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Lucien Febvre, l’Ecole des Annales et la passion de l’histoire

histoire_historiographie_ecole_annales_lucien_febvre_epistemologie_methodologieSujet : histoire, approche, méthodes, méthodologie historique,  épistémologie, écoles des annales. citations, sources et articles, historiographie. école des Annales
Auteur, Historien : Lucien Febvre (1878-1956)
Ouvrage :
Combats pour l’Histoire, Press Pocket (1952)

Bonjour à tous,

E_lettrine_moyen_age_passionn 1952, l’historien  Lucien Febvre publiait un recueil d’articles et de compte-rendus regroupés sous le titre très explicite de « Combats pour l’Histoire » et qui pouvait prendre, par endroits, des allures de véritable manifeste.

Il s’agissait là d’Histoire au sens large, mais l’oeuvre de cet homme et celle d’un certain nombre d’autres intellectuels pionniers, entre lesquels on comptera, le médiéviste March Bloch et, plus tard, Fernand Braudel eurent dans le courant du XXe siècle, d’importantes conséquences sur la manière d’approcher la discipline historique et, par extension, le moyen-âge et l’histoire médiévale. Leur place ici est donc rien moins que justifiée.

Une histoire totale et problématique

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“Faire de l’histoire, oui. Dans toute la mesure où l’histoire est capable, et seule capable, de nous permettre, dans un monde en état d’instabilité définitive, de vivre avec d’autres réflexes que ceux de la peur, des descentes éperdues dans les caves — et tout l’effort humain réduit à soutenir pour quelques heures, à étayer au-dessus des têtes branlantes, les toits crevés, les plafonds éventrés.”
                                   Lucien Febvre (1878-1956) Combats pour l’Histoire

Fondateur en 1929, avec Mac Bloch de la revue des Annales d’histoire économique et sociale  qui deviendra par la suite Les Annales, la dynamique intellectuelle, les travaux et les réflexions des deux historiens et de quelques autres avec eux, donneront naissance à de nombreuses vocations, à ce que l’on a même souvent convenu de nommer une « école » et, sans aucun doute, à une nouvelle manière de lucien_febvre_combats_pour_histoire_ecole_annales_historienfaire de l’Histoire.

Pour en revenir au contenu de l’ouvrage Combats pour l’Histoire, qui, comme on l’a compris, est le résultat d’un  travail engagé plus de vingt ans auparavant, Lucien Febvre effectuait alors une véritable mise à plat de la discipline, y traçait de grandes lignes et tendait aussi des perches interdisciplinaires vers les autres sciences humaines montantes, entre autre la psychologie, la sociologie de Durkheim,  l’anthropologie de Frazer ou les écrits de Marcel Mauss.  Concernant les bases de sa réflexion épistémologique, il se situait encore dans la remise en question des préceptes d’une réalité mécanique et matérialiste que les sciences de la nature opéraient alors : la physique quantique,  mais aussi la microbiologie, ouvraient  déjà, devant elles, de nouveaux territoires inconnus et la compréhension de l’univers qui avait semblé si proche pour les jeunes sciences de la nature devenait soudainement glissante. Face à cela et sans attendre, chaque scientifique se devait de remettre cette complexité en perspective et l’historien ne pouvait pas non plus, selon l’auteur, en faire l’économie. Sans d’ailleurs qu’il y soit pour grand chose, ce questionnement épistémologique a également touché, dans le courant du XXe siècle, l’anthropologie et l’ethnologie, en leur posant de la même façon le problème de leur véritable objectivité scientifique et celui de la neutralité réelle de l’observateur face à son objet de recherche.

Quoiqu’il en soit, pour Lucien Febvre, il était alors question de conduire une Histoire « totale » et « problématique » et de promouvoir une discipline qui entendait se détourner d’une discipline résumée à une succession chronologique, jugée par trop simpliste, d’événements politiques « marquants »  (grands faits, grands hommes, grandes dates et grandes batailles). Il fallait s’attacher à tous les aspects de l’humain dans le temps et repenser, du même coup, la place de l’individu dans l’Histoire, à la lumière des autres sciences humaines, en étirant aussi le cadre des méthodes pour échapper à la seule « tyrannie » du document. On commença alors à se pencher sur une véritable histoire des mentalités dans une tentative de remise en situation de l’homme dans son milieu historique, politique, économique, social et psychologique. De larges champs s’ouvraient devant les historiens des Annales. Le projet était tracé dans ses grandes lignes, quelques ouvrages et travaux venaient déjà l’illustrer; tout restait à explorer et à construire.

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“Quand aucune fin majeure ne sollicite les hommes à la limite de leur horizon, c’est alors que les moyens deviennent des fins pour eux et d’hommes libres, en font des esclaves.”
Lucien Febvre – Combats pour l’Histoire

Un nouveau souffle : « faire de l’Histoire dans un monde en ruine »

Plus d’un bon demi-siècle plus tard, on peut bien sûr se demander, avec Nicolas Righi, (2) si les  Annales donnèrent véritablement lieu à une « école » (terme pourtant consacré) stricto-sensu. Dans un article de 2003, paru dans la revue le Philosophoire, il fait lui-même le constat d’un certain « éclectisme » (ou d’une élasticité) méthodologique et conceptuel qui impose quelques réserves au moment d’y répondre par l’affirmative.  On peut encore vouloir un peu nuancer l’impact de Lucien Febvre sur l’ensemble de la discipline, en faisant le constat (foucaldien?) que des mouvements d’ouverture s’amorçaient déjà, par ailleurs, du côté de l’Histoire économique par exemple, ou ajouter comme constat, que l’histoire politique et événementielle n’est pas morte avec les Annales, loin s’en faut, mais il reste que ces historiens qui s’enflammèrent pour la prise de risque et voulurent embrasser l’inconfort d’une épistémologie vacillante, à la lumière des dernières découvertes scientifiques du XXe siècle, contribuèrent grandement à donner à l’Histoire un nouveau souffle et à la transfigurer pour longtemps.

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“Satisfaite de ses progrès, fière de ses conquêtes, vaniteuse de ses succès matériels, l’Histoire s’endormait dans ses certitudes. Elle s’arrêtait dans sa marche. Elle redisait, répétait, reprenait ; elle ne recréait plus. Et chaque année qui passait donnait à sa voix, un peu plus, le son caverneux d’une voix d’outre-tombe. ”
Lucien Febvre  Combats pour l’Histoire

Plus ouverte, plus vibrante, moins sûre d’elle aussi, sans doute,  elle y gagna en flexibilité et en ouverture et il faut relire les pages de ce Combats pour l’Histoire pour sentir l’enthousiasme qui menait alors Lucien Febvre. Dans un monde dévasté par les guerres où tout était à reconstruire, quel courage fallait-il pour continuer d’opter pour l’Histoire et pour la recherche ? Comment lui trouver du sens ? De quelle force fallait-il encore investir ce « combat » pour qu’il fasse le poids et fasse sens quand tout le reste ou presque semblait avoir été perdu ? L’historien nous en parle aussi avec fougue et on s’imagine sans peine, dans ces amphithéâtres où il faisait lecture de certains de ses compte-rendus, être gagné, à notre tour, par sa flamme. Car ne nous y trompons pas,  il est bien question ici d’une véritable passion pour l’Histoire, doublée d’une volonté farouche de la faire sortir de ses ornières, pour la faire embrasser le monde dans sa complexité  dans un projet qui visait encore à la mettre au service des hommes et de leur propre compréhension d’eux-mêmes. Et, chaque étudiant d’alors pouvait, sans doute, mesurer la justesse de son choix et s’il en doutait encore basculer définitivement, avec Lucien Febvre du côté de l’Histoire, car sous la verve de cet intellectuel à la plume affûtée et cinglante, plus qu’un simple métier ronronnant, être historien devenait une aventure conquérante et épique.

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« Pour faire de l’histoire tournez le dos résolument au passé et vivez d’abord. Mêlez-vous à la vie. A la vie intellectuelle, sans doute, dans toute sa variété. Historiens, soyez géographes. Soyez juristes aussi, et sociologues, et psychologues ; ne fermez pas les yeux au grand mouvement qui, devant vous, transforme, à une allure vertigineuse, les sciences de l’univers physique. Mais vivez aussi, d’une vie pratique. Ne vous contentez pas de regarder du rivage,  paresseusement, ce qui se passe sur la mer en furie.

(…) Entre l’action et la pensée, il n’est pas de cloison. Il n’est pas de barrière. Il faut que l’histoire cesse de vous apparaître comme une nécropole endormie, où passent seules des ombres dépouillées de substance. Il faut que, dans le vieux palais silencieux où elle sommeille, vous pénétriez, tout animés de la lutte, tout couverts de la poussière du combat, du sang coagulé du monstre vaincu — et qu’ouvrant les fenêtres toutes grandes, ranimant les lumières et rappelant le bruit, vous réveilliez de votre vie à vous, de votre vie chaude et jeune, la vie glacée de la Princesse endormie… « 
Lucien Febvre. Combats pour l’Histoire

Polémiques  et querelles
sur fond d’historiographie

Ah ! Qui n’aurait rêvé d’avoir un tel professeur d’Histoire au lycée ?  Combien de nouvelles vocations auraient pu être ainsi suscitées devant tant de passion et une telle qualité d’érudition  ?  Du reste, la verve de ce combattant implacable et passionné pour une nouvelle histoire le conduisit même quelquefois sur des terrains diplomatiques minés sans pour autant lui faire baisser la garde. Entre autres auteurs d’alors Henri Jassemin (chartiste et conservateur aux Archives nationales) en fit quelque peu les frais et, à sa suite, quelques autres collègues qu’il avait pris à témoin déprécièrent, à leur tour, le trop de « verdeur » de Lucien Febvre dans ses propos. Dans un critique d’un ouvrage de Jassemin, « La Chambre des comptes de Paris au XVe siècle », l’historien des Annales terminait en effet ainsi, cristallisant et théâtralisant presque même, le conflit entre histoire érudite et histoire problématique (pour reprendre les termes de Étienne Anheim (3)) :

« (…)Je ne dis pas : cela n’est pas de l’histoire. Ou alors, si l’histoire c’est cela, que la collectivité cesse immédiatement d’encourager, et de soutenir, une activité aussi totalement inutile ! »
L. Febvre,  Comptabilité et chambre des comptes , Annales HES, 26, 1934

Et pour lui faire écho, voici une ligne de la réponse, non moins caustique, publiée par Jassemin :

« (…)Je veux simplement marquer la différence de l’historien dont la vocation essentielle est d’établir des faits et de l’historien dont la vocation essentielle est de vulgariser des idées.  »
H. Jassemin, Rubrique « Correspondance », Annales HES, 26, 1934

On relira, non sans déplaisir, l’article de Etienne Anheim sur la question de cette polémique article dans lequel, au passage, il nous offre, bien au delà de l’anecdote, une belle analyse d’historiographie, mais si l’on peut, aujourd’hui, sourire du tour et du ton  que le conflit avait pris entre les deux auteurs venus d’horizons méthodologiques divers, il demeure bien symptomatique du climat qui pouvait régner alors dans le milieu des historiens et aussi de l’importance que pouvait prendre dans l’esprit de Lucien Febvre ce combat pour une nouvelle histoire.

Pour conclure, et pour rebondir sur la citation d’en-tête de cet article, l’Histoire n’est sans doute pas la seule capable de nous permettre de vivre avec d’autres réflexes que ceux de la descente à la cave et peut-être que les sciences de l’homme au sens large, peuvent également y parvenir, mais on pourra en tout cas lire ou relire valablement ce classique qu’est devenu les combats pour l’Histoire de  Lucien Febvre dans l’histoire de la discipline, autant pour son fond, que pour son style.

En vous souhaitant une belle journée.
Fred

Pour moyenagepassion.com
A la découverte du moyen-âge sous toutes ses formes.


Sources :

Combats pour l’Histoire, Lucien Febvre, chez Press Pocket.
– FEBVRE LUCIEN(1878-1956),  par Paul LEUILLIOT (encyclopédie Universalis)
(2) « L’héritage du fondateur ? L’histoire des mentalités dans l’École des  « Annales » «  , par  Nicolas Righi (Cairn.info)
(3) « L’historiographie est-elle une forme d’histoire intellectuelle ? La controverse de 1934 entre Lucien Febvre et Henri Jassemin »,  par Étienne Anheim  (Cairn.info)
– Autres liens utiles : les annales aujourd’hui  et archives des annales sur Persée

Vérités historiques et conduite de l’Histoire

humilite_citation_medievale_saint_augustin_moyen_age_passion«L’humilité est le fondement de toutes les autres vertus. Ainsi, dans l’âme dans laquelle il n’existe pas cette vertu, il ne peut y avoir d’autres vertus que la simple apparence. »

Saint Augustin d’Hippone, (an 354-430), Théologien, philosophe, mystique chrétien (enluminure ci-contre Saint Augustin, livre de prière de Clément VII, XIVe siècle, Avignon)

Bonjour à tous!

N_lettrine_moyen_age_passionous vous proposons aujourd’hui un petit article sur l’Histoire en tant que science et sur les réserves à garder en tête quand nous parlons de « vérités historiques ». Il n’est, bien sûr, pas question de nier l’état des recherches actuelles, ni de faire table rase de nos visions sur le monde médiéval mais juste d’apporter un petit « bémol » de principe sur ce sujet. Ce sont des choses importantes à garder en tête quand nous parlons de Science en général, et, dans notre cas, d’Histoire médiévale et quand nous tentons d’avoir une vision claire du moyen-âge.

histoire_monde_medievale_epistemologie_moyen-age_passionIl est question donc, ici, de s’interroger sur la manière dont l’Histoire est conduite et se construit comme discipline scientifique, et en deux mots d’effleurer ce que l’on appelle « l’épistémologie ». C’est un mot qui fait un peu peur pour qui ne l’a jamais entendu et qui se destine souvent plus aux chercheurs et aux philosophes qu’aux profanes mais, encore une fois, comme nous parlons beaucoup d’Histoire médiévale sur ce site, il paraît intéressant d’y réserver une petite place pour ce genre de réflexions. Au fond, un peu de distance ne fait jamais de mal pour qui se passionne d’Histoire et de moyen-âge, autant que pour le chercheur qui s’interroge sur sa manière de chercher et qui aspire à la découverte d’une certaine « vérité ».

Aussi agréable que puisse être le refuge des certitudes, je vous propose donc, aujourd’hui, de céder un peu à l’inconfort qu’il y a à penser la complexité; et le fait est que l’Histoire des hommes, de leurs sociétés et des facteurs qui les influencent est un sujet d’étude particulièrement complexe, au présent comme au passé.

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L’Histoire, une science de la reconstruction

A_lettrine_moyen_age_passion l’image de la paléontologie ou de la science préhistorique,  l’Histoire est autant une science de la reconstruction, qu’une science en construction. A tout le moins, c’est ainsi qu’elle devrait être conduite. C’est le lot d’ailleurs de toutes les sciences et la tentation d’arrogance des premiers siècles de ces disciplines, au fond extrêmement jeunes dans l’histoire de l’humanité, doit désormais laisser la place à une saine humilité avec leur arrivée dans l’âge de leur puberté, à défaut d’être encore celui de leur maturité. En d’autres termes, si le physicien quantique face à une particule l’a déjà compris et sait, aujourd’hui, replacer ses recherches, au sein d’un grand mystère qu’il lui faut tenter de percer – en comprenant bien à quel point sa neutralité d’observateur et la limite de ses propres perceptions peuvent être problématiques pour appréhender la complexité à laquelle il fait face- ,  le même devoir s’applique, a fortiori, à l’historien ou au chercheur en sciencesmoyen-age_passion_histoire_monde_medieval humaines face à la complexité des phénomènes qu’il a la prétention d’approcher ou de décrypter.

Concernant la période du moyen-âge, l’historien a, certes, plus de documents et d’éléments à se mettre sous la dent que quelques squelettes d’hominidés ou de bipèdes pris dans l’argile, mais l’exercice reste le même. Par ailleurs, même si les sources demeurent plus nombreuses qu’en paléontologie, les moines et l’église ayant notamment consigné de nombreuses choses par écrit, il reste  tout de même frappant de voir combien le temps a pu emporter de traces dans son cours impétueux. Entre les pointillés de ses découvertes archéologiques, entre les pierres des châteaux ou des églises, entre les sépultures, les documents ou les parchemins retrouvés, l’Histoire doit pourtant bien s’écrire avec les éléments qu’elle a en sa possession et c’est avec les sources fiables et datées en présence qu’il lui faut tenter de moyen-age_passion_histoire_medievale_archeologieretracer des lignes continues entre les faits et les points connus pour refabriquer du sens et tenter de mettre à jour un vision « juste » du monde médiéval. Se faisant, elle doit, bien sûr, rester consciente du fait qu’il lui faut éviter de rechercher, à tout crin, des raccourcis faciles. L’historien sait bien, en effet, que la réalité s’inscrit toujours dans les nuances et que les vérités tranchées sont rares. L’Histoire quelquefois se répète ou, à tout le moins, balbutie et il a aussi appris d’expérience que les visions « simplistes » des premiers découvreurs doivent être souvent revisitées à la lumière d’une complexité qui grandit au fil des nouvelles découvertes.

A_lettrine_moyen_age_passiontoutes ces difficultés, s’ajoute encore le fait que l’affaire se complexifie au fil des avancées des autres sciences qui, inévitablement, viennent mettre leur grain de sel dans l’Histoire et l’oblige à se revisiter : climatologie, datation, analyse ADN et biologie, etc… La reconstruction devient alors multiforme et complexe et il peut s’avérer bien difficile de pondérer les effets des sciences connexes sur cette réalité « passée » que l’on a la prétention d’observer ou de reconstruire. Quel est l’incidence d’un micro-réchauffement climatique de deux degrés sur l’expansion économique d’une période particulière du moyen-âge? Si la question n’était pas encore trop générique, nous serions presque déjà en plein sujet de thèse!

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Histoire du moyen-âge et vérités historiques sur le monde médiéval (Gravure : Sébastien Mamerot, XVe siècle Paris, BNF)

E_lettrine_moyen_age_passiont comme l’Histoire est une science humaine conduite par les hommes à travers des institutions et des académies, dans ce difficile exercice d’hypothèse, de projection et de reconstruction qui lui échoie, il lui faut encore résister à ses propres corporatismes et aux préjugés qu’elle se forge et auxquels parfois elle s’attache. Passer ce genre de cap lui prend quelquefois du temps et il n’est pas rare que dans le débattement, les nouvelles découvertes soient rangées dans les exceptions ou dans les confirmations suivant qu’elles viennent infirmer ou confirmer la vision que l’on s’est déjà faite ou la construction que l’on a échafaudémonde_medieval_fan_moyen_age_passion_histoire d’un certain moment N de l’Histoire. Au fond, dans toutes ces réflexions. Michel Foucault n’est jamais bien loin, avec son archéologie du savoir.

Mais alors, au vue de tout cela, que reste-t’il à découvrir de l’Histoire du moyen-âge pour l’éclairer ou la ré-éclairer d’un jour nouveau? Bien sûr, il est difficile de le savoir mais plus on avance dans les investigations, plus nous affinons notre conception du passé (même si cela reste encore dans les limites et à la lumière de nos idéologies actuelles), et plus il semble qu’il faille nous défier des reconstructions faciles et des vérités à l’emporte-pièce. Au final, il ne nous reste qu’une certitude; ce que l’on tient pour vérité historique est toujours posé sur un socle susceptible de se mouvoir avec le temps. C’est donc toujours dans la perspective de ces possibles remises en cause et dans une nécessaire ouverture d’esprit que se tient aussi la passion pour l’Histoire et pour son incontournable alliée de terrain, l’archéologie.

Humilité et distance, c’est là que se tient la vérité historique, sage et placide, mais toujours consciente de la complexité de l’objet de ses recherches.

Un très belle journée à tous!

Frédéric EFFE
pour moyenagepassion.com

« L’ardente passion, que nul frein ne retient, poursuit ce qu’elle veut et non ce qui convient. » Publiliue Syrus  Ier s. av. J.-C