Archives de catégorie : Musiques, Poésies et Chansons médiévales
Vous trouverez ici une large sélection de textes du Moyen âge : poésies, fabliaux, contes, chansons d’auteurs, de trouvères ou de troubadours. Toutes les œuvres médiévales sont fournis avec leurs traductions du vieux français ou d’autres langues anciennes (ou plus modernes) vers le français moderne : Galaïco-portugais, Occitan, Anglais, Espagnol, …
Du point du vue des thématiques, vous trouverez regroupés des Chansons d’Amour courtois, des Chants de Croisade, des Chants plus liturgiques comme les Cantigas de Santa Maria d’Alphonse X de Castille, mais aussi d’autres formes versifiées du moyen-âge qui n’étaient pas forcément destinées à être chantées : Ballades médiévales, Poésies satiriques et morales,… Nous présentons aussi des éléments de biographie sur leurs auteurs quand ils nous sont connus ainsi que des informations sur les sources historiques et manuscrites d’époque.
En prenant un peu le temps d’explorer, vous pourrez croiser quelques beaux textes issus de rares manuscrits anciens que nos recherches nous permettent de débusquer. Il y a actuellement dans cette catégorie prés de 450 articles exclusifs sur des chansons, poésies et musiques médiévales.
Sujet : musique, poésie, chanson, médiévale, trouvère, pastourelle, Epoque : moyen-âge central, Auteur : Adam de la Halle (1220-1288) Titre : le jeu de Robin & Marion Interprète : Ensemble Perceval
Album : « Adam de la Halle : Le jeu de Robin et Marion» (1981 Arion)
Bonjour à tous,
ous avions déjà parlé, il y a quelques semaines, de la pastourelle médiévale « le jeu de Robin et Marion » du trouvère Adam de la Halle et nous vous en présentons, aujourd’hui, un autre extrait musical. Cette fois-ci, nous le devons à l’excellentissime Ensemble Perceval et il faut bien avouer qu’au niveau vocal tant que musical, cette pièce nous transporte d’emblée dans un ailleurs poétique sublime.
(ci-contre le jeu de Robin et Marion, enluminures, Ms. 166, XIVe, Bibliothèque Méjanes , Aix en Provence)
Ce n’est qu’un extrait de la scène II entre Marion et son promis et amant Robin. Il finit un peu en queue de poisson et nous nous en excusons. Le morceau dure en réalité 11 min 20. Sous la direction de Guy Robert, l’album dédié dans son entier au jeu de Robin et Marion est accessible sur Amazon et d’autres sites de vente en ligne. Le travail artistique de la formation y est résolument ouvert à des morceaux hors de l’oeuvre de Adam de La Halle.
Pour plus d’informations sur les productions Perceval, vous pouvez consulter l’article que nous leur avions dédié précédemment ici:
Type : musique du moyen-âge, chanson médiévale, troubadour, trouvère. folk Datation : XVIe siècle. Titre : La Complainte du Roi Renaud
Interprète:Pierre Bensusan Album : Pierre Bensusan 2 (1977)
Bonjour à tous,
ans le répertoire des musiques et chansons plus résolument folk(s) qu’authentiquement médiévales, au niveau de leur interprétation et même souvent d’ailleurs de leur datation, voici une très jolie version de la chanson du roi Renaud que le chanteur et guitariste Pierre Bensusan nous proposait dans un album de 1977.
Originaire d’Oran, où il naquit en 1957, cet artiste confirmé s’est imposé avec le temps comme un véritable virtuose de la guitare. S’il a assez tôt exploré les territoires du folk bouillonnant des années 70 , il s’est rapidement ouvert sur d’autres styles.
Avec de nombreux prix et Awards, il est considéré, à ce jour, comme l’un des plus brillants guitaristes acoustiques de sa génération dans le domaine de la World music. Il y mêle avec succès les notes Jazz à d’autres styles. Témoin d’un succès qui ne se démord pas, son agenda ne désemplit pas et on peut le retrouver en concert de l’Europe aux Etats-unis, en passant même par l’Asie et la Chine. Il fait également bénéficier les autres de son savoir et de sa maîtrise musicale de la guitare avec des séminaires et des ouvrages de méthode.
La Complainte du Roi Renaud par Pierre Bensusan
L’album Pierre Bensusan 2
En plus de la pièce du jour, on retrouve dans l’album dont elle est tirée et qui a simplement pour titre le nom de son auteur : Pierre Bensusan 2. pas moins de 10 pièces empruntées au répertoire des chansons anciennes et traditionnelles.
A ce jour, cette production est toujours éditée. Voici un lien utile pour plus d’informations: Bensusan 2 (1977). A noter que vous pouvez également retrouver l’ensemble de l’actualité de Pierre Bensusan, ainsi que cet album à l’écoute et à l’achat sur son web très complet.
La complainte du roi Renaud,
Paroles en français moderne
Le Roi Renaud de guerre revint, Tenant ses tripes dans ses mains. Sa mère était sur le créneau Qui vit venir son fils Renaud:
– Renaud, Renaud, réjouis-toi ! Ta femme est accouchée d’un roi, – Ni de ma femme, ni de mon fils Mère, je ne saurais me réjouir.
Allez ma mère partez devant; Faites-moi faire un beau lit blanc: Guère de temps n’y resterai, A la minuit trépasserai.
Mais faites-le moi faire ici bas, Que l’accouchée n’entende pas. Et quand ce vint sur la minuit Le roi Renaud rendit l’esprit.
Il ne fut pas le matin jour Que les valets pleuraient tous; Il ne fut temps de déjeuner Que les servantes ont pleuré.
– Mais, dites-moi, mère mamie Que pleurent nos valets ici ? – Ma fille, en baignant nos chevaux, Ont laissé noyer le plus beau.
– Mais pourquoi mère mamie, Pour un cheval pleurer ainsi ? Quand Renaud reviendra, Plus beau cheval ramènera.
Et dites-moi mère mamie, Que pleurent nos servantes ici ? – Ma fille, en lavant nos linceuls Ont laissé aller le plus neuf.
– Mais pourquoi, mère mamie, Pour un linceul pleurer ainsi ? Quand Renaud reviendra, Plus beau linceul on brodera.
Mais dites-moi mère mamie. Que chantent les prêtres ici ? – Ma fille, c’est la procession Qui fait le tour de la maison.
Or quand ce fut pour relever, A la messe elle voulut aller; Et quand arriva le midi, Elle voulut mettre ses habits:
– Mais dites-moi, mère mamie, Quel habit prendrai-je aujourd’hui ? – Prenez le vert, prenez le gris, Prenez le noir pour mieux choisir.
– Mais dites-moi, mère mamie, Qu’est-ce que ce noir-là signifie ? – Femme qui relève d’enfant, Le noir lui est bien plus séant.
Quand elle fut dans l’église entrée, Un cierge on lui a présenté. Aperçut en s’agenouillant, La terre fraîche sous son banc.
– Mais dites-moi, mère mamie, Pourquoi la terre est rafraîchie ? – Ma fille ne puis plus vous le cacher Renaud est mort et enterré.
– Renaud, Renaud, mon réconfort, Te voilà donc au rang des morts; Divin Renaud, mon réconfort, Te voilà donc au rang des morts !
Puisque le roi Renaud est mort, Voici les clefs de mon trésor; Prenez mes bagues et mes joyaux, Prenez bien soin du fils Renaud !
Terre ouvre-toi, terre fends-toi, Que j’aille avec Renaud mon roi ! Terre souvrit, terre fendit, Et si fut la belle engloutie
Pour plus d’éléments sur cette chanson, vous pouvez consulter l’article suivant : la complainte du roi Renaud.
Sujet : poésie, littérature médiévale, réaliste, satirique, épitaphe, auteur médiéval, testament, rondeau. Période : moyen-âge tardif Titre : « épitaphe et rondeau » Oeuvre : le grand testament Auteur : François Villon (1431- ?1463)
Bonjour à tous,
oilà un peu de la poésie médiévale de Maître François Villon en forme d’épitaphe, avec un extrait de cet entêtant testament qui résonne encore jusqu’à nous. C’est la poésie de celui qui attend dans sa geôle une mort et une pendaison qu’il pense déjà certaines. Cette Camarde, il l’a tellement apprivoisée dans la solitude désespérée de sa prison qu’il s’est projeté dans son au-delà. Et ce testament, presque déjà post-mortem et qui semble quelquefois être celui d’un revenant, c’est encore un chant de détresse et de rédemption : Villon déjà mort, déjà pendu, déjà oublié, sacrifié sur l’autel de ses misères et de ses erreurs, priant pour que son âme soit sauvée et avec la sienne, les nôtres aussi un peu. Il sera relâché pourtant, pour disparaître peu après avec ses mystères sans que l’on ait jamais su ce qu’il était advenu de lui, en nous laissant, avant de partir comme un grand cri, ce testament, qui a marqué depuis la poésie au fer rouge.
Épitaphe et rondeau
Ci gît et dort en ce solier, Qu’amour occit de son raillon, Un pauvre petit écolier Qui fut nommé François Villon. Oncques de terre n’eut sillon. Il donna tout, chacun le sait : Table, tréteaux, pain, corbillon. Pour Dieu, dites-en ce verset :
Repos éternel donne à cil, Sire, et clarté perpétuelle, Qui vaillant plat ni écuelle N’eut oncques, n’un brin de persil.
Il fut rés, chef, barbe et sourcils, Comme un navet qu’on ret ou pèle. Repos éternel donne à cil.
Rigueur le transmit en exil Et lui frappa au cul la pelle, Nonobstant qu’il dît : » J’en appelle ! « Qui n’est pas terme trop subtil. Repos éternel donne à cil. François Villon – Epitaphe et rondeau
Improvisation a Cappella de G. Brassens
sur l’épitaphe de Villon.
‘est un document rare que nous partageons ici, une petite improvisation de Georges Brassens, à la faveur d’un interview, sur cet épitaphe de Villon. C’est encore une référence et un tribut de plus à ajouter au compte du grand chanteur anarchiste et non conformiste sétois du XXe, envers celui dont on fit son maître et qu’il finit par adopter. Tous les articles sur la poésie de Villon chez Brassens sont ici.
En vous souhaitant une belle journée!
Fred
Pour moyenagepassion.com A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.
Sujet : troubadours, poésie satirique, poésie morale, chanson, musique médiévale, pastourelle. occitan. Période : moyen-âge central, XIIe siècle Auteur : Marcabru (1110-1150) Titre : « L’autrier jost’ una sebissa » Album : Bestiarium (1997) Interprète : La Reverdie
Bonjour à tous,
Nous partons aujourd’hui à la découverte des origines de l’art des troubadours occitans et provençaux avec l’un des premiers d’entre eux, à tout le moins un parmi les plus anciens connus à ce jour, pour nous avoir légué une oeuvre écrite, soit Marcabru ou Marcabrun quand on francise son nom.
Marcabru: éléments de biographie
‘histoire et la biographie de Marcabrusont à mettre au conditionnel car on n’en sait peu de lui. Enfant illégitime, « jeté à la porte d’un homme puissant »* élevé sans doute par le noble Audric del Vilar, seigneur d’Auvillar dans l’Occitanie du XIIe siècle, celui qui se fait aussi surnommer Pain Perdu est d’origine apparemment Gasconne. Son nom est-il un pseudonyme, fils de dame brune nous dit-il ou faut-il plutôt y voir un clin d’oeil occitan à un bouc, un mâle caprin ? Difficile de l’affirmer. On sait encore de lui qu’il côtoya un troubadour du nom de Cercamon(cherche-monde) dont il fut vraisemblablement l’ami et, peut-être même l’élève, quand on n’en fait pas plutôt, à l’inverse, le maître.
Il y a, concernant Marcabru,tant de zones d’ombre que certains spécialistes de littérature médiévale et, notamment, la professeur Laura Kendrick ont même formé l’hypothèse que les quelques quarante trois ou quarante quatre poésies qu’on lui attribue pourraient être, en réalité, un corpus plus qu’un auteur. Ajoutons que cette hypothèse semble, à ce jour, peu suivie et qu’on s’accorde encore tout de même bien plus souvent sur l’idée que Marcabru fut une personne réelle, même si l’absence de données fiables ou d’archives le concernant pourrait, il est vrai, donner quelques vertiges.
Une pastourelle de Marcabru par le groupe italien La Reverdie
Une poésie lyrique, satirique et morale
« Marcabru, fils de dame Brune, fut engendré sous une étoile telle qu’il sait comme Amour se déroule, écoutez car jamais il n’aima nulle femme, et d’aucune ne fut aimé. » Le chant de Marcabru.
Avec sa poésie satirique et morale, son langage quelquefois « vert », avec encore ses critiques du « fin ‘amor », cet amour courtois qu’affectionneront tant d’autres poètes et chanteurs occitans après lui, Marcabru n’apparaît pas comme l’archétype du troubadour, mais plutôt comme un être en marge. Poète de cour, chassé lit-on, par endroits, pour avoir convoité la dame d’un seigneur, il serait passé de la cour du Duc d’Aquitaine à celle de Castille et aurait vécu nombre d’années en Espagne. Au vue de la morale qu’il défend et de sa misanthropie qu’on a quelquefois pris pour de la misogynie tant il s’en prend aux femmes légères et volages, cela paraît un peu étonnant. Luxure, prostitution, infidélités, adultères multiples, entre les lignes de sa satire qui ne s’en tient pas qu’aux moeurs de son temps qu’il juge dépravés, mais s’aventure aussi sur des terrains plus politiques, sa poésie prendra souvent un tour moral, mais on y retrouvera également de belles envolées lyriques et bucoliques avec de nombreux vers chantant la nature, ses animaux et ses saisons.
(Ci-contre La bergère William Bouguereau, XIXe siècle.)
Pour le reste, ce troubadour occitan des débuts du XIIe siècle demeure l’auteur de la plus ancienne pastourelle connue, ce genre dont nous avons déjà parlé ici et qui met en scène une bergère mignonnette qu’un noble seigneur ou chevalier tente en vain de séduire ou même pire force dans certains cas, quand cette dernière ne se laisse pas tourner la tête par la condition sociale, ni les richesses de ce passant aux mauvaises manières quand elles ne sont pas détestables ou exécrables.
Ajoutons enfin qu’on trouve aussi dans la poésie de Marcabru des mentions faites du Roi Arthur de Bretagne et de ses chevaliers ce qui en fait encore l’un des premiers troubadours à avoir abordé le sujet des légendes arthuriennes dans ses chansons.
Les interprètes du jour : « La reverdie »
Aujourd’hui, nous vous proposons la version de cette pastourelle par l’ensemble italien La Reverdie dans l’album Bestarium qu’il dédiait en 1997 aux animaux et à la présence de la nature dans la musique du moyen-âge.
Formé originellement en 1986 par quatre chanteuses, musiciennes et instrumentistes, qui se trouvent être aussi deux couples de soeur, l’ensemble La Reverdie s’est bientôt entouré de nouveaux collaborateurs dont le chanteur et instrumentiste Doron David Sherwin qui accompagne la formation dans ses aventures artistiques et musicales depuis le début de années quatre-vingt dix. A titre anecdotique, on retrouvera même une collaboration avec Gérard Depardieu à l’occasion d’un festival à la Basilique de Saint Vital, à Ravenne, autour de lectures de Saint Augustin.
En vingt ans de production artistique, on doit au très actif ensemble italien, près de vingt-cinq albums, dans un répertoire purement médiéval qui couvre les XIIIe et XIVe siècles. Leur champ d’investigation va de la musique sacrée à la musique profane et inclut encore des prestations autour de chants de noël. Le registre est souvent composé de chants polyphoniques ou monophoniques à capela mais les instruments viennent aussi soutenir les voix des artistes sur certaines pièces, quand le besoin s’en fait sentir.
Leur site web est en italien mais tout y est et il n’y manque rien des concerts aux festivals et actualités de la formation. Le groupe dispose également de sa propre chaîne youtube sur laquelle vous pourrez encore trouver quelques vidéos supplémentaires de leurs prestations.
La très belle version de cette pastourelle du troubadour occitan interprétée ici par cette formation est sans doute un peu éloignée de sa version originale, en terme de tessiture de voix, puisqu’on apprend dans une autre des poésies de Marcabru que ce dernier qu’il avait la voix plutôt « rude » et « rauque », mais la virtuosité et la pureté dans l’exécution nous le font bien vite oublier. Il en existe d’autres versions à la ronde que le futur nous donnera assurément l’occasion de vous faire partager, mais nous ne résistions pas au plaisir de vous parler, aujourd’hui, de cet excellent ensemble médiéval italien.
Les paroles de la chanson et pastourelle
de Marcabru en occitan avec adaptation
On notera qu’il s’agit ici d’une version raccourcie de la pastourelle originale de Marcabru qui contient en réalité treize strophes. L’adaptation en français moderne est tirée des Poésies Complètes du Troubadour Marcabrupar J M Dejeanne (1909).
Ajoutons que la dernière strophe est traduite très « début de XXe siècle » tout de même et avec un rien de pudibonderie. La version originale est nettement plus rude, mais en puisant dans les racines latines communes de l’occitan et du français, je suis certain que vous trouverez vous-même une traduction plus conforme.
L’autrier jost’ una sebissa de Marcabru
L’autrier jost’ una sebissa trobei pastora mestissa, de joi e de sen massissa. Si cum filla de vilana, cap’ e gonel’ e pelissa vest e camiza treslissa, sotlars e caussas de lana.
L’autre jour, près d’une haie,
je trouvai une pastoure métisse (de moyenne condition),
pleine de gaieté et de sens;
elle était fille de vilaine;
vêtue d’une cape, d’une gonelle
et d’une pelisse, avec une chemise maillée,
des souliers et des chausses de laine. »
Ves lieis vinc per la planissa: — »Toza », fi·m ieu, « res faitissa, dol ai car lo freitz vos fissa ». — »Merce Dieu e ma noirissa, pauc m’o pretz si·l vens m’erissa, pauc m’o pretz si·l vens m’erissa, qu’alegreta sui e sana ».
Vers elle je vins par la plaine
« Jouvencelle, lui dis-je, être enchanteur,
j’ai grand deuil que le froid vous pique. »
« Sire, dit la vilaine, grâce à Dieu et ma nourrice,
peu me chaut que le vent m’échevèle,
car je suis joyeuse et saine. »
— »Bela », fi·m ieu, « cauza pia, destors me sui de la via per far a vos compaignia; quar aitals toza vilana no deu ses pareill paria pastorgar tanta bestia en aital terra, soldana ».
« Jouvencelle, lui dis-je, objet charmant,
je me suis détourné du chemin
pour vous tenir compagnie
car une jeune vilaine telle que vous
ne doit pas, sans un compagnon assorti,
paître tant de bétail
dans un tel lieu, seulette. »
— »Don, tot mon ling e mon aire vei revertir e retraire al vezoig et a l’araire, Seigner », so·m dis la vilana; « Mas tals se fai cavalgaire c’atrestal deuria faire los seis jorns de la setmana ». « Sire, tout mon lignage et toute ma famille,
je les vois retourner et revenir
à la bêche et à la charrue,
Seigneur, dit la vilaine;
mais tel se dit chevalier
qui devrait faire le même métier
durant six jours de la semaine. »
— »Bela », fi·m ieu, « gentils fada, Vos adastret, quam fos nada, d’una beutat esmerada sobre tot’ autra vilana; e seria·us ben doblada si·m vezi’ una vegada, sobeira e vos sotrana ».
«Jouvencelle, dis-je, gentille fée vous dota, quand vous naquîtes, d’une beauté suprême sur toute autre vilaine et vous seriez doublement belle si je vous voyais une fois Moi dessus et vous sous moi.
— »Don, hom coitatz de follatge jur’ e plieu e promet gatge: Si·m fariatz homenatge, Seigner », so·m dis la vilana; « non vuoil ges mon piucellatge, non vuoil ges mon piucellatge camjar per nom de putana ».
« Sire, homme pressé de folie jure, garantit et promet gage; ainsi vous me feriez hommage, Seigneur, dit la vilaine; mais, en échange d’une légère récompense, je ne veux pas laisser mon bien le plus cher pour être perdue de réputation. »
En vous souhaitant une très belle journée.
Fred
Pour moyenagepassion.com A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.
* Les biographies des troubadours en langue Provençale, Camille Chabaneau, 1885.