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Les Grandes Dames de la Guerre de Cent ans (6): Isabelle de France, la Conquérante

Sujet : guerre de cent ans, monde médiéval, pouvoir féminin, nouveautés littéraires, portraits de femmes, chroniques.
Période : XVe siècle, Moyen Âge tardif
Portrait : Isabelle de France (1295-1358)
Auteur : Xavier Leloup
Ouvrage : Les Grandes Dames de la Guerre de Cent Ans, Editions la Ravinière (2022)


Préambule

Bonjour à tous,

n mars 2021, nous engagions avec Xavier Leloup, auteur de la saga historique Les trois pouvoirs, une série intitulée Les Grandes Dames de la Guerre de Cent ans. Dans le cours de cette même année, cette collaboration donna lieu à cinq chroniques sur le pouvoir médiéval au féminin ; leur succès fut alors immédiat auprès de nos lecteurs, mais aussi sur les réseaux sociaux sur lesquels elles furent partagées.

Depuis lors, moins de deux ans se sont écoulés et, pourtant, que de chemin parcouru ! D’auteur de romans historiques, Xavier Leloup est devenu éditeur. Fin 2021, il a ainsi créé La Ravinière, une maison spécialisée dans l’édition d’ouvrages et de fictions historiques avec le Moyen Âge comme période de prédilection. Nous l’avions d’ailleurs reçu en entretien pour qu’il nous parle de cette nouvelle aventure. Quelque temps plus tard, en juin 2022, il nous annonçait la sortie de deux nouveaux ouvrages : la réédition (qui serait bientôt saluée par la presse) d’une célèbre fiction médiévale : le Quentin Duward de Sir Walter Scott. Mais encore une nouveau livre signé de sa main et qui ne pouvait nous faire plus plaisir ; ce dernier ouvrage portait, en effet, le nom du cycle initié, ici-même, sur Les Grandes dames de la Guerre de Cent ans et se proposait d’en prolonger le thème.

Le livre Les grandes Dames de France de Xavier Leloup, 12 portraits de Femmes qui ont marqué l'histoire.

Sans surprise, à quelques mois de son lancement, ce livre sur les femmes de pouvoir qui ont marqué l’histoire du Moyen Âge tardif continue de faire la joie des libraires et des lecteurs de tous bords. Les chroniques dont nous avait originellement gratifié leur auteur, ont été largement remaniées pour faire la place à des portraits encore plus détaillés de nos héroïnes françaises ; sont venues également s’y ajouter de nombreuses autres histoires de femmes qui, chacune à leur manière, ont influencé l’histoire de France pendant ces siècles troublés.

Excellente nouvelle pour tous nos lecteurs. Aujourd’hui, pour renouer avec ce grand cycle et donner l’envie de se plonger dans cet ouvrage à tous ceux qui ne le connaitraient pas encore, nous vous proposons de découvrir le nouveau portrait d’une grande dame de la guerre de cent ans sous la plume de Xavier Leloup : celui d’Isabelle de France (1295-1358) et de son étonnant destin. Sans plus attendre, nous lui cédons donc le pas pour une nouvelle chronique tirée de son livre. Il s’agit même de celle qui ouvre le bal de l’ouvrage.

En vous souhaitant une belle lecture.
Frédéric Effe


Isabelle la Conquérante
une chronique de Xavier Leloup

Prenez une princesse fière et élégante, fille de l’un des plus grands rois capétiens. Puis mariez-la à un roi anglais des plus fantasques ayant un certain penchant pour les garçons. Vous aboutirez alors au fabuleux destin de la reine d’Angleterre Isabelle de France, la « louve », qui réussit à conquérir le royaume de son propre époux.

Enluminure médiévale : Isabelle de France, son armée, et l'exécution de Hugh Despenser
Isabelle de France & son armée avec en arrière plan le châtiment de Hugh Despenser –
Jean de Wavrin, Recueil des croniques d’Engleterre. British Library (Royal MS 15 E IV)

24 novembre 1326. Hereford, à l’ouest de l’Angleterre. Le sire Hugues Despenser, ancien favori du roi Edouard II, se voit lire la liste des griefs qui ont été retenus contre lui : crimes, attentat contre la reine, confiscation de ses biens, complots visant à la faire assassiner, mauvais traitements envers les veuves et les enfants des opposants à sa tyrannie.

Enluminure médiévale : l'exécution publique de Hugh Despenser, amant du roi Edouard II d'Angleterre
Exécution de Hugh Despenser, Ms Français 2643, BnF, Chroniques de Froissart (XVe s)

Les grands barons qui composent ce tribunal d’exception ne tardent pas à rendre leur jugement : c’est la peine de mort. Despenser sera pendu comme un voleur, écartelé comme un traître, décapité comme un rebelle, ses entrailles seront arrachées et brûlées. Mais le condamné devra d’abord parcourir les rues de la ville, nu et couronné d’orties, sous les huées. Puis on l’attache à une claie tirée par des chevaux qui vont le conduire à la place du marché. Là, il est pendu à une grande échelle par un nœud coulant passé autour de son cou. « Et quand il fut ainsi lié », décrit Jean Froissard dans ses Chroniques, « on lui coupa en premier le vit [le pénis] et les couilles comme hérétique et sodomite, ainsi que l’on disait aussi du roi. Et pour avoir fait se quereller le roi et la reine et l’avoir faite chasser. » La tête de Despenser finira clouée sur la tour-porte du pont de Londres. Quant à son corps, il est découpé en quatre quartiers expédiés aux grandes villes.

Un roi sous emprise

La reine d’Angleterre, Isabelle de France, tient sa revanche. Des années qu’elle courbe le dos face aux humiliations, aux avanies, aux exactions du favori de son époux. Aux côtés de son père Despenser l’Aîné, le jeune Hugues a longtemps fait régner la terreur au royaume d’Angleterre. Il était « l’œil droit » d’Edouard II selon l’auteur de La Chronique de Lanercost, ou encore celui qui tournait autour du roi comme le chat autour de sa proie, selon les termes des Flores Historiarum¸ une autre chronique de l’époque. Surtout, le favori n’a jamais entendu partager le roi avec quiconque, pas même avec la reine. Et ce n’est pas le premier. Avant lui, il y eut un certain Pierre Gaveston, jeune Gascon lui aussi « bien-aimé du roi ». Dès avant son mariage avec son épouse française, Edouard II éprouvait pour ce jeune homme une passion exclusive, dévorante, qui l’avait conduit à le faire comte de Cornouailles et lui allouer une rente de 4 000 livres par an. « Nous étions trois dans ce mariage », écrira plus tard Isabelle. Et ce, au plus grand dam de la noblesse d’Angleterre. Gaveston, un homme puissant mais détesté, et à la langue bien pendue, qui par trois fois dut fuir le royaume d’Angleterre avant de finir décapité.

Enluminure médiévale : le roi Edouard II d'Angleterre dans un manuscrit de la Bibliothèque Bodléienne d'Oxford
Edouard II d’Angleterre, MS. Rawl. C. 292, Bodleian Library (XIVe s)

Mais Edouard II est incorrigible. Seulement cinq années s’écoulent, le voilà qui s’entiche d’un nouveau favori. Sauf qu’avec ce Despenser, un nouveau cap est franchi. Non content d’avoir acquis de nombreuses seigneuries, il va se faire une spécialité de l’extorsion de richesses. Impitoyable, il n’hésite pas à utiliser la force pour soutirer de l’argent à de riches héritières ou aux veuves des hommes qu’il a fait exécuter. Tel est le cas d’une certaine Alice de Lacy, menacée d’être brûlée vive si elle ne lui paie pas une amende de 20 000 livres. Or sur tout cela, le roi d’Angleterre ferme les yeux. Pire, Edouard couvre de faveurs aussi bien son favori que son épouse Eléonore, sa propre nièce, sans qu’on puisse déterminer avec certitude s’il entretient des rapports amoureux avec l’un, avec l’autre, ou bien les deux. Mais pour Isabelle, la situation ne fait guère de doute. C’est bien avec Hugues que son époux la trompe.

« Je crois que le mariage est une union entre un homme et une femme, basé par-dessus tout sur une vie commune, mais quelqu’un s’est introduit entre mon mari et moi qui est en train d’essayer de rompre ce lien », déclarera-t-elle de manière solennelle devant son frère, le roi de France Charles IV, une fois réfugiée à Paris. Et la reine d’ajouter, tout entière vêtue de noir et coiffée d’une guimpe de veuve : « Je déclare que je ne reviendrai pas tant que cet intrus ne sera pas chassé, mais, oubliant ma robe de mariée, je ne me vêtirai plus que des robes de veuve et porterai le deuil jusqu’à je sois vengée de ce pharisien ».

Rebelle à son mari, rebelle à son roi

Enluminure médiévale : Isabelle de France rend visite au roi Charles IV à Paris (vers 1325)
Isabelle de France rend visite à son frère Charles IV à Paris (vers 1325) – Chroniques de Sire Jehan Froissart – Ms Français 2643 (XVe s)- BnF dépt des manuscrits

Ces affirmations ont beau être justifiées, elles n’en sont pas moins d’une incroyable audace. Non seulement la reine Isabelle refuse de rejoindre son époux en Angleterre mais qui plus est, elle sous-entend publiquement qu’il la trompe avec une personne de son sexe. C’est là rompre avec toutes les conventions de l’époque et pour ainsi dire, lui déclarer la guerre. Mais on reconnaît bien là la fille de Philippe le Bel, le puissant roi capétien surnommé « le roi de fer ». Des cheveux d’or, grande et bien formée, elle n’a pas seulement hérité sa beauté. Elle a aussi son intelligence, sa détermination, la haute idée de sa propre dignité ; son goût pour la chasse aussi.

Enluminure : Charles IV accueille sa sœur Isabelle de France accompagné de son fils Edouard (1325)
Isabelle & son fils à la cour de Charles IV Chroniques de Froissart, MS Français 2663 – BnF dept des Manuscrits

Si elle a longtemps fait passer en premier ses devoirs de reine, Isabelle de France déclare qu’à compter de ce jour, elle ne comptait plus se soumettre. De batailles perdues contre les Ecossais, en conflits avec les barons, en fuites à travers le pays, le roi d’Angleterre l’a plusieurs fois mise en péril de mort. Un exemple de ce qu’elle a dû subir : alors que les grands du royaume assiégeaient la capitale, Isabelle en fut réduite à accoucher de sa deuxième fille dans une Tour de Londres si délabrée qu’au moment de la délivrance, elle se trouva éclaboussée par la pluie traversant le plafond !

La reine d’Angleterre n’aurait toutefois osé prendre la tête de la rébellion contre son époux si elle n’avait possédé dans son jeu une carte maîtresse. Cette carte maîtresse, c’est le sire Roger Mortimer de Wigmore. Ancien lieutenant du roi en Irlande et l’un de ses plus fidèles barons, la tyrannie des Despenser l’a conduit à devenir à son tour l’un de ses plus farouches opposants. C’est un homme intrépide, épris de fastes et jaloux de son rang. Il est venu se réfugier en France après sa spectaculaire évasion de la Tour de Londres. Isabelle et Roger ont également en commun le goût des récits de chevalerie et des romans arthuriens, si bien qu’à l’image de Lancelot et Guenièvre, ils ne vont pas tarder à devenir amants. « En vérité, très cher frère, il est apparent à nous et à tous qu’elle ne nous aime pas comme elle le devrait envers son seigneur, et la cause qui l’a poussée à dire des mensonges sur notre neveu et à s’éloigner de nous est due, selon mes pensées, à une volonté désordonnée depuis qu’elle garde en sa compagnie ouvertement et notoirement Mortimer, à l’encontre de tous ses devoirs », écrira Edouard II à son cousin de France dans une énième tentative de faire revenir son épouse auprès de lui.

Isabelle chef de guerre

C’est donc aux côtés de ce grand soldat que la reine va entreprendre ce que nul n’avait tenté depuis Guillaume le Conquérant : envahir le royaume d’Angleterre. Or malgré une force militaire composée de seulement 1 500 hommes, elle va réussir. Au fur et à mesure de son avancée en terre anglaise, les ralliements à sa cause se multiplient. Et il ne s’agit pas seulement de ces barons, de ces évêques qui ont en commun la haine des Despenser. C’est en vérité tout le peuple anglais qui se lève pour rallier sa cause. Cambridge, Oxford, Gloucester, Bristol puis enfin Londres, en quelques mois seulement, Isabelle de France se rend maîtresse de toute l’Angleterre.

Enluminure manuscrit : de retour en Angleterre, Isabelle de France et son fils sont attendus par l'armée.
Isabelle & Edouard accoste en Angleterre, Chroniques de Saint-Denis. Français 6465, BnF XVe s.

Le règne d’Edouard II n’y résistera pas. On finira par le retrouver en compagnie de son cher Despenser, errant dans la lande sous une pluie battante, après avoir vainement tenté de s’échapper par la mer. Conservé deux ans en captivité, le roi trouvera la mort au château de Berkeley, dans la nuit du 20 au 21 septembre 1327.

Faut-il pour autant considérer, à l’image du poète Thomas Gray, qu’Isabelle était cette « Louve de France, dont les crocs acharnés déchirent les entrailles de son époux mutilé » ? Ce serait là lui faire injustice. D’abord parce que l’assassinat du roi a sans doute été ordonné par Roger Mortimer sans même qu’elle n’en ait été avertie. Convaincu de ce qu’Edouard constituerait une menace tant qu’il demeurerait en vie et craignant son évasion, son amant a préféré le faire tuer. Ensuite parce qu’en dépit de la triste fin de Despenser, la reine saura fait preuve d’une relative clémence à l’encontre de ses anciens alliés. Comme le souligne l’historienne Sophie Brouquet dans sa biographie d’Isabelle de France (1) : « au total, la répression se borne à six exécutions. Isabelle de France n’a pas fait couler de bain de sang et se montre davantage prête à pardonner que les Despenser … En réalité, très vite, le gouvernement de la reine a offert un grand nombre de pardons. Il y a eu peu d’enfermements et de confiscations, et les biens sont souvent rendus à leurs propriétaires. »

Julie Gayet en Isabelle de France dans la mini-série télévisée Les rois Maudits de 2005 (France 2)

D’une tyrannie à l’autre

Par la suite, Isabelle commettra toutefois plusieurs erreurs politiques.

Enluminure d'Isabelle de France en train d'accoster avec sa nef sur la rive de la rivière Orwell
Chroniques de Froissart MS 2663 (vers 1420), BnF dept des Manuscrits

Elle est si prompte à recouvrer ses biens que son revenu annuel s’élève bientôt à 40 000 livres, soit un tiers des revenus du royaume. De quoi faire des jaloux. Sa politique pacificatrice envers les Ecossais, de même que ses volontés d’accommodements avec la France, vont aussi déplaire aux Grands. Mais surtout, il y a son idylle avec Mortimer. Moins celle-ci est dissimulée, et plus elle fait scandale. Au faîte de leur puissance, les deux amants iront même jusqu’à organiser de grandes festivités autour de la légende arthurienne durant lesquelles Mortimer, costumé en roi Arthur, trônera à la place d’honneur en compagnie d’une Guenièvre qui n’est autre que la reine elle-même.

Mortimer est alors devenu comte de la Marche – titre inédit créé spécialement en son honneur – et un pair du royaume bénéficiant de 8000 livres de rente. A chacun de ses déplacements, une garde armée l’accompagne. « Roi fou » l’appelle son propre fils, « homme gonflé d’orgueil », écrit de son côté l’auteur du Brut, célèbre chronique anglo-normande. Autant dire que pour beaucoup, la tyrannie de Mortimer ne vaut guère mieux que celle des Despenser.

L’ambitieux roi Edouard III n’aura donc guère de mal à trouver des complices pour faire capturer l’impudent. « Beau fils, ayez pitié du gentil Mortimer. Ne le blessez pas ; c’est un preux chevalier. Notre bien-aimé ami, notre cher cousin », l’aurait imploré Isabelle alors que ses partisans s’apprêtaient à mettre la main sur son amant dans un château de Nottingham endormi. Mais la roue de la Fortune avait déjà tourné. Accusé à son tour de haute trahison, Mortimer trouvera la mort sur le gibet.

Enluminure médiévale du siège de Bristol par Isabelle de France et son armée.
Siège de Bristol, Chroniques de Froissart MS 2663 (vers 1420)- BnF dept des Manuscrits

C’est beaucoup de morts, décidément, qui auront jalonné l’existence de cette fille de France. Mais on ne choisit pas son destin, ni encore moins son époque. Mariée à 12 ans à un roi excentrique, Isabelle aura toutefois su traverser les tempêtes avec courage et une rare intelligence politique. Cette femme distinguée avait aussi réussi à faire vivre autour d’elle une cour brillante où le raffinement des parures n’avait d’égal que la parfaite entente entre des sujets séparés par la langue. Comme l’écrit encore Sophie Brouquet, la reine avait « su nouer des liens étroits avec des nobles anglais, tout en conservant auprès d’elle des hommes et des femmes venus de France… Sa cour est à l’image de cette jeune reine fière, intelligente, avide de richesses, aristocratique, pacifique et multiculturelle. »

Ironie du sort, c’est son sens de l’honneur familial qui signera la perte des siens. En 1314, elle dénonce à son père l’adultère de ses belles-sœurs françaises, ce qui aboutira à une crise de régime et l’extinction de la dynastie des Capétiens directs au profit de leurs cousins Valois. Pour qui voudrait en savoir davantage, il se suffit de se replonger dans la saga des Rois Maudits. Puis en 1328, quand les ambassadeurs du roi de France Philippe VI viennent réclamer l’hommage d’Edouard III pour la Gascogne, c’est Isabelle qui refuse et leur jettera avec hauteur : « Mon fils, qui est le fils d’un roi, ne prêtera jamais l’hommage à un fils de comte ». La rupture avec la France est dès lors définitive et Philippe VI confisque la Gascogne. C’est alors une autre histoire qui commence, celle d’un terrible conflit entre France et Angleterre qui durera plus de cent années.


Une chronique de Xavier Leloup. éditeur & auteur de romans historiques dont la trilogie Les Trois pouvoirs.
Découvrir le livre Les Grandes Dames de la Guerre de Cent Ans aux Editions la Ravinière (2022)


Pour découvrir ses autres chroniques du cycle des grandes dames de la Guerre de Cent ans sur moyenagepassion.com :

  1. Yolande d’Aragon, la reine de fer.
  2. Isabelle de Bavière, une reine dans la tourmente
  3. Christine de Pizan, championne des dames
  4. Les illusions perdues de Valentine Visconti, duchesse d’Orléans.
  5. Colette de Corbie, une grande mystique au service de la cause française

Retrouvez également nos entretiens exclusifs avec Xavier Leloup ici :
La Saga médiévale des Trois pouvoirsLa grande aventure de l’éditionLes nouveautés des Editions de la Ravinière


Notes

(1) Sophie Cassagnes-Brouquet Isabelle de France, reine d’Angleterre, éditions Perrin 2020)

NB : sur l’image d’en-tête vous pouvez découvrir, en premier plan, une photo de l’actrice Sophie Marceau qui incarnait Isabelle de France dans le film mythique Braveheart de Mel Gibson (1995). En arrière plan, l’enluminure représente le mariage d’Isabelle de France et Edouard II d’Angleterre telle qu’on peut le découvrir dans les « Anciennes et nouvelles chroniques d’Angleterre » (Old and New Chronicles of England) de Jean de Wavrin. Ce manuscrit médiéval du XVe siècle est actuellement conservé à la British Library sous la référence Royal MS 15 E IV.

Le château de Foix part en campagne: des médiévales effervescentes pour fêter le printemps en Ariège

foix_ville_medievale_festival_festivites_moyen-age_idees_sortiesSujet : agenda, reconstitution, fêtes historiques, médiévales, château-fort, compagnies médiévales,
Période : moyen-âge central, 1362
Evénement : Les médiévales de printemps du château de Foix
Lieu : Château de Foix (Ariège)
Date : le 27 et 28 mai 2017

Bonjour à tous,

C_lettrine_moyen_age_passionomme chaque année, depuis maintenant trois ans, à l’arrivée de la belle saison, le beau château de Foix dans l’Ariège vous convie à ses fêtes médiévales de printemps.

medievales_de_foix_printemps_2017_agenda_medieval_reconstitution_historique_moyen-age_centralL’esprit y est toujours résolument à la reconstitution historique et à l’Histoire vivante, au plus près du moyen-âge central. L’ombre du Lion des Pyrénées Gaston III de Foix-Béarn, plus connu encore sous le nom de Gaston Fébus, grand seigneur et maître des lieux durant presque toute la deuxième moitié du XIVe siècle, planera plus que jamais au dessus des remparts du château durant toute cette fin de semaine.

Au programme : 1362, bataille de Launac, l’aube d’une grande campagne militaire

P_lettrine_moyen_age_passion copiaour cette édition, avec plus de cinquante acteurs et spécialistes, le château se propose, entre autres réjouissances festives, de vous faire découvrir le maniement des armes anciennes, les bases et les principes de la vie en camp militaire d’époque mais aussi de lever pour vous le voile sur les techniques de soin et de chirurgie médiévale.

medievales_printemps_chateau_foix_ariege_agenda_sortie_historique_gaston_febusEn octobre dernier,  vous y étiez transporté en 1391 après la disparition de Gaston Fébus, cette fois-ci, la machine à remonter le temps marquera la date de 1362 pour  vous propulser dans un voyage médiéval jusqu’à une période contemporaine du Lion des Pyrénées. Le célèbre Comte de Foix sera donc bel et bien là et sur son impulsion, ses troupes se prépareront même à partir en campagne pour affronter les Armagnacs. Vous serez rendus aux portes de la bataille de Launac dont Gaston Fébus reviendra triomphant puisqu’il y fera même prisonnier Jean 1er, comte d’Armagnac, mais encore l’allié de ce dernier, le baron de Launac. Il ne relâchera d’ailleurs ses belles prises que contre une rançon sonnante, trébuchante et de taille, qui fera même de lui, un des Seigneurs et prince les plus puissant et fortuné de son temps.

Chevaliers, mercenaires et routiers
tous aux ordres de Gaston Fébus

I_lettrine_moyen_age_passion copial y aura là, sur le parvis du château et autour des remparts, des hommes de tous bords, les fidèles de Gaston Fébus et ses hommes d’armes, mais aussi des routiers et mercenaires engagés pour l’occasion.

Entraînements intensifs, coups d’éclats et tensions au moment de partir au combat, entre ces hommes venus d’horizon divers, tenez-vous prêts à vivre un moment véritablement unique dans agenda_sortie_historique_chateau_foix_fetes_medievales_printemps_2017_1362_gaston_febus_moyen-age_centralune ambiance rien moins qu’effervescente et électrique. Foix tout entier sera sur le pied de guerre jusqu’au coeur de ses vieilles pierres!

Et qui sait, en observant bien et en tendant l’oreille, vous pourrez peut-être y vérifier les mots de Jean Froissart au sujet de Gaston Fébus, grand chef de guerre, comte de Foix, vicomte de Béarn et encore viguier d’Andorre et de sa détermination au moment d’en découdre avec ses ennemis :

«  J’ai vu bien des chevaliers, des rois, des princes. Mais jamais je n’en vis qui fut de si magnifique stature et de si merveilleuse prestance. (…) En toutes choses il était parfait. Il aimait ce qu’il devait aimer, haïssait ce qu’il devait haïr. Il était aimable et accessible à toutes gens et il leur parlait doucement et amoureusement. Mais dans son courroux nul n’avait pardon. »
Jean Froissart – Les Chroniques

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P_lettrine_moyen_age_passion copiaour le reste, détails logistiques et pratiques, mais aussi de très beaux portraits de certains protagonistes qui vous attendent cette fin de semaine au pied des remparts du château de Foix, n’hésitez pas à consulter le Facebook des sites touristiques de l’Ariège qui se chargent de l’organisation de l’événement.

Enfin et pour en terminer, si, par le plus grand des hasards, vous n’étiez pas déjà convaincu de la beauté saisissante de ce site historique d’exception, niché dans les hauteurs vertigineuses de son piton rocheux, voici une vidéo qui achèvera certainement de vous en  persuader

Pour plus d’informations historiques, retrouvez notre article détaillé sur ce haut lieu de l’histoire ariégeoise et languedocienne ici.

Une très belle journée à tous !

Fred
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes

Idées week-end: deux jours de festivités médiévales autour d’un marché de Noël à Estrées-Lès-Crécy

crecy_en_ponthieu_bataille_medievale_blason_heraldique_marche_medieval_noelSujet : événement moyen-âge, compagnies médiévales. idée sorties, marché Noël médiéval, festivités
Evénement : « Manifestation médiévale de Noël»
Lieu : Estrées-Lés-Crécy , Picardie (Hauts de France)
Date : les 10 et 11 décembre 2016

Bonjour à tous,

S_lettrine_moyen_age_passionaison oblige, nous faisons encore une petite note, aujourd’hui, sur une manifestation autour d’un marché de Noël et du moyen-âge qui a aussi l’intérêt de se tenir à Estrées-Lés-Crécy en Picardie, non loin du théâtre d’une bataille qui fit date dans l’Histoire médiévale : la bataille de Crécy, premier grand affrontement de la guerre de cent ans qui vit la déroute des Armées du roi d’Angleterre devant celles de les armées du Roi de France.

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Le programme de la manifestation médiévale d’Estrées-Lés-Crécy

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S_lettrine_moyen_age_passioni l’événement gravite autour d’un marché de Noël où sont attendus plus de cinquante exposants en costume du moyen-âge,  les organisateurs nous ont gratifié d’animations en plus aux couleurs du saltimbanques_fetes_marche_noel_medievale_evenement_picardie_idee_sortie_moyen-agemoyen-âge. Durant ces deux journées, des compagnies seront donc là pour égayer la fête et lui donner un tour médiéval supplémentaire: danse médiévale et de la renaissance avec la Guilde du Lys d’or et les croissants d’or, parade et spectacle déambulatoire avec la Compagnie Trancrede Artois, théâtre de rue avec les Etoiles Bleues, combats de chevaliers avec la Confrérie du Cerbère, cracheurs de feu et autres saltimbanques par la Compagnie de Ur.

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Pour cette 21e édition du marché médiéval de Noël d’Estrées-lès-Crecy, il y aura même, le samedi à 23 heures, du théâtre en nocturne en langue régionale picarde avec la compagnie locale les merlettes. A savoir toutefois, concernant cette dernière activité, le sujet de la pièce présentée n’a pas de relation avec le moyen-âge.

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Pour le programme et plus d’informations, vous pouvez consulter la page Facebook de l’événement ici.

Un mot de la bataille de Crécy

Le roi d’Angleterre alors dit à ses gens : — « Prenons place ici, car je n’irai pas plus avant que je n’aie vu nos ennemis ; et il y a bien raison que je les attende, car je suis sur le vrai héritage de madame ma mère et qui lui fut donné en mariage ; aussi je le  veux défendre et revendiquer contre mon adversaire Philippe de Valois. »
Jean Froissart (1337 -1405) – Les Chroniques

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P_lettrine_moyen_age_passion copiaour dire un mot de la célèbre bataille médiévale de Crécy, elle tint place dans le lieu que l’on appelle aujourd’hui la vallée de Clercs, entre Crécy-en-Ponthieu et Estrées-Lès-Crécy. Les pertes furent immenses pour l’ost de Philippe VI de Valois qui découvrit alors les avantages stratégiques que confère pour le défenseur le choix de son terrain, en l’occurrence un camp retranché sur une légère élévation, autant qu’il pu mesurer les ravages que pouvait faire l’arc long contre la chevalerie, autant que l’infanterie.

bataille_medievale_crecy_histoire_guerre_de_cent_ansLes chiffres avancés ont été longtemps voisins de dix contre un en faveur des français. Ils ont permis de forger une véritable mythe du côté des anglais sur cette bataille de Crécy qui perdure jusqu’à ce jour, mais ils ont été depuis, quelque peu revisités à la baisse, pour être ramenés à un ratio plus raisonnable de 1 contre 2, voir 1 contre 2,5, en défaveur du camp anglais.

Quoiqu’il en soit, le résultat fut cuisant et les pertes terribles. Sur le champ de bataille, on parle de près de 30 000 morts du côté français, dont plus de 1000 nobles et chevaliers. Galvanisé par cette victoire, Edouard III d’Angleterre poursuivra sur sa lancée à la conquête de Calais. Après un long siège, la ville tombera d’ailleurs entre ses mains, pour devenir durant l’ensemble du conflit, une tête de pont stratégique des armées anglaises en France. Elle sera d’ailleurs un des derniers bastions anglais à tomber, à la fin de la guerre de cent ans.

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La bataille de Crécy, enluminure des Chroniques de Froissart (1475) BnF, Manuscrits, Fr. 2643.

Q_lettrine_moyen_age_passionuelques siècles après la bataille de Crécy, l’Historien et écrivain Jules Michelet remettra en perspective ses conséquences dans le contexte du monde médiéval et des valeurs de la chevalerie, en écrivant ces lignes :

jules_michelet_auteur_ecrivain_historien_XIXe_siecle_monde_medieval« La bataille de Crécy n’est pas seulement une bataille, la prise de Calais n’est pas une simple prise de ville; ces deux événements contiennent une grande révolution sociale. La chevalerie tout entière du peuple le plus chevalier avait été exterminée par une petite bande de fantassins. »
(…) A Crécy, toute la chevalerie était là réunie, toute bannière flottait au vent, ces ners blasons, lions, aigles, tours, besans des croisades, tout l’orgueilleux symbolisme des armoiries. En face, sauf trois mille hommes d’armes, c’étaient les va-nu-pieds des communes anglaises, les rudes montagnards de Galles, les porchers de l’Irlande’; races aveugles et sauvages, qui ne savaient ni français, ni anglais, ni chevalerie. »
Jules Michelet – Histoire de France Tome IV

Le style est, bien sûr, à l’image de Michelet. Aussi racialiste que lyrique et emporté, il n’appartient qu’à lui, même si, par certains aspects, il sonne aussi très XIXe siècle. Reste que l’on s’entend, en général, sur le fait que les armées d’Angleterre n’étaient pas faites alors que de professionnels, loin de là, mais de paysans ou petite gens dont la discipline militaire était pourtant irréprochable. Le corps des archers longs anglais qui fit la différence, ici comme à Azincourt, procédait,  bataille_medievale_crecy_histoire_guerre_de_cent_ans_camp_retranche_anglais_edouard_IIIlui aussi,  de la même discipline que ces forces d’infanterie issus des classes populaires.

Face à la chevalerie française, ces mêmes archers, par leur puissance et l’utilisation stratégique qui en sera faite durant les batailles, seront un atout majeur du camp anglais, et ce pendant de longues années. Il faut dire que les systèmes de valeur et la vision de la guerre diffèrent sensiblement d’un camp à l’autre. Du côté de l’approche de la bataille, on a, en effet, souvent relevé la nature très pragmatique des anglais pour lesquels les valeurs du combat au corps à corps ne priment pas sur le résultat à atteindre. Dans ce cadre, la victoire à distance ne représente pas un obstacle, mais un moyen. Cet argument ne peut pourtant tout expliquer et concernant la déroute de Crécy, les notions de conseil militaire et de discipline doivent certainement être prises en compte pour comprendre la mauvaise tournure que prit cette bataille du côté français.

Pour quelques éléments supplémentaires sur Crécy et sur la guerre de cent ans, vous pouvez vous reporter utilement à l’article suivant: vidéo-documentaire: la guerre de 100 ans en 30 m. chrono.

En vous souhaitant une belle journée et un excellent week-end!

Fred.
Pour moyenagepassion.com
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Jean Froissart, l’amour courtois et l’odeur d’une rose

histoire_poesie_medievale_jean_froissart_chroniqueur_du_moyen-age_centralSujet : amour courtois, poésie médiévale, rondeau, auteur médiéval.
Période : moyen-âge central
Auteur : Jean Froissart (1337-1405)
Titre : Mon coeur s’ébat en respirant la rose
Tirée de : les poètes français d’Eugène Crépet (1861)

Bonjour à tous,

E_lettrine_moyen_age_passionn cette belle journée, nous vous présentons un peu d’amour courtois sous la plume de  Jean  Froissart, bien plus connu, il est vrai, comme un des premiers historiens « véritables » du XIVe siècle, à quelques réserves près, que comme un grand versificateur.

Même si la poésie de Froissart du bon chroniqueur de Saint-Louis n’est pas entrée dans l’Histoire autant que ses chroniques, on lui doit tout de même quelques jolies digressions sur le terrain de la rime. Rendons-lui en justice. Nous avions publié, il y a quelque temps déjà, sa ballade sur la marguerite et le retrouvons, aujourd’hui le nez dans une rose,  pour le dire trivialement, avec un rondeau.

Mon coeur s’ébat en respirant la rose
dans le français de Jean Froissart

Mon coer s’esbat en oudourant la rose
Trop mieulz me vault l’une que l’ autre chose.
Mon coer s’esbat en oudourant la rose.

L’ oudour m’est bon , mès dou regart je n’ ose
Juer trop fort, je le vous jur par m’ame;
Mon coer s’esbat en oudourant la rose
Et s’ esjoïst en regardant ma dame.

La traduction  en français moderne
d’Eugène Crépet

Mon cœur  s’ébat en respirant la rose
Et se réjouit en regardant ma dame.
Mieux vaut pour moi l’une que l’autre chose;
Mon cœur  s’ébat en respirant la rose.

L’odeur m’est bonne , mais du regard je n’ose
Jouer trop fort, (je)  vous le jure sur mon âme;
Mon cœur  s’ébat en respirant la rose
Et se réjouit en regardant ma dame.

hommage_phillipe_leotard_leo_ferre_rutebeuf_poete_medieval

Une excellente journée à tous dans la joie!
Fred
L’ardente passion, que nul frein ne retient, poursuit ce qu’elle veut et non ce qui convient. Publilius Syru s   Ier s. av. J.-C