Archives de catégorie : Conférences Moyen Âge

Des conférences sur le moyen-âge et autour de la période médiévale par les plus grands érudits et experts de ces questions (historiens médiévistes, romanistes, etc…)

La terre n’était pas plate au moyen âge mais elle est en train de le redevenir

podcast médiéval

Sujet : terre plate, terre ronde, science, histoire médiévale, idées reçues, préjugés, actualité.
Période : Moyen Âge.
Média  : podcast décembre 2021
Titre : La terre était-elle plate au Moyen âge ?
Intervenants : Christophe Dickès, Violaine Giacomotto-Charra, Sylvie Nony.

Bonjour à tous,

ous avions été contacté, il y a quelques années, par un auteur illustrateur. Assez sympathique, il nous avait dit faire des petits cahiers ludiques pour les enfants et pour une petite maison d’édition. L’un deux, déjà paru, portait sur le Moyen Âge. Il espérait que nous soyons intéressés et puissions en parler dans nos pages. Très honnêtement, l’idée nous a ravi. Hélas, en consultant le document, assez bien illustré, nous avons trouvé de nombreuses idées fausses sur le monde médiéval entre lesquelles la suivante, énoncée laconiquement : « Au Moyen Âge, l’Eglise et les gens pensaient que la terre était plate « . La messe était dite…

Actualité de la terre plate

Aujourd’hui encore, ce préjugé est, sans doute, celui qui résume le mieux les idées reçues sur le monde médiéval et ses mentalités. Il fait encore sourire, voir pouffer, d’un air entendu. « La Terre était considérée comme plate au Moyen Âge« . Si les médiévistes ne pouffent pas, de nouveaux publics se joignent, désormais, à eux pour des raisons différentes. À l’heure d’internet, tout devient possible et depuis quelque temps, les affirmations autour de la terre plate reviennent, en effet, au goût du jour. Cela fait lever les yeux au ciel à tous les astronomes, scientifiques, physiciens, astronomes amateurs, de la terre entière et même quelques milliards d’autres personnes. Pourtant, en janvier 2018, un sondage de l’IFOP établissait que près de 9% des français pensaient cette théorie possible : 2% en étaient totalement convaincus, 7% la jugeaient probables. C’est un peu plus qu’une sorte de « pourquoi pas ? » face à l’idée. Beaucoup de regards se sont alors tournés vers l’éducation et certains ont pu avoir une pensée émue pour la crédibilité accordée aux enseignements scolaires, autant que pour l’éducation scientifique.

À date, une brève requête faite sur google en langue française vous fera apparaître près de 46 200 000 résultats sur « terre plate ». Si vous la tentez en anglais (« flat earth »), le nombre vertigineux de 1 230 000 000 résultats s’affichera. Sur youtube, les vidéos sur le sujet sont également innombrables même si (rappelons-le) pour y poster, il ne faut pas nécessairement un doctorat en physique, ni même des études poussées en Astronomie ; une webcam et un soft de montage vidéo suffisent. En dehors de quelques pédagogues qui s’escriment à réhabiliter le bon vieux globe terrestre, si le courage vous en dit (personnellement, j’ai un peu passé mon tour), vous assisterez aux échafaudages les plus hardis visant à démontrer la platitude de notre bonne vieille « Plan-ète » .

L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est deco-terre-plate-.jpg.

La plupart ne tiendrait sans doute pas 5 minutes face à un Hubert Reeves. Ils n’auraient pas, non plus, été approuvés par un regretté Haroun Tazieff ni un Albert Einstein et même votre prof de physique de collège pourrait les démonter, mais qui sont tous ces prétendus experts après tout ? Quelle légitimité réelle pourraient-ils bien avoir face à des millions d’opinions et de bouches grandes ouvertes en ligne ? Deux ou trois voix de plus dans l’arène, d’où qu’elles viennent, ne font pas une vérité, pas vrai ? Je plaisante à demi. La nouvelle barbarie dont Alessandro Baricco nous avait dit un mot est dans la place. À chacun sa vérité et sa panoplie d’experts. Le plus étonnant reste, sans doute, le niveau d’élaboration de certains de ces contenus et les efforts qui peuvent y être portés. Au final, tout ça viendra allégrement alimenter la définition de la complosphère et jeter le discrédit sur tout ce qu’on peut trouver en ligne. Les vrais lanceurs d’alerte noyés dans une mer où surnagent toutes les vérités et leur exact contraire. Pas terrible…

Points de vue et motivations

Illustration d'une théorie de la terre plate

Pour revenir à la terre plate, nous aurait-on menti ? Vivons-nous, sans le savoir sur un plan, un monde plus plat que la Belgique de la chanson de Brel ? Une sorte de théâtre à la Trueman show ? Certains se posent la question, d’autres s’en laissent convaincre. Nous n’allons pas passer en revue ici toutes les théories qui mettent du baume au cœur des « platistes », ni même nous aventurer à juger ces derniers. Pourtant, il est permis de se demander comment des allégations venues contredire des siècles, et même des millénaires de cosmologie, peuvent parvenir à se propager au XXIe siècle ? (même si cela reste très relativement, n’exagérons rien). À l’heure des stations spatiales, des satellites, de Hubble, des exoplanètes, de l’exploration martienne, comment le niveau de connaissances que nous avons atteint sur l’univers peut-il laisser la place à de telles affirmations ?

S’il y a de quoi se frotter les mains pour ceux qui voient un complotiste derrière chaque arbre, on se demande sur quel terrain ces croyances peuvent bien faire leur nid. Au delà des certitudes qu’a pu nous laisser (ou non, la preuve !) l’éducation scientifique, faut-il simplement y voir un besoin de poésie, d’excitation, de rêve ? Le philosophe physicien Etienne Klein bondirait peut-être sur sa chaise en lisant ces lignes, lui qui prêche « le goût du vrai » et ne cache pas ses inquiétudes sur le peu de place fait à la science dans l’information. Si vous avez eu l’occasion de voir certaines de ses conférences sur youtube (justement), notamment celle sur la définition d’ultracrépidarianisme, vous savez déjà qu’il plaide pour un retour des véritables experts scientifiques dans le champ médiatique. Quant au goût du rêve, les amoureux de science ne sont pas souvent pas obtus, ni même scientistes. Certains d’entre eux vous affirmeront que l’univers et le cosmos tels que la science actuelle conservent, même ainsi, leur charge de mystère et de poésie.

Croire, ne pas croire ? Débattre ou non ? Dans un autre registre, interrogé, il y a quelques années, sur un complot possible au sujet de l’alunissage des américains en 1969, Alexandre Astier auteur du spectacle l’Exoconférence (2014) répondait simplement : « je n’ai pas besoin de ça« . En un mot, s’il faisait le constat que ce type de choses parlait à certains et pouvait même, peut-être, correspondre à un certain besoin pour eux, il n’entrait simplement pas dans le débat. « Je n’ai pas besoin de ça ». Pas de jugement, juste un constat pour lui-même. C’est sans doute la meilleure attitude. On ne peut pas être en croisade sur tous les sujets et laisser justement cela aux experts et enseignants des domaines concernés. Connaissant la goût de l’auteur de Kaamelott pour l’astronomie, il serait, toutefois, intéressant de connaître sa position au sujet de cette théorie de la terre plate qui demeure, quand de même, d’un autre niveau que l’alunissage américain.

Tout cela étant dit, la question des causes et des motivations reste ouverte. Nous n’avons pas, ici, la prétention de la trancher. Au moment de ces lignes et en regardant de près ce résultat google, une chose demeure troublante, pourtant. Certains défenseurs de cette théorie de la terre plate sont en train d’acheter de la publicité sur le moteur de recherche pour la propager. La publicité redirige sur un site qui parle uniquement de ce sujet. On y plaide même la renaissance d’une certaine foi « contre les mensonges de la laïcité ». Plutôt étonnant comme croisade. On se demande franchement à qui elle profite et qui peut investir ses deniers pour la mener.

L’homme médiéval face à la terre plate

Ces quelques réflexions posées sur cette étrange théorie de la terre plate au XXIe siècle, revenons sur la croyance supposée que cette idée était commune et admise durant le Moyen Âge. Précisons que nous avions déjà abordé ce sujet, il y a quelques années, avec le support d’une conférence de Jean-Marc Mandosio, enseignant à l’École pratique des hautes études (EPHE). Ce dernier établissait clairement que ce préjugé de terre plane aux temps médiévaux avait été faussement colporté durant des siècles.

un podcast de Storia Voce

Livre : La terre plate par une scientifique et une médiéviste

Preuve que ce thème est encore d’actualité, tout récemment encore, deux éminentes chercheuses et enseignantes universitaires, l’une historienne, Violaine Giacomotto-Charra, l’autre physicienne Sylvie Nony se sont penchées, elles-aussi, sur le sujet. Leur collaboration a donné lieu à l’ouvrage « La terre plate, généalogie d’une idée fausse » paru aux Belles Lettres en 2021.

À cette occasion, les deux auteurs ont été également les invitées d’un podcast de StoriaVoce. Cela va nous fournir enfin l’opportunité de vous dire un mot de cette excellente radio web. Très orientée sur l’histoire et son enseignement, ce média est présenté et animé par l’historien et journaliste Christophe Dickès. Depuis sa création en 2016, il y passe en revue de nombreux sujets historiques entourés de nombreux et prestigieux invités. Les programmes de Storia Voce couvrent toutes les périodes et sont d’un niveau soutenu. Ils sont aussi très variés avec une fréquence de 6 à 8 podcasts mensuels depuis 5 ans,

Comme on le verra dans ce très complet programme audio, non seulement le Moyen Âge ne croyait pas en la terre plate mais la science et les grecs avaient affirmé, bien longtemps avant lui, que la terre était ronde. On la pensait immobile et statique, au centre de l’univers, mais elle était déjà considérée comme un globe. On y découvrira encore qu’après Voltaire, elle a même continué d’être propagée dans certains manuels scolaires jusqu’après le milieu du XXe siècle ! C’est dire toute la considération des éditeurs de manuel d’histoire pour le Moyen Âge et toute la rigueur de certains rédacteurs d’alors.

En vous souhaitant une bonne écoute et une très belle journée.
Fred F
Pour moyenagepassion.com
À la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.

NB : sur l’image d’en-tête, il s’agit d’une gravure publiée en 1888 par Camille Flammarion. Cette illustration du XIXe siècle représente un homme regardant par delà le bord du ciel ou l’atmosphère pour essayer d’y découvrir l’espace profond. Ouvrage de référence : L’atmosphère: météorologie populaire.

PodCast : Entrons-nous dans un nouveau Moyen Âge ?

Sujet : monde médiéval, podcast, préjugés, idées reçues, crise sanitaire, actualité.
Période : Moyen Âge central, modernité
Podcast : Delta Radio, Rediffusion du direct de Février 2021
Programme : « Vivons-nous un nouveau Moyen Âge ? « Le poste zéro, animé par Mitch.
Invités : Fréderic Effe, Florian Besson, Simon de Thuillières

Bonjour à tous,

ous espérons que ce billet vous trouve en forme. Avec l’approche du mois d’août, nous allons sensiblement ralentir le nombre de publications, en espérant pouvoir un peu mieux nous concentrer sur d’autres projets. Dans l’attente de la rentrée, nous voulions toutefois vous laisser deux ou trois choses qui, nous l’espérons, vous plairont si vous ne les avez pas encore découvertes. D’une certaine façon, elles rejoignent toutes deux l’actualité tout en questionnant le monde médiéval. Voici la première :

Le Moyen Âge est-il redevenu d’actualité ?

Il y a quelques mois, nous avions eu l’occasion de participer à une émission de radio proposé par Delta Radio. Le programme avait été diffusé en direct, courant Février 2021, et le podcast est, désormais, disponible. Si vous ne l’aviez pas écouté, nous le repartageons ici. Cela vous en fournira sans doute l’occasion de le découvrir si ce n’est déjà fait.

A près d’un an de crise sanitaire, le thème de cette émission : « Vivons-nous un nouveau Moyen Âge ? » nous donnait l’occasion de revenir sur quelques idées reçues sur cette période mais aussi d’aborder quelques différences substantielles entre monde moderne et monde médiéval. Dans le contexte de la crise sanitaire, nous y faisions, notamment, un détour sur certains éléments d’actualité, dont le rapprochement délirant fait si souvent par certains médias ou certains politiques entre Covid 19 et peste noire. Contre toute raison et à en juger la situation actuelle, il semble que cette confusion ait continué à être entretenue sur le fond.

Vous pourrez retrouver également dans ce programme Florian Besson (historien médiéviste) et Renaud Garcia aka Simon de Thuillières (illustrateur qui s’est signalé, ces dernières années, pour ses détournements entre culture pop, cinéma et enluminures).

Voir cet autre article sur les préjugés au sujet du Moyen Âge

En vous souhaitant une belle journée.

Fred
Pour moyenagepassion.com.
A la découverte du Monde médiéval sous toutes ses formes.

NB : l’enluminure, sur l’image d’en-tête, est tirée du Speculum Historiale ou Miroir Historial de Vincent de Beauvais (1190-1264). Ce manuscrit médiéval (le Ms-5080 réserve de la Bibliothèque de l’Arsenal) est daté du XIVe siècle ; il est actuellement conservé à la BnF et consultable sur Gallica. Au premier coup d’œil, l’enluminure pourrait avoir d’étranges relents d’actualité, mais ce n’est pas aussi direct que cela. Dans les faits, elle représente Josephat, jeune prince indien tenu reclus longtemps par son père, découvrant le monde et tombant sous le choc devant un lépreux et un aveugle faisant l’aumône. Au Moyen Âge, les lépreux inspirent la crainte et même à certains périodes, la défiance, et on les garde soigneusement éloignés du système social et économique (voir aussi La lèpre, première maladie épidémique de la littérature française de Baptiste Laïd).

Podcast delta radio : Pandemie, crise en vue, Le Moyen Âge serait-il de retour ?

Bonjour à tous,

l’arrivée funeste du Covid 19 et la cohorte de peurs qui l’ont accompagné, la sempiternelle question (qui revient à l’approche de chaque période difficile) n’a pas manqué de ressurgir : « Le Moyen Âge serait-il de retour ? » ou encore « Sommes-nous entrés dans un autre Moyen Âge ? ».

Pandémie, spectre de la vieille peste noire médiévale, crise économique à venir qui nous promettrait une plongée certaine dans un « nouveau Moyen Âge », les comparaisons et rapprochements hasardeux sur les réseaux ou dans la presse n’ont pas tari. De nombreuses occasions ont ainsi été saisies par les intervenants les plus variés d’agiter le chiffon rouge en référence à une période médiévale « représentée », faisant au mieux bondir les médiévistes, au pire, leur faisant hausser les épaules, de manière presque fataliste.

Alors, « vivons-nous dans un nouveau Moyen Âge ? » c’est sur ce thème que nous avons eu le plaisir de répondre à l’invitation de Delta Radio pour un podcast qui sera diffusé, en direct, le vendredi 19 février, à 20 heures (heure de Paris).

« Vivons-nous un nouveau Moyen Âge ? »

Si le programme « Le Poste Zéro, l’émission qui réfléchit les Miroirs Brisés » pose ses thèmes au premier degré, c’est pour mieux inviter ses intervenants à les déconstruire. Nous avions déjà eu l’occasion, dans certains de nos articles, d’adresser certaines idées reçues à l’encontre du Moyen Âge. Alors, comment résister à une nouvelle invitation dans ce sens ?

Pour cette émission, animée par Mitch (lui même auteur), nous serons en excellente compagnie : la sienne mais aussi celle de Florian Besson (Historien médiéviste, co-fondateur du blog Actuel Moyen Âge) et celle de Simon De Thuillières (graphiste-enlumineur de talent, à la croisée du cinéma moderne, de l’actualité et des codes graphiques médiévaux). Pour ceux que le programme intéresse et qui ne pourront pas l’écouter demain soir, il sera aussi rediffusé en podcast. Voici les liens de tout cela :

Le direct, Vendredi 19 février 2021 20h00 (h de Paris)
Ecouter le podcast en différé

En vous souhaitant une belle journée.

Fred
Pour moyenagepassion.com.
A la découverte du Monde médiéval sous toutes ses formes.

PS : l’enluminure ayant servi de fond à l’image en-tête d’article est tirée du manuscrit médiéval Ms. 13076 – 13077 : les Annales ou le Tractatus Quartus de Gilles Li Muisit. Elle représente l’épidémie de Peste à Tournai (milieu du XIVe siècle). Cet ouvrage est actuellement conservé à la Bibliothèque Royale de Bruxelles (Belgique). Quant à la belle reconstitutrice en armure de plates, elle provient d’une image de pixabay à mettre au crédit du photographe bstad.

Conférence : Le Français, 800 ans d’Histoire et ce n’est qu’un début !

Sujet : langue française, francophonie, anniversaire, conférence, histoire du français, linguistique, vieux français, monde médiéval
Période : du Moyen Âge à nos jours
Auteur : Alain Rey
Titre : « Le français, une langue à l’épreuve des siècles« 
Média : vidéo-conférence à l’Université de Genève (2009)

Bonjour à tous,

ous ceux qui nous suivent l’ont bien compris, entre les lignes de nos aventures médiévales et notre exploration des langues romanes, de leur origine, leur évolution, leur richesse, se niche une passion qui s’intéresse autant à l’histoire de notre langage qu’à celle de notre civilisation. De fait, on peut difficilement se pencher sur le Moyen Âge sans croiser le thème de la gestation du Français, de ses formes premières à ses transformations.

Aujourd’hui, nous rendrons un double hommage à la francophonie, ainsi qu’à Alain Rey, célèbre linguiste, lexicographe et homme de média qui nous a quittés,  il y a moins d’un mois, à l’âge de 92 ans.  Qu’il repose en paix.

50 ans : l’anniversaire de la Francophonie

Le sujet de la langue française est d’autant plus d’actualité qu’on fête cette année, et jusqu’à la fin du mois de décembre, les 50 ans de la Francophonie. On pourra se reporter au site officiel de la Francophonie pour suivre l’actualité de cette célébration.  Pour donner quelques éléments sur l’état du Français dans le monde, vous trouverez, ci-dessous, une infographie et quelques chiffres clé de 2018, en provenance du ministère de la Culture.

La langue française dans le monde 

On notera que si la langue française est en recul en terme d’enseignement dans un certain nombre de pays, le nombre de personnes qui le parle est appelé à être en constante augmentation. Aussi, si vous aviez encore des doutes sur le fait que c’est une langue avec laquelle il faudra compter dans l’avenir, ils devraient être dissipés.

La langue française dans le monde

Une conférence sur l’histoire de la langue française, par Alain Rey

Hors des sentiers universitaires classiques, ce passionné de langues au parcours atypique était, notamment, devenu le visage familier des éditions Robert et de leurs dictionnaires auxquels il a largement contribué tout au long de sa carrière. Entre le milieu des années 90 et les années 2010, Alain Rey s’était aussi fait connaître du grand public par ses chroniques sur France-Inter, Europe 1 ou encore à la télévision.

En dehors de ses apparitions médiatiques, ce chercheur enjoué et plein d’esprit a beaucoup œuvré pour l’étude et la connaissance de la langue française, dans ses formes académiques mais aussi dans ses évolutions plus modernes, populaires et même argotiques.  En 2009, il donnait une longue conférence à l’Université de Genève sur l’Histoire et la gestation du Français : de ses premiers balbutiements et son oralité, à l’acquisition de ses lettres de noblesses et ses formes écrites plus formalisées et plus tardives.

Le français, une langue à l’épreuve des siècles, conférence de Alain Rey

Un plaidoyer pour une langue vivante et ouverte

« L’avenir du français, je le vois comme une évolution permanente. Les fautes d’un jour deviennent les règles du lendemain. Dans toutes les époques, on a dit que la langue était foutue et que personne ne parlait bien. »

INA 2006 – Rencontre avec Alain Rey

Dans cette intervention, suivie d’une longue séance de question, Alain Rey se posera à l’encontre d’une certaine morosité, celle qui pourrait nous venir de l’idée que nous écrivons « moins » le français. En réalité, il montrera qu’avec les réseaux sociaux, le blogging et les nouvelles technologies, l’usage du français écrit s’est ouvert à une pratique plus intensive et à un public plus large. Quant à la tendance à laquelle on assiste de  l’écrire moins correctement que ses formes académiques nous l’imposeraient, le linguiste, là encore, viendra mettre un bémol sur nos possibles déconvenues. Résolument optimiste sur cette langue  française en devenir, celui qui aimait répéter que « la faute d’aujourd’hui est la norme de demain » nous rappellera qu’une langue n’est jamais autant en danger que quand on l’arrête de la parler et de l’écrire. Toutes ses formes nouvelles viennent donc comme autant de remparts à l’encontre de ce risque et il convient de s’en réjouir. Académiques ou non, il n’y a que les langues mortes qui n’évoluent plus. 

Une belle journée à tous.

Fred
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du Moyen Âge  sous toutes ses formes.

NB : les moines copistes de l’enluminure utilisée (et rafraîchie pour l’occasion) pour l’image d’en-tête, proviennent d’un manuscrit espagnol, rédigé sous le règne d’Alphonse X et intitulé « El libro de los juegos. El Libro de ajedrez, dados e tablas (le livre des jeux : le livre des échecs, des dés et des jeux de table). Cet ouvrage, daté de 1283, est actuellement conservé à la Bibliothèque de l’Escurial, près de Madrid.