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Une envolée lyrique et satirique d’Alain Chartier au dixième an de son dolent exil

Alain-chartier_poete_auteur-medieval_moyen-age_XVe-siecleSujet : poésie médiévale, poésie morale,  moyen-français, vertus, chevalerie, France médiévale, auteur médiéval
Période : moyen-âge tardif, XVe siècle
Auteur :  Alain Chartier (1385(?)-1430)
Ouvrage : L’Espérance ou Consolation des Trois Vertus tirée de  Les Oeuvres de Maistre Alain Chartier (1617)

Bonjour à tous,

A_lettrine_moyen_age_passionujourd’hui, nous partons pour le XVe siècle avec un extrait de « L‘Espérance ou Consolation des Trois Vertus » du poète et écrivain du XVe siècle Alain Chartier.  L’ouvrage est un traité moral et  politique, inspiré de la Consolation de Philosophie du philosophe latin Boèce (480-524), à ceci près que les vertus mises en avant par l’auteur médiéval sont chrétiennes et trempées de Moyen-Age occidental.

L’Espérance ou Consolation des Trois Vertus

Mélange de prose et de vers, L’Espérance ou Consolation des Trois Vertus met en scène un bachelier.  Pris dans les filets de la vieille Mélancolie qui l’a enivré à l’aide d’un breuvage soporifique, le personnage songe et verra ainsi défiler, à son chevet, divers travers personnifiés sous les formes les plus monstrueuses : défiance,  désespérance, indignation. Les calamités et disgrâce du temps seront passées en revue,  pour finalement mettre le personnage face à trois vertus : Foi, Espérance et Charité. Concernant cette dernière, Alain Chartier  n’a pas eu le temps de la traiter puisqu’il a laissé son traité inachevé.

alain-chartier_moyen-Age-tardif_XVe-siecle_poesie-morale-satirique-medievaleEn guise d’extrait, nous partageons ici le prologue de l’ouvrage. La déliquescence du « siècle » reste un thème privilégié dans nombre de poésies morales médiévales et cette poésie n’y déroge pas. Dans une grand envolée lyrique, Chartier encense son amour de la France, tout en faisant le triste constat de la déchéance de cette dernière. Comme d’autres auteurs l’ont fait et le feront avant et après lui, il y déplore aussi la disparition d’une chevalerie des temps passés qui protégeait la France et lui faisait honneur.  L’affaire n’est pas nouvelle et deux siècles après Rutebeuf, un certain moyen-âge littéraire et satirique n’en finira pas de soulever ce thème :

« Valurent miex cil qui ja furent
De seux qu’or sont, et il si durent,
Car ciz siecles est si changiez
Que un leux blans a toz mangiez
Les chevaliers loiaux et preux.
Por ce n’est mais ciz siecles preuz. »

Rutebeuf – Les plaies du monde

Concernant l’exil d’Alain Chartier dont il est question dans cet extrait, il a sans doute débuté autour de 1428 et fait suite à des manoeuvres politiques de Georges Ier de La Trémoille (la Trémouille), grand chambellan et conseiller de Charles VII désireux d’éloigner du roi tous ceux qui pouvaient lui faire de l’ombre (voir Etude sur Alain Chartier de Didier Delaunay, 1876).

poesie-satirique-medievale-Alain-Chartier-exil_Livre-de-l-esperance-Moyen-age-tarfif_XVePour le reste, nous sommes dans la première moitié du XVe siècle  et d’un point de vue linguistique, il s’agit donc de Moyen-Français. Ceux qui ont déjà croisé nos articles sur Michaut Taillevent et son passe-temps ne manqueront pas de trouver d’indéniables similarités stylistiques entre les deux auteurs. Ces dernières expliquent d’ailleurs que leur corpus se soient quelquefois retrouvés mêlés à la défaveur de Michaut Taillevent. Alain Chartier demeure un des auteurs majeurs du XVe siècle et il ne faut donc pas s’étonner que son « aura » ait pu vampiriser le legs de quelques-uns de ses contemporains. Fort heureusement, avec le temps et quelques études sérieuses, les médiévistes ont pu y mettre bon ordre, après coup.

Au dixiesme an de mon dolent exil

« Comment M. Alain Chartier regrette les nobles Chevaliers du temps passé, qui par bonne discipline militaire maintenoient France en liberté, depuis par lascheté mise en souffrance et servitude.

Au dixiesme an de mon dolent exil,
Apres maint dueil et maint mortel peril
Et des dangiers qu’ay jusques cy passez,
Dont j’ai souffert graces à Dieu assez
N’a pas grantment ès chroniques lisoye,
Et és hauts faiz des anciens visoye,
Qui au premier noble France fonderent.
Ceulx en vertus tellement habonderent
Que du pays furent vrais possesseurs,
Et l’ont laissé à leurs bons successeurs,
Qui tant leur moeurs et leurs doctrines creurent
Que leur royaume et leur pouvoir accreurent.
Et se firent honorer et aimer,
Craindre et (re)douter deça et delà mer,
Justes en fais, secourans leurs amis,
Durs aux mauvais, et fiers aux ennemis,
Ardans d’onneur, et hauts entrepreneurs,
Amans vertus, des vices réprimandeurs,
Regnans par droit, heureux et glorieux,
Et contre tous forts et victorieux.

Or ont regné en grant prospérité
Par bien amer justice et équité,
Et ont lessé après mainte victoire
Le pays en paix, en hautesse et en gloire.
Et nos peres, qui devant nous nasquirent,
En ce bon temps durèrent et vesquirent.
Et passerent le cours de leur âge
Seurs* (sûrs) de leur corps, en repos de courage,

Las ! nous chétifs et de male heure nez
Avons esté à naistre destinez I
Quant le hault pris du Royaume dechiet
Et nostre honneur en grief reprouche chiet ;
Qui fut jadis franc, noble et bien heuré,
Or est faict serf, confus et espeuré ;
Et nous fuitifs, exiliez et dispers,
Avons tous maulx esuyez et expers ;
Et tous les jours en douleurs gémissons,
Povres, chassez, à honte vieillissons
Desers, despiz, nuz et desheritez
Pour droit suyvir et amer veritez.
Portans en cueur dur regret et remors
Du temps perdu, pays conquis, amis mors,
En l’avenir que penser ne savons
Fors que petit d’Espérance y avons
Quant nous voyons ainsi France déchoir
Et à nous tous du dechiet* (chute perte) mescheoir* (nous faire du mal).

Je souloye* (j’avais coutume) ma jeunesse aquitter
A Joyeuses escritures dicter :
Or me convient autre ouvrage tisser,
De cueur dolent ne pourroit joye yssir* (sortir),
Paine, paour, pouvreté, perte et doute
Ont assiegé si ma pensée toute
Qu’il n’en saut rien fors que par leur dangier
Ainsi me faut mon sentement changier.
Car en moy n’est Entendement ne sens
D’escrire, fors ainsi comme je sens,
Douleur me fait par ennuy, qui trop dure,
En jeune aage vieillir malgré nature,
Et ne me veult laissier mon droit cours vivre,
Dont par douleur ay commencé ce livre. »

En vous souhaitant une excellente journée.

Frédéric EFFE.
Pour moyenagepassion.com
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Les sept péchés capitaux contre le siècle, une ballade médiévale d’Eustache Deschamps

poesie_ballade_morale_moralite_medievale_Eustache_deschamps_moyen-age_avidite_gloutonnerieSujet : poésie médiévale, littérature médiévale,  ballade médiévale, poésie morale, ballade, moyen-français, poésie satirique, satire, péchés capitaux
Période  : moyen-âge tardif, XIVe siècle
Auteur  : Eustache Deschamps  (1346-1406)
Titre  :   « Onques ne vi si dolereuse gent»
Ouvrage :  Oeuvres complètes d’Eustache Deschamps, Tome I Marquis de Queux Saint-Hilaire, Gaston Raynaud (1893)

Bonjour à tous,

D_lettrine_moyen_age_passionans le courant du Moyen-Age tardif, Eustache Deschamps, officier de cour de petite noblesse, s’entiche de poésie. Il se réclame de Guillaume de Machaut, mais, contrairement à ce dernier, il penchera pour un art poétique, à part entière, entendons, dissocié de toute composition musicale. Du côté des formes, Eustache affectionnera particulièrement la Ballade et en deviendra même l’un des maîtres médiéval. Il en laissera près de mille sur tout sujet et tout propos, même si c’est sans doute dans les formes satiriques qu’il excellera le mieux : ses « Ballades de Moralité ».

Au fil de ses observations et de ses mésaventures, Eustache passera ainsi, son époque au crible, devenant un témoin précieux de la deuxième partie du XIVe siècle, d’autant plus précieux qu’il vivra près de soixante ans ce qui lui laissera le temps de léguer une œuvre volumineuse. Au cours de cette longue vie, il a connu les campagnes dévastées par la guerre de cent ans, la famine et la peste. Il a croisé les miséreux, abusés et pillés : il a vu l’ambition sans borne des princes, leur convoitise, leurs soudains revirements à la faveur de nouvelles alliances. Il a encore assisté à la vie curiale, sa cruauté, ses eustache_deschamps_poesie_satirique_ballade_medievale_peches_capitaux_moyen-age-tardiffaux conseillers et toute la vacuité de ses jeux et il nous a encore laissé des réflexions plus existentielles sur les âges de la vie.

Au risque de simplifier, le socle satirique est double chez Eustache. Une partie  de son sens critique repose sur des valeurs telles que la loyauté, la fidélité, le sens du service et les attentes que cela suppose. L’autre partie est plus clairement trempée de valeurs morales chrétiennes. C’est le cas de la ballade du jour. Eustache nous rapporte un de ses rêves pour mieux dresser une critique des maux de son siècle ; les terres et les temps y sont ravagés par les Sept péchés capitaux. Ces derniers y règnent en maître, selon l’auteur médiéval et de scander : « Oncques ne vi si dolereuse gens », autrement dit « Jamais je ne vis de gens si malheureux« , ou même plutôt « si triste compagnie » comme nous suggère de la traduire Jean-Patrice Boudet et Hélène Millet dans leur ouvrage : Eustache Deschamps en son temps, (éditions de la Sorbonne, 1999)


Une Ballade médiévale
(Allégorie satirique des sept péchés capitaux)

N’a pas longtemps qu’en une région
Vi en dormant dolereuse assemblée :
Ce fut Orgueil chevauchant le lion ;
Ire  (colère) emprès lui qui se fiert (férir, frapper, transpercer) d’une espée ;
Sur un loup siet Envie la dervée* (folle).
Dessus un chien aloit fort murmurant
Avarice ; gouverne la contrée.
Onques ne vi si dolereuse (1) gent.

Car elle avoit or, joyaulx à foison,
Et languissoit d’acquerre entalentée* (d’acquérir davantage).
Paresce après dormoit une saison ;
En l’an n’a pas sa quenoille fillée.
Sur l’asne siet la povre eschevelée,
Qui en touz lieux est toudis* (toujours) indigent.
Glotonnie fut sur un ours posée :
Onques ne vi si dolereuse gent.

Celle mettoit tout à destruction ;
Pour gourmander avoit la Pence enflée.
Luxure estoit moult près de son giron,
Qui chevauchoit une truie eschaufée* (ardente, excitée) ;
Mirant (s’admirant), pignant (se peignant), saloit (bondissait) comme une fée,
Et attraioit maint homme en regardant :
Mais trop puoit* (de puir, puer) sa trace et son alée* (chemin, route).
Onques ne vi si dolereuse gent.

L’Envoy.

Princes, moult est la terre désertée
Où telz vices sont seigneur et régent.
Règnes s’en pert, et âme en est dampnée :
Onques ne vi si dolereuse gent.

(1) malheureux, souffrant.


En vous souhaitant une excellente journée.

Frédéric EFFE
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Conte médiéval : l’exemple XVI du Comte de Lucanor de Don Juan Manuel

armoirie_castille_europe_medievale_espagne_moyen-ageSujet : auteur médiéval, conte moral, Espagne Médiévale, littérature médiévale, réalité nobiliaire, vassalisme, monde féodal, Europe médiévale.
Période  : Moyen-âge central ( XIVe siècle)
Auteur  :   Don Juan Manuel (1282-1348)
Ouvrage : Le comte Lucanor, traduit par Adolphe-Louis de Puibusque (1854)

Bonjour à tous,

E_lettrine_moyen_age_passionn explorant la littérature et les faits de l’Espagne médiévale, nous avions, il y a quelque temps, croisé la route de Don Juan Manuel de Castille et de Léon, prince de Villena et duc de Penafiel et d’Escalona, entre autres titres.

Après avoir été l’un des tuteurs du jeune roi Alphonse XI, les deux hommes avaient fini par s’affronter dans des luttes sans merci, pour finalement se réconcilier, longtemps après, face à l’avancée des armées maures et aux exigences de la Reconquista. Entre temps, une princesse, la fille de Don Juan Manuel avait été retenue en otage, plus de 10 ans, par la couronne, de perfides guet-apens et de sanglants assassinats avaient aussi eu lieu, qui pourraient faire penser à certaines scènes parmi les plus spectaculaires du trône de fer de GRR Martin. Et, au sortir, la vie et la destinée de ce puissant et noble seigneur espagnol du XIVe siècle semblent ne rien avoir à envier aux plus grands romans d’aventure (voir portrait et bio détaillé ici).  Aujourd’hui nous revenons donc à lui, à travers le plus célèbre de ses écrits : Le comte de Lucanor, précis d’éthique et de moral, considéré comme un ouvrage d’importance majeure pour la littérature espagnole médiévale.

Grands vassaux et seigneurs du moyen-âge,
entre tensions et luttes incessantes

Loin de l’image d’éternelles ripailles et de joyeuses agapes, de flamboyants tournois ou encore de grandes chasses en forêt, être noble et seigneur, dans le courant du Moyen-âge central, est loin d’être de tout repos, tout spécialement quand on se tient proche des couronnes et qu’on en est un grand vassal. S’il y eut, bien sûr, des périodes propices au relâchement, la vie des puissants du monde féodal demeure mouvementée. Sans même parler des départs pour la terre sainte qui ont ruiné un nombre non négligeable d’entre eux deco_medieval_espagne_moyen-agequand ils ne les ont pas simplement décimés, leurs devoirs envers leurs suzerains autant que leurs alliances, dans le contexte de guerres de territoire et de pouvoir incessantes, à quoi on ajoutera  encore l’ambition d’autres héritiers ou de provinces voisines, forment bien des raisons pour eux d’avoir à s’inquiéter.

Si on la connait généralement mieux dans le contexte de l’Histoire française, cette réalité est présente sur de nombreuses terres de l’Europe médiévale et la vie de Don Juan Manuel pourrait presque en sembler un archétype, pour ne pas dire une caricature : entre pressions royales sur ses possessions et titres, fausses promesses et complots, mais aussi, réalité des invasions maures sur le territoire espagnol, peu de répit lui fut laissé et on retrouve cet esprit, évoqué plus haut, de tensions fréquentes sinon permanentes, entre de nombreuses lignes du Comte de Lucanor : la confiance n’y est jamais acquise, bien au contraire, c’est presque toujours la réserve et la méfiance qui l’emportent et, dans ce climat « délétère », les trêves semblent toujours chargées de la menace de futurs offensives ou de futurs traîtrises : la défaite, la mort, le déshonneur planent. C’est encore le cas dans cet Exemple XVI qui nous occupe aujourd’hui. Bien qu’arrivé à un certain âge, le noble espagnol se questionne encore sur le bien fondé de se distraire un peu. Comme nous l’apprend Adolphe-Louis de Puibusque, dont nous suivons ici la traduction, Don Juan Manuel puise d’ailleurs son inspiration dans l’Histoire, en invoquant le personnage de Fernán González  (Ferdinand Gonzalez de Castille), puissant comte, seigneur et chevalier espagnol du Xe siècle, entré dans la légende. La réponse que fait ici ce dernier à son parent Nuños Lainez est, en effet, tirée de la Première Chronique générale d’Alphonse X de Castille (Primera crónica general – Estoria de Espana). La boucle est ainsi bouclée.

Au delà du spectre de la défaite ou de la déroute, la morale de ce conte porte son propos un peu plus loin, en opposant au renom, l’oisiveté, désignée ici comme un des plus grands ennemis du prince ou de celui qui veut laisser, à la postérité, quelque souvenir de son nom.


Le Conte Lucanor

Exemple XVI : de la réponse que le comte Fernan Gonzalez fit à Nuño Lainez, son Parent.

L_lettrine_moyen_age_passion_citatione comte Lucanor s’entretenait un jour avec Patronio, son  conseiller : «  Patronio, lui dit-il, vous savez que je ne suis plus très jeune et que j’ai eu beaucoup de soucis et de peines dans ma vie :  Eh bien ! je voudrais maintenant me donner du bon temps, chasser à loisir et me débarrasser enfin de tout le fardeau des affaires ; comme vous ne pouvez me conseiller que pour le mieux, dites-moi, je vous prie, ce que vous pensez de telle résolution. »

— Seigneur comte, répondit Patronio, puisque vous demandez un avis raisonnable, je voudrais qu’il vous plût d’apprendre ce que le comte Fernan Gonzalez dit un jour à Nuño Lainez.

— Volontiers, dit le comte.

Et Patronio poursuivit ainsi :

— Le comte Fernan Gonzalez, qui résidait à Burgos, avait eu fort à faire pour défendre ses domaines ; il arriva un moment de tranquillité qui lui permit de respirer un peu plus librement : alors Nuño Lainez, pensant que tout irait au mieux désormais l’engagea à se donner quelque répit et à ménager ses pauvres gens :  » Certes, lui répliqua le comte, personne ne désire plus que moi se donner congé et liesse, mais j’ai guerre avec les Mores, avec les Léonais, avec les Navarrais, et si je me croise les bras, mes ennemis ne manqueront pas d’en profiter pour fondre sur mes terres ; je sais que s’il me plait de chasser avec de bons faucons et de chevaucher sur de bonnes mules dans tout le pays d’Arlanza, j’en suis bien le maître ; mais il pourra m’arriver ce que dit le proverbe : L’homme mourut et sa renommée avec lui : tandis que si je n’ai le souci que d’échapper à l’oisiveté, de tout faire pour me défendre et de laisser bonne mémoire, on retournera le proverbe en disant : L’homme mourut, mais non sa renommée. Puisqu’un jour nous devons tous trépasser, bons ou mauvais, il ne conviendrait pas, ce me semble, de sacrifier à l’amour du plaisir des devoirs dont l’accomplissement peut faire vivre notre nom en ce monde longtemps après que nous n’y serons plus.

— Et vous, seigneur comte Lucanor, qui savez aussi qu’il vous faudra mourir, occupez-vous toujours de votre réputation, et n’immolez rien à l’amour du repos ou du plaisir, si vous tenez à ce que votre nom vous survive.

Le comte goûta beaucoup ce conseil, il le suivit et s’en trouva bien. Don Juan Manuel, estimant aussi que la leçon était utile à retenir, la fit écrire dans ce livre et composa deux vers qui disent ceci :

« Nos jours sont peu nombreux, qui veut être cité
Ne doit se reposer que dans l’éternité. »*

*On notera que bien que très réussis, les deux vers de fin, issus de la traduction de  A de Puibusque  sont très librement inspirés de l’original.

Version espagnole (ancien) original :

« Si por viçio et por folgura
la buena fama perdemos,
la vida muy poco dura,
denostados fincaremos. »

Si par vice ou par folie
Nous perdons notre renommée
La vie est de courte durée
Nous demeurerons injuriés (déshonorés).

Version espagnole moderne

« Si por descanso y placeres la buena fama perdemos,
al término de la vida deshonrados quedaremos. »

Si par paresse ou pour céder aux plaisirs, nous perdons notre renommée
A la fin de notre vie, nous resterons déshonorés.

En vous souhaitant une excellente journée.
Fred
pour moyenagepassion.com
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Lecture audio, poésie satirique : au coeur du XVe siècle, la ballade de l’Appel de Villon

Francois_villon_poesie_litterature_medievale_ballade_menu_propos_analyseSujet    : poésie médiévale, ballade médiéval, moyen-français, poésie réaliste, poésie satirique
Auteur    :   François Villon (1431-?1463)
Période  : moyen-âge tardif, XVe siècle.
Titre : « La ballade de l’Appel de Villon
ou question au clerc du guichet»
Média : lecture audio

Bonjour à tous,

D_lettrine_moyen_age_passionans la foulée de notre analyse de la ballade de l’Appel de François Villon, en voici une petite lecture audio. Du point de vue de la prononciation, à l’arrivée du XVe siècle et du moyen-français, les « oi » deviennent des « Oué ». Les R sont, semble-t-il, toujours roulés.

NB : vous pourrez trouver dans certaines autres versions de cette poésie : « estoit-il lors temps de moi taire ? » en lieu de « estoit-il lors temps de me taire? » nous avons, quant à nous, choisi cette dernière version, conforme à de nombreuses transcriptions de l’oeuvre de VIllon..

Pour plus de détails sur cette ballade médiévale et quelques clés de vocabulaire, n’hésitez pas à vous reporter à notre article précédent la concernant.

En espérant que cette lecture audio vous agrée.

Une belle journée à tous.

Fred
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