façon d’Alexandre Astier. Il s’agit cette fois, d‘un nouvel ouvrage imaginaire que vous ne trouverez donc pas dans le commerce, j’en ai peur.
Encore une fois, nous sommes, ici, bien plus clairement dans le registre de la farce, la comédie moderne et le médiévalisme que dans l’humour médiéval à proprement parler, aussi que les puristes veuillent bien nous excuser ce glissement catégoriel, ce ne sera pas le premier. Pour le reste, s’il y a des Burgondes dans la salle et pour paraphraser Pierre Desproges, ils peuvent rester.