Sujet : chanson médiévale, amour courtois, vieux-français, langue d’oïl, musique médiévale, manuscrit ancien Période : XIIe s, XIIIe siècle, Moyen Âge central Titre :Cuer qui dort, il n’aime pas Auteur : auteur anonyme Manuscrit ancien : Codex de Montpellier H196 ou Chansonnier de Montpellier
Bonjour à tous,
ujourd’hui, nous vous proposons une chanson médiévale datée entre le XIIe et le XIIIe siècle (avant 1280). Tirée du Codex H196 de Montpellier , cette pièce d’amour courtois est demeurée anonyme. Pour les amateurs de mélodies anciennes, ce beau manuscrit médiéval dont nous avons déjà parlé, a l’avantage de nous proposer les notations musicales de ses textes.
A l’image de nombreuses pièces du Chansonnier de Montpellier, la chanson du jour est en langue d’oïl. Comme son vieux français présente quelques difficultés sur certains vocables, nous avons décidé de vous en livrer une courte traduction en français moderne. Du point de vue du contenu, nous nous situons tout à fait, dans la veine des valeurs courtoises du Moyen Âge central. Ici, le loyal amant fait le vœu de ne jamais s’endormir en amour. Il ne connaîtra même de vrai repos tant que la belle de son cœur ne lui aura pas ouvert ses doux bras.
Si le Chansonnier de Montpellier ou ses pièces vous intéressent, vous pourrez les retrouver dans l’ouvrage de Gaston Raynaud daté de 1881 : Recueil de Motets français des XIIe et XIIIe siècles.
Cœur qui dort n’aime pas
Cuer qui dort, il n’aime pas : Ja n’i dormirai, Toz jors penserai, Loiauement sans gas, A vos, simple et coie Dont j’atent joie Et solas ; N’i dormirai tant que soie Entre voz douz bras.
Cœur qui dort n’aime pas : Jamais je ne dormirai en cela (en amour), Toujours je penserai, Loyalement et sans vanterie (sans moquerie, sérieusement) A vous, modeste (ingénu, loyal) et tranquille Dont j’attends joie Et réconfort ; Et je ne dormirai tant que je serais Entre vos doux bras.
Sujet : combat médiéval, béhourd, armes, armures anciennes, art martial, Buhurt League Nom : Tournoi International des Flandres 2019 Lieu : complexe sportif de la Bourgogne Tourcoing, Nord, Hauts-de-France Dates : samedi 9 & dimanche 10 novembre 2019 Chaîne youtube : Road N Troll
Bonjour à tous,
es 9 et 10 novembre dernier, s’est déroulé, à Tourcoing, dans les Hauts de France, le Tournoi des Flandres de Béhourd 2019. A l’occasion de cette 5ème édition, ce grand événement autour de l’art martial médiéval passait un cap. Depuis cette année, il prend, en effet, sa place officielle comme tournoi « open » du championnat européen de la Buhurt League. A l’habitude, le tournoi de Tourcoing marquait aussi la fin de la saison 2019 et on a pu y assister à des beaux échanges.
Cela tombe bien puisque l’équipe de la chaîne youtube Road N troll a eu l’excellente idée de couvrir l’événement. Le tournoi vient à peine de se terminer qu’elle nous gratifie déjà de superbes images et d’une nouvelle vidéo à son sujet. Du côté du Béhourd, on se souvient que ces vidéastes de choc (si si) avaient déjà couvert le tournoi de Saint Dizier, en mars dernier. Cette fois-ci, le reportage est plus long. On prend mieux le temps de découvrir la dimension internationale du tournoi, ainsi que les équipes présentes et les résultats. Conclusion : il y en a plus et c’est encore mieux. Au passage, n’hésitez pas à vous abonner à leur chaîne. C’est gratuit et ça fait plaisir.
Encore bravo à eux et félicitations à tous les compétiteurs !
Béhourd : le tournoi des Flandres 2019 avec Road N Troll
Sujet : poésie morale, poète satirique, poésie médiévale, politique, lois, dits moraux, poésie courte, français moyen Période : Moyen Âge tardif, XVe siècle Auteur : Henri Baude (1430-1490) Ouvrage : Les vers de Maître Henri Baude, poète du XVe siècle, M. Jules Quicherat (1856),
Bonjour à tous,
n continuant notre exploration de la littérature médiévale, voici quelques vers bien tournés de Henri Baude, poète du Moyen Âge tardif. Ils sont extraits de ses Dictz moraulx pour mettre en tapisserie. Ces petites historiettes, qui ne constituent qu’une partie de son oeuvre, mettaient en scène des personnages variés. Elles étaient destinées à être brodées ou même encore des peintes sur du verre ou d’autres objets décoratifs.
Le bon homme et la toile d’araignée
Ung bon homme regardant dans ung bois ouquel a entre deux arbres une grant toille d’éraigne. Ung homme de court luy dit :
— Bon homme, diz-moy, si tu daignes, Que regarde-tu en ce bois?
LE BON HOMME.
Je pence aux toilles des éreignes Qui sont semblables à noz droiz : Grosses mousches en tous endroiz Passent; les petites sont prises.
LE FOL.
Les petitz sont subjectz aux loix. Et les grans en font à leurs guises.
Dictz moraulx pour mettre en tapisserie Henri Baude
Henri Baude, esquisse de biographie
Suivant ses biographes ( Jules Quicherat et Pierre Champion ), Henri Baude est né autour de 1430, à Moulins. Il est donc contemporain de François Villon même s’il a vécu bien plus longtemps que ce dernier.
Les mésaventures d’un petit fonctionnaire, poète satirique à ses heures
L’histoire n’est pas très précise sur son éducation mais on retrouve Buade à l’âge adulte, commis à la cour. Au moment de la praguerie, il a tout d’abord suivi le dauphin Louis XI, alors prince, dans le conflit qui l’opposait à son père Charles VII. Finalement, le fonctionnaire royal changera d’avis et reviendra vers la couronne officielle. Cela peut, peut-être, expliquer sa nomination en 1458, comme « élu » attaché à la cour du roi. La fonction consistait à répartir l’impôt, mais aussi à collecter et traiter les réclamations sur ce même thème. Henri Baude était en charge au bas Limousin mais comme il disposait d’un commis, il passait le plus clair de son temps à Paris. Installé à la capitale, il pouvait, tout à loisir, suivre de près les affaires qui concernaient sa charge et ses plaignants et houspiller les juges quand ils traînaient trop à les traiter.
Comme il était aussi doté d’un véritable talent de plume et d’humour, Baude ne se priva pas de les exercer. Il faisait même alors partie d’une confrérie de juristes et clercs qui occupaient une partie de leurs loisirs à se moquer entre eux ou à se rire de certains nobles et notables. Plus tard, son goût de la satire et du bon mot allait d’ailleurs lui valoir quelques sérieux déboires.
Henri Baude au Châtelet
En réalité, le poète connut deux fois la prison. Dans les deux cas, le temps avait passé et Louis XI, le prince que Baude avait suivi, puis lâché, était devenu roi. La première affaire n’est pas très claire sur le fond, même s’il subsiste un certain nombre de documents juridiques à son sujet. Baude semble avoir servi de bouc-émissaire à un noble qui le fit embastillé manu militari, après l’avoir sérieusement fait molester. Le poète fonctionnaire parvint toutefois à se faire libérer et à avoir gain de cause, en obtenant même, au passage, des dédommagements.
Dans la deuxième affaire, c’est une poésie satirique qui le fit mettre en prison, sur ordonnance royale. Le texte précis s’est perdu, mais on peut en déduire la teneur entre les lignes du poète et des sources juridiques. Baude avait fait, semble-t-il, une courte « moralité » pour moquer les manœuvres et les jeux de pouvoir à la cour et autour de Louis XI. Bien qu’allusive, de nombreux courtisans de l’entourage du souverain s’étaient sentis directement visés, ce qui valut à notre homme d’être à nouveau emprisonné. Voila ce que l’on trouve rapporter dans l’audience de 1486 : « Aucuns, soubz umbre de jouer ou faire jouer certaines moralitez et farces, ont publiquement dit ou fait dire plusieurs parolles cedicieuses, sonnans commocion, principalement touchant a nous et a notre estât. »
Pour avoir le détail des deux affaires, on pourra se reporter aux écrits de Pierre Champion sur le sujet : Histoire poétique du quinzième siècle, t 2, Honoré Champion (1923) et Maître Henri Baude devant le Parlement de Paris, Romania, n°141 (1907). A son habitude, le grand historien, passionné de Moyen Âge, y épluche les archives avec minutie et fait un travail d’orfèvre pour remonter l’identité des acteurs impliqués et leur interrelations.
Dans tout les cas, on peut se demander si Henri Baude ne paya pas, indirectement, le prix de son soutien un peu trop épisodique au prince Louis XI, sous la praguerie. Si, après son couronnement, le monarque n’avait pas démis le fonctionnaire de sa charge, il ne semblait pas, non plus, lui montrer de soutien particulier, et encore moins d’empathie. Il ressort, en tout cas, de ce dernier séjour en prison, que Baude en sortit échaudé et rendu plus méfiant sur l’usage qu’il faisait de sa liberté d’expression. Au Moyen Âge, la poésie satirique est rarement compatible avec les exigences de cour et les susceptibilités qu’on y croise. Le dit moral de l’auteur, publié ici, résonne un peu comme une sorte d’écho à ses diverses mésaventures.
Les œuvres de Baude
Elles sont assez fournies et de nature principalement morale ou satirique. On retrouve le plus grand nombre d’entre elles dans l’ouvrage que le médiéviste Jules Quicherat a consacré à Baude au milieu du XIXe siècle. Ce dernier confesse, toutefois, en avoir censuré quelques unes dont la nature lui paraissait trop verte et trop grossière pour présenter un réel intérêt. A 160 ans de là, on aurait aimé pouvoir en juger nous-mêmes.
Dans les œuvres de Baude, on a souvent mis en avant son Testament de la mule Barbeau . Dans cette satire humoristique, l’auteur se met dans la peau d’un pauvre animal, vieilli et éreinté, ayant servi de nombreux nobles et puissants au cours de sa vie. Aux côtés de ce testament, on trouve encore nombre de poésies d’intérêt dans lesquelles l’auteur médiéval montre de belles aptitudes de plume. Ce talent semble, du reste, avoir été reconnu du temps de Baude et son biographe lui prête d’avoir inspiré certains de ses contemporains. On a même pu, alors, le comparer à Villon. Un peu plus tard, Clément Marot aurait aussi été sujet à cette influence sans s’en réclamer. Le poète de Cahors aurait, en effet, « pillé » (le mot est de Quicherat) certaines des pièces de Baude sans le citer.
Du point de vue des sources, les écrits de Baude se trouvent réparties dans plusieurs manuscrits médiévaux mais on notera, avec intérêt, l’ouvrage dont est tiré cette poésie courte du jour et son illustration (voir en haut de l’article).
Daté du XVIe siècle, le manuscrit Français 24461 (ancienne cote La Vallière 44) est, en effet, un manuscrit de 142 feuillets très joliment illustré (Consulter le Ms Français 24461 sur le site de la Bnf ). En plus des diz moraux pour tapisserie et peinture sur verre de Baude, il contient d’autres auteurs et classiques. On y trouve, notamment, Les triomphes de Pétrarque.
En vous souhaitant une excellente journée.
Fred
pour moyenagepassion.com A la découverte du Moyen Âge sous toutes ses formes
Sujet : musique médiévale, Cantigas de Santa Maria, galaïco-portugais, culte marial, miracles, Sainte-Marie, vierge, sauvetage, croisades, Saint-Louis, De Joinville Période : Moyen Âge central, XIIIe siècle Auteur : Alphonse X (1221-1284) Titre : Cantiga 193 « Sobelos fondos do mar » Ensemble : Sequentia Album : Songs for King Alfonso X of Castille and León (1991)
Bonjour à tous,
ans la continuité de nos articles sur le culte marial dans l’Europe médiévale du Moyen Âge central, voici un nouveau récit de miracle tiré du corpus du roi Alphonse X de Castille. Il s’agit cette fois de la Cantiga de Santa Maria 193.
La vierge et son manteau contre les éléments
Au Moyen Âge, il n’est pas d’éléments terrestres qui puissent arrêter les miracle de la vierge. Des profondeurs des mers jusqu’aux plus hauts sommets, elle peut, en effet, intercéder en faveur de ceux qui la prient et ont foi en elle, et lever tous les obstacles.
Le récit de la Cantiga 193 porte sur un sauvetage en mer miraculeux. L’histoire se déroule durant ce qui semble être la première croisade de Saint-Louis. Le poète nous conte qu’un marchand fortuné se tenait sur un navire de la large flotte. L’homme était visiblement entouré de mauvaise compagnie puisqu’il fut jeté par dessus bord par l’équipage qui voulut lui dérober ses biens pour les dépenser à la guerre. Quoiqu’il en soit, la vierge intervint et déploya un voile blanc (un drap, un tissu, ailleurs il sera question de son manteau) entre l’homme et les eaux afin qu’il ne fut pas noyé. Quelque temps plus tard, survint une autre nef qui tira l’homme d’affaire. Suite au miracle, il décida qu’il se joindrait à la guerre et tous louèrent la Sainte pour son intervention.
La version de la Cantiga de Santa Maria 193 par Sequentia
Les Cantigas de Santa Maria par Sequentia
En 1991, l’ensemble Sequentia fit, à son tour, un tribut aux célèbres cantigas d’Alphonse X. Enregistré en Suisse, l’album sortit l’année d’après sous le label Deutsche Harmonia Mundi. Il contient 18 pièces dont 13 cantigas et a pour titre : Songs for King Alfonso X of Castille and León (1221-1284). Pour plus de détails à son sujet voir : un chant de Louanges de Cantigas par Sequentia. Vous pouvez également vous procurer cet album au lien suivant : Sequentia performs Vox Iberica III by El Sabio. Quant à la formation de Benjamin Bagby et Barbara Thornton, vous la trouverez présentée ici : portrait de l’ensemble médiéval Sequentia
Aux origines de la Cantiga 193 :
un récit de Sire de Joinville ?
On trouve la trace de miracles semblables à celui de la Cantiga 193 dans des sources diverses. Pour la plupart d’entre eux, ils portent toutefois sur le sauvetage de plusieurs pèlerins de la noyade par l’intervention de la Sainte. (Les Collections De Miracles De La Vierge en Gallo et Ibéro-Roman au XIII Siècle, Paule V. Bétérous, 1993). Autour de 1248-1250, un récit de Sire de Joinville a pu également inspirer le souverain d’Espagne. L’histoire conte, en effet, un miracle ayant de troublantes correspondances avec celui du roi espagnol, à ceci près qu’il s’agit d’une chute malencontreuse à la mer, et pas d’une tentative d’homicide. Dans Les mémoires de Saint-Louis de De Joinville, c’est aussi une des nefs royales qui secourut l’homme. La voici dans le détail, telle que traduite par Natalis de Wailly, en 1874 :
« 650. Une autre aventure nous advint en mer; car monseigneur Dragonet, riche homme de Provence, dormait le matin dans sa nef, qui était bien une lieue en avant de la nôtre, et il appela un sien écuyer et lui dit : « Va boucher cette ouverture, car le soleil me frappe au visage.» Celui-ci vit qu’il ne pouvait boucher l’ouverture s’il ne sortait de la nef: il sortit de la nef. Tandis qu’il allait boucher l’ouverture, le pied lui faillit, et il tomba dans l’eau, et cette nef n’avait pas de chaloupe, car la nef était petite : bientôt la nef fut loin. Nous qui étions sur la nef du roi, nous le vîmes, et nous pensions que c’était un paquet ou une barrique, parce que celui qui était tombé à l’eau ne songeait pas à s’aider.
651 . Une des galères du roi le recueillit et l’apporta en notre nef, là où il nous conta comment cela lui était advenu. Je lui demandai comment il se faisait qu’il ne songeait pas à s’aider pour se sauver, ni en nageant ni d’autre manière. Il me répondit qu’il n’était nulle nécessité ni besoin qu’il songeât à s’aider ; car sitôt qu’il commença à tomber, il se recommanda à Notre-Dame de Vauvert, et elle le soutint par les épaules dès qu’il tomba, jusques à tant que la galère du roi le recueillît. En l’honneur de ce miracle, je l’ai fait peindre à Joinville en ma chapelle, et sur les verrières de Blécourt. «
Jean Sire de Joinville Histoire de Saint Louis,
credo et lettre a Louis X, Natalis de Wailly (1874)
Contre ce récit miraculeux de Jehan de Joinville, et sous réserve que le roi d’Espagne s’en soit inspiré, on notera que la version de ce dernier ne met pas tellement à l’honneur la qualité de l’ost du roi de France et, encore moins, certains membres de sa flotte.
Les paroles de la Cantiga de Santa Maria 193
et approche de traduction française
Como Santa Maria guardou de morte u mercadeiro que deitaron no mar.
Comment Sainte-Marie sauva de la mort un marchand qu’on avait jeté à la mer.
Sobelos fondos do mar e nas alturas da terra á poder Santa Maria, Madre do que tod’ ensserra.
Sur les profondeurs des mers et les plus hautes montagnes, Elle a tout pouvoir Sainte Marie, Mère de celui qui règne sur toute chose,
E daquest’ un gran miragre vos direi e verdadeiro, que fezo Santa Maria, Madre do Rei josticeiro, quand’ o Rei Lois de França a Tunez passou primeiro con gran gente per navio por fazer a mouros guerra.
Sobelos fondos do mar e nas alturas da terra…
Et, à ce propos, je vous conterai un grand et véritable miracle Que fit Sainte-Marie, Mère du Roi de Justice (Dieu, Jésus), Quand le roi Louis de France navigua vers la Tunisie Avec une grande armée pour faire la guerre contre les Maures.
En ha nave da oste, u gran gente maa ya, un mercador y andava que mui grand’ aver tragia; e porque soo entrara ontr’ aquela conpania, penssaron que o matassen pera despender na guerra
Sobelos fondos do mar e nas alturas da terra…
Sur l’un des navires de son ost, où on comptait beaucoup de gens vils, voyageait un marchand qui avait avec lui une grande fortune. Et comme il s’était embarqué seul avec une telle compagnie Ceux-ci eurent l’idée de le tuer pour dépenser à la guerre
O aver que el levava. E [tal] conssello preseron que eno mar o deitassen, e un canto lle poseron odeito aa garganta e dentro con ele deron. Mais acorreu-ll[e] a Virgen que nunca errou nen erra,
Sobelos fondos do mar e nas alturas da terra…
toutes les richesses qu’il avait avec lui. Ils s’accordèrent
pour le jeter à la mer, et il lui attachèrent une pierre autour de son cou, et le jetèrent à l’eau. Mais la Vierge, qui n’a jamais commis de péchés et n’en commettra jamais, vint le secourir.
Que aly u o deitaron tan tost’ ela foi chegada e guardou-o de tal guisa, que sol non lli noziu nada o mar nen chegou a ele, esto foi cousa provada; ca o que en ela fia, en ssa mercee non erra.
Sobelos fondos do mar e nas alturas da terra…
Ainsi, elle vint aussitôt à l’endroit où ils l’avaient noyé et le protégea de sorte que la mer ne lui fit aucun mal et ne le toucha même pas. C’est là une chose admise, que, dans sa miséricorde, elle n’abandonne jamais ceux qui ont foi en elle.
E ele ali jazendo u o a Virgen guardava, a cabo de tercer dia outra nav’ y aportava; e un ome parou mentes da nav’ e vyu com’ estava aquel ome so a agua, e diz: «Mal aja tal guerra
Sobelos fondos do mar e nas alturas da terra…
Et l’homme resta couché là où la vierge le protégeait Et trois jours plus tard, un autre navire s’est approché Et un homme a arrêté le navire et en voyant comment se trouvait cet homme sous l’eau, il a dit : «Maudit soit une telle guerre
U assi os omes matan en com’ a este mataron.» E dando mui grandes vozes, os da nave ss’ y juntaron, e mostrou-lles aquel ome; e logo por el entraron e sacárono en vivo, en paz e sen outra guerra.
Sobelos fondos do mar e nas alturas da terra…
Dans laquelle les hommes tuent comme ils tuèrent celui-ci.» Et comme il poussait de grands cris, ceux du navire le rejoignirent Et il leur montra cet homme ; et ensuite, ils entrèrent (sous les eaux) et l’en sortirent vivant, en paix et sans autres difficultés.
E poi-lo om’ a cabeça ouve da agua ben fora, catou logo os da nave e falou-lles essa ora e disse-lles: «Ai, amigos, tirade-me sen demora daqui u me deitou gente maa que ameud’ erra.»
Sobelos fondos do mar e nas alturas da terra…
Et quand l’homme eut la tête bien hors de l’eau, Il vit alors ceux du navire et leur fit cette supplique, et leur dit : « Ah, mes amis, tirez-moi sans tarder de là où m’ont jeté ces mauvaises gens qui aiment faire du tord (pêcher)« .
Quando os da nav’ oyron falar, espanto prenderon, ca tian que mort’ era; mais pois lo ben connoceron e lles el ouve contado como o no mar meteron, disseron: «Mal aja gente que contra Deus tan muit’ erra.»
Sobelos fondos do mar e nas alturas da terra…
Quand ceux du navire l’entendirent parler, ils furent pris de terreur car ils pensaient qu’il était mort ; mais ils le connaissaient bien et en l’entendant conter comment on l’avait jeté à l’eau, ils dirent : » Bien mauvaises gens qui contre Dieu agissent à si grand tort »
E depois lles ar contava como sempre as vigias el jajava da Virgen e guardava os seus dias; e porend’ o guardou ela e feze-lle no mar vias que o non tangess’ a agua e lle non fezesse guerra.
Sobelos fondos do mar e nas alturas da terra…
Et ensuite il leur a conté comment toujours il gardait Le jeûne pour la Vierge et célébrait ses fêtes : Et c’est pour cela qu’elle le protégeait et le faisait sur les voies maritimes Pour qu’il ne tombe pas à l’eau et qu’on ne lui fasse pas la guerre.
«E porque entendeu ela que prendera eu engano, log’ entre mi e as aguas pos com’ en guisa de pano branco, que me guardou senpre, per que non recebi dano; poren por servir a ela seerei en esta guerra.»
Sobelos fondos do mar e nas alturas da terra…
Et parce qu’elle a compris qu’on m’avait trompé Alors, entre moi et les eaux, elle a posé, comme un drap (tissu) Blanc, qui m’a protégé sans cesse, afin que je ne sois pas blessé; Aussi, pour la servir, je participerais à cette guerre.
Quando os da nav’ oyron esto, mui grandes loores deron a Santa Maria, que é Sennor das sennores; e pois foron eno porto, acharon os traedores e fezeron justiça-los como quen atan muit’ erra.
Sobelos fondos do mar e nas alturas da terra…
Quand ceux des navires entendirent cela, de très grandes louanges Ils firent à Sainte Marie, qui est la dame d’entre les dames : Et puis ils allèrent au port, livrer les traîtres Et leur firent justice comme on le fait à ceux qui agissent mal.
Poi-la jostiça fezeron, o mercador entregado foi de quanto lle fillaran quando foi no mar deitado; e el dali adeante sempre serviu de grado a Virgen Santa Maria sen faliment’ e sen erra.
Sobelos fondos do mar e nas alturas da terra…
Lorsque le châtiment fut appliqué, le marchand retrouva tout ce qu’ils lui avaient pris avant de le jeter à la mer. Et lui, à partir de ce jour, servit toujours de bon gré La Sainte-Vierge sans faille et sans péchés.