Archives de catégorie : Musiques, Poésies et Chansons médiévales
Vous trouverez ici une large sélection de textes du Moyen âge : poésies, fabliaux, contes, chansons d’auteurs, de trouvères ou de troubadours. Toutes les œuvres médiévales sont fournis avec leurs traductions du vieux français ou d’autres langues anciennes (ou plus modernes) vers le français moderne : Galaïco-portugais, Occitan, Anglais, Espagnol, …
Du point du vue des thématiques, vous trouverez regroupés des Chansons d’Amour courtois, des Chants de Croisade, des Chants plus liturgiques comme les Cantigas de Santa Maria d’Alphonse X de Castille, mais aussi d’autres formes versifiées du moyen-âge qui n’étaient pas forcément destinées à être chantées : Ballades médiévales, Poésies satiriques et morales,… Nous présentons aussi des éléments de biographie sur leurs auteurs quand ils nous sont connus ainsi que des informations sur les sources historiques et manuscrites d’époque.
En prenant un peu le temps d’explorer, vous pourrez croiser quelques beaux textes issus de rares manuscrits anciens que nos recherches nous permettent de débusquer. Il y a actuellement dans cette catégorie prés de 450 articles exclusifs sur des chansons, poésies et musiques médiévales.
Sujet : poésie, littérature renaissante, poète, épigramme, poésies courtes, antiquité Période : début renaissance, XVIe siècle Auteur : Clément MAROT(1496-1544) Martial (41-104) Titre :« A soi-même » Ouvrage : Oeuvre de Clément Marot, Valet de chambre du Roy (T2), 1781
Bonjour à tous,
ous partageons, aujourd’hui, une nouvelle épigramme de Clément Marot faite en « imitation » du poète latin Martialdu premier siècle de notre ère. Cette fois-ci, le texte nous parle des conditions à accomplir pour avoir une « vie heureuse ». De l’antiquité de Martial à l’aube renaissante de Marot, ces dernières n’ont, semble-t-il pas tellement variées puisque le poète normand de Cahors juge bon de les reprendre à son compte.
Au passage, on verra d’ailleurs que, dans les critères, un bel héritage est considéré comme largement préférable à une fortune acquise avec peine, soit par le travail. Rêve de tout un chacun ou réalité de classes ? Sans doute plus cette dernière idée. En dehors peut-être de la noblesse, même petite dont les deux hommes sont issus, cette condition est, il faut l’espérer, loin d’être sine qua non pour atteindre la félicité sans quoi nombre de leurs contemporains seraient restés à sa porte.
« Marot voicy si tu veux le savoir Qui fait à l’homme heureuse vie avoir; Successions, non biens acquis à peine, Feu en tout temps, maison plaisante et saine, Jamais proces, les membres bien dispos, Et au dedans un esprit à repos; Contraire à nul, n’avoit aucuns contraires Peu se mesler des publiques affaires, Sage simplesse*, amis à soy pareilz, Table ordinaire, & sans grans appareilz; Facilement avec toutes gens vivre, Nuict sans nul soing, n’estre pas pourtant yvre, Femme joyeuse, & chaste néantmoins, Dormir qui fait que la nuict dure moins, Plus hault qu’on n’est ne vouloir point attaindre, Ne desirer la mort, ny ne la craindre. Voila Marot, si tu le veux savoir, Qui fait à l’homme heureuse vie avoir. » Clément Marot – Epigramme – A soi-même
Comme la fois précédente, nous vous livrons ici la version originale latine de Marcus Valerius Martialisainsi que sa traduction par Edouard-Thomas Simon, (tirée de son ouvrage Epigrammes de M. Val. Martial,T2,1819). Vous pourrez ainsi apprécier et mesurer l’art de l’imitation des auteurs antiques et classiques que la renaissance établit pratiquement comme un standard de l’exercice littéraire.
« Ad se ipsum » de Martial
« Vitam quae faciunt beatiorem ; Jucundissime Martialis, haec sunt : Res non parta labore , sed relicta ; Non ingratus ager ; focus perennis ; Lis nunquàm ; toga rara ; mens quieta ; . Vires ingenuae ; salubre corpus ; Prudens simplicitas ; pares amici ; Convictus facilis ; sine arte mensa ; Nox non ebria , sed soluta curis ; Nontristis torus, attamen pudicus; Somnus qui faciat breves tenebras ; Quod sis , esse velis , nihilque malis : Summum nec metuas diem, nec opes. »
« A lui-même »
traduction par Edouard-Thomas Simon
Voila , mon tendre ami Martial, Ce qui rend la vie heureuse : Une fortune acquise sans peine et par héritage , Des champs d’un rapport sûr, une maison pérenne Point de procès, très-peu de représentation, la tranquillité de l’esprit
De la vigueur naturelle, un corps sain , Prudence et franchise , des amis qui soient nos égaux , Une conversation aisée , une table sans trop d’apprêts , Une nuit sans ivresse et libre d’inquiétudes , Un lit où le plaisir ait des attraits , mais que la pudeur embellisse ; Un sommeil capable d’abréger les ténèbres ; Vouloir n’être rien de plus que ce que l’on est , Ne porter envie à personne , Attendre le dernier instant sans le craindre ni le désirer.
.En vous souhaitant une belle journée.
Fred
Pour moyenagepassion.com A la découverte du moyen-âge sous toutes ses formes.
Sujet : troubadours, langue d’oc, poésie, chanson et musique médiévale, fine amour, amour courtois. ethnomusicologie. Période : moyen-âge central, XIIe siècle Auteur : Marcabru (1110-1150) Titre : « Bel m’es quan son li fruich madur » Interprète : Ensemble FLOR ENVERSA
Bonjour à tous,
ous revenons aujourd’hui sur la poésie médiévale et bucolique du Troubadour Marcabru (Marcabrun) avec une très belle interprétation de sa chanson « Bel m’es quan son li fruich madur », (J’aime quand les fruits sont mûrs) par l’ensemble médiéval FLOR ENVERSA que cet article va nous donner également la joie de vous présenter.
Trobar clus : la poésie hermétique et allégorique de Marcabru
Marcabru fait partie des trobar clus, autrement dit de ces troubadours qui pratiquent une poésie « fermée », soit relativement hermétique. On lui prête d’ailleurs souvent d’en être le chef de file. En opposition aux trobar leu ou au trobar ric qui sont dans une recherche stylistique mais dont les textes demeurent plus accessibles, Marcabru fait naître des images poétiques et allégoriques, use encore d’allusions qui ne se livrent pas toujours facilement à la compréhension. Avec le recul du temps et la barrière de la langue, les choses se compliquent encore un peu plus, mais il n’est pas question pour autant de se priver d’approcher ce grand artiste et auteur du XIIe siècle.
Dans la poésie du jour, le troubadour nous parle de Fine Amor, autrement dit du bel amour courtois qui anoblit et élève et qu’il oppose aux pratiques des « amants perfides » et « trompeurs », qui l’avilissent et l’abaissent, même s’il en faudrait bien plus pour ternir l’Amour véritable dont la valeur est si grande qu’il n’a ni fin, ni commencement et ne se laisse entâcher. Et comme dans de nombreux autres de ses textes, la nature vient servir de support à notre poète médiéval pour conter à la fois ses états d’âme mais aussi pour lui permettre d’illustrer son propos de manière allégorique. C’est un procédé que l’on rencontrera souvent, après lui, dans la poésie médiévale.
« Bel m’es quan son li fruich madur » par l’Ensemble Flor Enversa
FLOR ENVERSA, une formation médiévale
à la découverte de l’art des Troubadours
Fondé dans le courant de l’année 2006 par le chanteur, conteur et musicien Thierry Cornillon et la chanteuse, vieilliste, violoniste, flûtiste, Domitille Vigneron, l’ensemble FLOR ENVERSA s’est donné pour vocation de faire revivre et redécouvrir le répertoire des troubadours occitans des XIIe et XIIIe siècles.
La démarche artistique de la formation est soutenue par un sérieux travail de recherche en amont, dans les sources manuscrites, documentaires et graphiques en provenance du moyen-âge central, et l’ambition avouée des deux artistes est de se situer au plus près de cette tradition et cet art musical et poétique médiéval. Dans le même ordre d’idée, ils se sont penchés sur les instruments anciens et font même des recherches en archéo-lutherie pour les recréer. Inutile, bien entendu, d’ajouter que la langue chantée est aussi au plus près des manuscrits, mais faisons le tout de même. En un mot, nous sommes là face à un travail exigent de restitution qui se situe autant du côté artistique que du côté de l’ethnomusicologie.
A ce jour, FLOR ENVERSA a produit 4 albums sur leur thème de prédilection en s’entourant de collaborations diverses. En l’occurrence sur le morceau présenté aujourd’hui, les deux fondateurs de l’ensemble sont accompagnés d’Olivier Féraud. Pour dire un mot de cet autre Artiste, il est musicien et luthier spécialiste de la période médiévale, mais pas seulement, il est aussi docteur en anthropologie sociale et ethnologie, et membre de la Société Française d’Ethnomusicologie (voir profil détaillé d’Olivier Féraud). Outre nous fournir le plaisir de le mentionner ici, tout cela démontre, encore une fois, de tout le sérieux et de la rigueur que cet ensemble peut investir dans son approche de l’art des troubadours.
Fondateurs d’un festival sur ce même thème, le festival TROBAREAqui se donne en août, en Provence et à Vence et qui présentait cette année sa 3e édition, les deux artistes ont aussi eu l’occasion d’intervenir, à plusieurs reprises, dans des colloques pointus sur ce sujet qu’ils maîtrisent bien. Ils organisent d’ailleurs des stages sur la question faisant intervenir des contenus aussi divers que les sources manuscrites, l’archéo-lutherie, la découverte des modes de jeux et l’improvisation, mais aussi et bien sûr la langue d’Oc.
Notons encore que ces artistes passionnés qui ont à coeur la culture, la langue, la tradition orale, la musique, et, au sens large, les arts de leur belle Provence à travers le temps, ne se limitent pas au monde médiéval. Ils ont, en effet, crée également BLANCAFLOR un ensemble dédié aux musiques de la renaissance en langue d’oc, et SIRIGAUDA, une troisième formation qui se propose de faire découvrir les chants et les danses traditionnels de la Provence alpine.
Quoiqu’il en soit et pour en revenir au sujet du jour, si vous aimez l’art médiéval unique des troubadours des XIIe et XIIe siècles et leur langue d’Oc aux accents chantants, ou si vous êtes même simplement curieux de les découvrir, vous apprécierez, sans nul doute, le travail artistique de Thierry Cornillon, Domitille Vigneron et de leur formation FLOR ENVERSA.
Pour plus d’informations les concernant, ainsi que sur leur actualité, n’hésitez pas à consulter leur site web très complet : flor-enversa.com
Bel m’es quan son li fruich madur
Paroles et approche de traduction
La traduction que nous vous livrons ici est tirée des oeuvres complètes de Marcabru, annotées et traduites par le Docteur Jean-Marie Lucien Dejeanne (1842-1909) qui écrivit aussi sous le pseudonyme de Nabaillet. Historien local, romaniste et spécialiste de littérature gasconne, l’homme était également médecin et maire de la commune de Bagnères-de-Bigorre (Hautes-Pyrénées).
L’ouvrage fut publié, en 1909, à titre posthume et l’auteur lui-même ne considérait pas l’édition comme définitive. Il l’avait, en effet, engagé avec l’intention de proposer une première classification de la poésie du troubadour médiéval et concernant la traduction qu’il en fit, il entendait ouvrir des pistes pour la compréhension, « aiguillonner » même pourra-t-on lire en préface de son livre, plus qu’il ne prétendait l’épuiser totalement. De son propre avis, cette dernière n’a donc pas la prétention de la perfection.
Pour en dire encore un mot, elle est littérale, parfois intuitive, souvent assurée (peut-être trop de l’avis même encore du bon docteur lui-même). Elle ne cherche en tout cas pas l’adaptation en vers. Bien évidemment, dans le texte français, la poésie de Marcabru se dilue totalement, mais il y a toujours trois choix face à une poésie et quelque soit sa langue : la traduire et tenter d’en approcher le sens, ne pas la traduire et simplement laisser les lecteurs goûter à sa musicalité, en espérant qu’elle leur suffise et enfin l’adapter en vers et se distancier définitivement de la langue originale. Quand on aime la poésie autant que les langues, une traduction littérale même imparfaite, même si, encore une fois, elle ne peut rendre totalement justice à la beauté poétique du texte originel, demeure tout de même utile à plus d’un égard; elle n’empêche pas, par ailleurs et après coup de revenir vers le texte source pour mieux l’apprécier. Nous faisons donc le choix volontaire et assumée de la publier ici, dusse-t-elle laisser en suspens quelques interrogations.
I
Bel m’es quan son li fruich madur E reverdejon li gaïm, E l’auzeill, per lo temps escur, Baisson de lor votz lo refrim, Tant redopton la tenebror; E mos coratges s’enansa, Qu’ieu chant per joi de fin’ Amor E vei ma bon’ esperansa.
J’aime quand les fruits sont mûrs et que reverdissent les regains, et quand les oiseaux, par le temps obscur, baissent le ramage de leur voix, tant ils redoutent les ténèbres; Et mon coeur est transporté, Car je chante par joie le fine Amour et je vois ma bonne espérance.
II
Fais amie, amador tafur, Baisson Amor e levo·l crim, E no·us cuidetz c’Amors pejur, G’atrestant val cum fetz al prim Totz temps fon de fina color, Et ancse d’una semblansa; Nuills hom non sap de sa valor La fin ni la comensansa.
Faux amis, amants perfides rabaissent Amour et relèvent le crime; et ne vous imaginez pas qu’Amour soit devenu pire (en soit entaché), car il vaut autant qu’aux premiers jours toujours il fut de pure couleur et d’une même apparence; nul homme ne sait de sa valeur [de son pouvoir] la fin ni le commencement.
III
Qui·s vol si creza fol agur, Sol Dieus mi gart de revolim Qu’en aital Amor m’aventur On non a engan ni refrim Qu estiu et invern e pascor Estau en grand alegransa, Et estaria en major Ab un pauc de seguransa.
Croira qui voudra les folles augures Dieu seul me garde de changer car je m’aventure en un Amour sans trouble, ni tromperie En été comme hiver et pâques [printemps], je suis en grande allégresse et je l’aurais encore plus grande avec un peu plus de certitude (sécurité).
IV
Ja non creirai, qui que m’o jur, Que vins non iesca de razim, Et hom per Amor no meillur C’anc un pejurar non auzim, Qu’ieu vaill lo mais per la meillor, Empero sivm n’ai doptansa, Qu’ieu no’m n’aus vanar, de paor De so don ai m’esperansa.
Jamais je ne croirai, quiconque me le jure, que le vin ne sorte pas du raisin Et que l’homme par Amour ne soit pas rendu meilleur, car jamais nous n’avons appris qu’un seul en soit devenu pire, cependant j’ai de l’incertitude, Au point que je n’ose m’en vanter, par peur de ce qui est l’objet de mon espérance. (de perdre)
V
Greu er ja que fols desnatur, Et a follejar non recim E folla que no’is desmesur; E mais albres de mal noirim, De mala brancha mala flor E fruitz de mala pesansa Revert al mal outra’l pejor, Lai on Jois non a sobransa.
Il sera certes difficile que le fou se dénature et ne recommence pas à faire des folies, et que folle (folie?) soit sans démesure mauvais arbre vient de mauvaise nourriture, de mauvaise branche, mauvaise fleur, et fruit de mauvaise pensée retourne au mal, sinon au pire, là où Joie n’est pas souveraine.
VI
Que l’Amistat[s] d’estraing atur Falsa del lignage Caïm Que met los sieus a mal ahur, Car non tem anta ni blastim, Los trai d’amar ab sa doussor, Met lo fol en tal erransa Qu’el non remanria ab lor Qui·l donava[n] tota Fransa.
L’amitié perverse aux étranges attachements des descendants de Caïn les entraîne dans le malheur, car elle ne craint honte ni blâme, les empêche d’aimer par sa douceur ( les éloigne de l’Amour vrai); elle met le:fou en telle erreur (errance ? perplexité) qu’il ne resterait plus avec ceux (qu’ils ne s’y résigneraient même pas) même si on leur donnait la France entière (?)
En vous souhaitant une merveilleuse journée.
Frédéric EFFE.
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Sujet : poésie, littérature renaissante, poète, épigramme, poésies courtes. Période : début renaissance, XVIe siècle Auteur : Clément MAROT(1496-1544), Martial (41-104) Titre :« Epigramme à Antoine » Ouvrage : Oeuvre de Clément Marot, Valet de chambre du Roy (T2), 1781
« Si tu es povre, Antoine, tu es bien En grand danger d’estre povre sans cesse, Car aujourd’huy on ne donne plus rien Sinon à ceux qui ont force richesse. » Clément Marot, Epigramme à Antoine
Bonjour à tous,
i l’on nourrissait encore quelques doutes sur l’influence qu’aurait pu avoir Martial, poète du 1er siècle de notre ère et grand maître de l’épigramme latine, sur les poésies courtes de Clément Marot, voici de quoi les dissiper. Les quatre vers que nous partageons aujourd’hui sont, en effet, tirés des « Epigrammes faictz à l’imitation de Martial » que Marot composa vraisemblablement entre 1537 et 1542.
Ces épigrammes de Marot pourraient paraître quelquefois plus proches de ce que nous appellerions, aujourd’hui, des « adaptations » que de véritables créations « d’auteur » (au sens où nous l’entendons, de nos jours, également) mais il faut se replacer dans le contexte littéraire du XVIe siècle pour comprendre à quel exercice le poète de Cahors se livrait ici. De fait, dans une renaissance qui développera un véritable culte pour les auteurs antiques et anciens, « l’imitation » sera vivement encouragée et deviendra même un passage obligé de l’exercice littéraire. Bien sûr, il ne s’agira jamais de plagier et il conviendra toujours d’apporter sa propre touche. C’est d’ailleurs ce que fait ici le poète normand en ajoutant aux idées de Martial, la grâce habituelle de sa plume et son bon français « renaissant ».
Ad Aemilianum, par le poète latin Martial (Marcus Valerius Martialis) dans le texte original :
« Semper eris pauper, si pauper es, Aemiliane, dantur opes nulli nune,nisi divitibus »
« Tu seras toujours pauvre, Emilien , si tu vis dans la misère. Aujourd’hui la richesse ne se donne qu’à ceux qui sont dans l’abondance. »
Le temps a emporté dans son sillage cet Antoine que visait l’épigramme de Marot, et il ne nous reste de ces quelques vers que le goût du vieil adage : « On ne prête qu’aux riches ». A l’évidence, de Martial à Marot et jusqu’à nous, il s’entête à se vérifier. Tout cela aurait donc commencé, il y a bien longtemps déjà.
.En vous souhaitant une belle journée.
Fred
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Sujet : poésie médiévale, poésie réaliste, auteur médiéval. ballade, folk médiéval. Auteur : François Villon (1431-?1463) Titre : Ballade de Mercy (Merci) Période : moyen-âge tardif, XVe siècle. Interprétes : Corvus Corax. Album: Seikilos 2006
Bonjour à tous,
oilà quelque temps que nous n’avons parlé à la fois de François Villon et de Folk médiéval et ce sont, cette fois-ci, les allemands de Corvus Corax qui nous en fournissent l’occasion. En 2005, le groupe enregistrait en effet, dans le texte, La Ballade par laquelle Villon crye mercy à chascun, connue encore sous le nom de Ballade de Mercy, en nous proposant cette poésie médiévale avec force orchestration et rien moins qu’une sérieuse touche celtique.
Corvus Corax: rock folk néo-médiéval
a postérité de François Villon a dépassé les frontières de la France auprès des amateurs de poésie médiévale et même de poésie tout court, mais il demeure toujours amusant de constater les étranges travers que les auteurs prennent, quelquefois, pour nous revenir. Cette fois-ci, ce n’est donc pas par la Russie (voir article), mais par l’Allemagne que Villon le fait.
Fondé à l’origine et en 1989 par deux allemands de l’Est ayant profité de la chute du mur de Berlin pour passer en RFA, en laissant derrière eux un Corbeau apprivoisé ( d’où le nom du groupe), Corvus Corax a gratifié depuis, son public, d’une bonne trentaine de productions entre albums studio, opéras, dvd et albums live.
Toujours actifs depuis leur création, avec quelques changements de musiciens et d’artistes en cours de route qui n’ont pas affecté l’existence du groupe, ils se produisent principalement en concert en Allemagne, avec quelques dates dans d’autres pays européens en proposant leur style néo-médiéval, soit une musique aux tendances rock et folk et aux accents celtiques et nordiques prenant sa source d’inspiration dans le moyen-âge. La bande utilise de nombreux instruments d’époque. cornemuses et autres chalumeaux et en fabriquent même de spéciaux pour chercher de nouvelles sonorités aux accents anciens.
Ajoutons que cette ballade de Villon, tiré de leur album Seikilos, sorti en 2002 est la seule de l’auteur du CD. Cet album est disponible à la vente en ligne, sur le lien suivant : Seikilos de Corvus Corax
La Ballade par laquelle Villon
crye mercy à chascun
Dans cette ballade, Villon, se sachant condamné, implore la pitié de tous, en égratignant encore au passage, les tortionnaires et bourreaux qui l’ont soumis au dur régime du pain, de l’eau et de la torture et, avec eux, Thibaud d’Aussigny, le sévère et puissant évêque d’Orléans, responsable de son enfermement à Meung-Sur-Loire et que Villon fit entrer dans la postérité avec lui. Et Villon crie ici, du fond de sa geôle, même si cette poésie semble plutôt être déclamée dans la rue, à l’attention de tout ce petit peuple qui y vit et que le poète connaît si bien. Dans le second tome de son excellent ouvrage sur la vie du poète médiéval « François Villon, sa vie, son temps » (1913),Pierre Champion y verra même, de son côté, une référence certaine aux crieurs de corps qui annonçaient alors les noms des morts.
Pour en terminer, les paroles utilisées par Corvus Coraxdans leur interprétation de cette ballade de Villon, étant un peu modernisée, nous avons préféré publier ici une version plus fidèle à la langue originelle de Villon. Elle est tirée des oeuvres de Maistre François Villon, par Jean-Henri-Romain Prompsault (1835) dont nous avons déjà parlé ici; l’ouvrage nous sert d’ailleurs aussi de guide principal pour les annotations.
A Chartreux et à Célestins, A Mendians et à Dévotes, A musars et claquepatins (1), A servans et filles mignottes Portants surcotz et justes cottes, A cuideraulx d’amours transis, (2) Chaussant, sans méhaing, fauves bottes, Je crye à toutes gens merciz.
A fillettes montrans tétins, Pour avoir plus largement hostes, A ribleurs meneurs de hutins (3) A basteleurs traynant marmottes, A folz et folles, sotz et sottes, Qui s’en vont sifflant cinq et six A marmousetz et mariottes, (4) Je crye à toutes gens merciz,
Sinon aux trahistres chiens mastins Qui m’ont faict manger dures crostes, (5) Et boire eau maintz soirs et matins, Qu’ores je ne crains pas trois crottes. Pour eulx, je feisse petz et rottes ; Voulentiers, si ne fusse assis; Au fort, pour éviter riottes, (6) Je crye à toutes gens merciz.
S’on leur froissoit les quinze costes De bons mailletz, fortz et massis ; De plombée, et de telz pelotes.(7) Je crye à toutes gens merciz.
Notes
(1) Musars : badauds. oisifs. Cliquepatins ; « galopins » qui court les rues. (2) Cuideraulx : de « cuideor »: présomptueux. Vaniteux élégamment chaussés. (3) Ribleurs : coureurs de nuit, crapules faisant du tapage de nuit (4) Marmousets : petits garçon et petites filles (5) Crostes : croûtes de pain (6) Au for pour éviter riottes ; Du reste pour éviter toute querelles (7) De plombées et de tels pelotes : garnis de plombs ou de choses semblables.
En vous souhaitant une très belle journée.
Fred
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