Sujet : roman, aventure, médecine médiévale, alchimie, monde chrétien, science médiévale. Période : Moyen-âge central, XIIIe siècle Auteur : Frédéric EFFE Titre : Frères devant Dieu ou la Tentation… Date de parution : mars 2019
« Philosophie , médecine, religion, croyances et vie médiévale font de ce roman un agréable moment de lecture. Le narrateur est soit omniscient, soit ce sont les personnages tour à tour et c’est ce qui permet d’impliquer le lecteur encore plus dans l’histoire. J’aime beaucoup les romans historiques et celui ci m’a beaucoup plu. »
Sujet : médecine médiévale, philosophie, science médiévale. savan, médecin, biographie, portrait.
Période : moyen-âge central 11e siècle,
Auteur : Avicenne, Ibn Sina, Abou Ali Al Housayin Ibn Abdoullah Ibn Sina (980-1037)
Avicenne : philosophe, médecin, mystique
et savant iranien du XIe siècle
«Marche avec des sandales jusqu’à ce que la sagesse te procure des souliers.»
i l’exercice de la citation est toujours commode en cela qu’il pointe une pensée précise, il emporte souvent avec lui son lot de frustrations et ce, particulièrement, quand leurs auteurs sont des êtres brillants et complexes dont l’héritage a influencé, pour des siècles, des disciplines aussi importantes que la science, la médecine, la philosophie ou encore la mystique. C’est le cas d’Avicenne, de son vrai nom Abou Ali Ibn Abdillah Ibn Sina (980-1037), brillant philosophe, savant et médecin, né aux portes de l’Iran, à Boukhara en Perse (aujourd’hui en Ouzbékistan), autour de l’an mil. Bien des siècles après que cet homme hors du commun ait arpenté notre monde, il est encore considéré comme l’un des plus grands philosophes de l’Islam et son héritage aura pesé fortement sur la médecine orientale comme sur la médecine chrétienne du moyen-âge et même sur la pensée occidentale durant des siècles.
Ibn Sina : un être hors du commun,
éléments de biographie
En vérité, et sans risquer de tomber dans les superlatifs outranciers, nous sommes avec Avicenne en présence d’un véritable génie. Très tôt et dès l’âge de 11 ans, il se passionnera, seul, de sciences naturelles et de médecine. Quelques années après, on le retrouvera, à l’âge de 16 ans, étudiant avec les plus grands médecins. D’aucuns disent même qu’il les dirigeait déjà. Réputé posséder toutes les sciences connues à l’âge de 18 ans, il rédigera à 21 ans son premier traité de philosophie en vingt volumes! Et même si la nécessité de survivre le poussera à occuper d’autres emplois prestigieux dans l’administration, il y excellera aussi. Il brillera notamment dans des fonctions de ministre qui lui vaudront de tomber dans les jeux de pouvoir, attisant les jalousies et s’attirant les foudres de certains de ses contemporains, au risque d’y laisser sa vie et de devoir fuir. Poursuivi, puis gracié, il sera même emprisonné à nouveau, plus tard, par l’émir Sama Ad Dwala pour avoir refusé d’être son ministre. Malgré la charge de ses fonctions et toutes ses vicissitudes, Avicenne continuera pourtant à se passionner sans relâche de science, de médecine, de physique, de métaphysique, de logique et de philosophie, travaillant à ses affaires le jour et à ses passions la nuit.
De fait, ce talentueux savant médecin iranien du moyen-âge laissera derrière lui une œuvre qui, si elle ne nous est pas parvenue entière, demeurera encyclopédique; on dit d’ailleurs de lui qu’il écrivait en tout lieu et sans relâche, et qu’il était aussi capable de citer parfaitement Aristote dans le texte sans autre support que sa mémoire. On lui prête plus de 150 ouvrages en arabe et plus d’une vingtaine en persan; il traduira également Gallien ou Hippocrate, étant, comme de nombreux savants orientaux de son temps, influencé par la pensée des philosophes grecs et leurs textes.
Influence d’Avicenne
sur le monde occidental médiéval et chrétien
Au douzième siècle, l’occident médiéval, alors en pleine croisade, ramènera de l’Orient, les précieux ouvrages d’Avicenne et l’on commencera à les traduire, notamment à Tolède. Par le biais de ses écrits et dans la mouvance d’autres savants arabes, le moyen-âge chrétien et universitaire découvrira alors Aristote à travers les commentaires qu’en fait Ibn Sina et son désir de suivre les préceptes du grand philosophe grec, qu’il considère comme son premier maître, pour les appliquer de manière concrète à ses propres problématiques et à sa discipline médicale. Avicenne léguera alors, à la philosophie autant qu’à la médecine occidentale du XIIe siècle, deux de ses ouvrages maîtres, le Canon de la médecine, une encyclopédie médicale en cinq volumes comprenant pas moins d’un million de mots et Le livre de la guérison de l’âme, un traité de philosophie, de logique et de métaphysique.
Du point de vue philosophique, la distinction qu’il fera de l’essence de l’être et de l’existence influenceront entre autre, le célèbre Thomas d’Aquin (gravure ci-contre) et jetteront les bases de la philosophie scolastique néo-aristotélicienne du Moyen Âge chrétien. Son « canon de la médecine » ou « canon d’Avicenne », traduit dès le XIIe siècle sous le titre « canon Medicinae » par Gérard de Crémone (grand érudit arabophone et traducteur italien), continuera de faire référence dans l’occident chrétien comme en terre musulmane, et ce jusqu’au XVIIe siècle.
Les références de cette encyclopédie ne se limitent pas à la posologie mais outre l’attention toute particulière qu’Avicenne accorde au diagnostic et à l’écoute de ses patients, de leur corps, de leur pouls, comme de leur état émotionnel dans son approche médicale, l’ouvrage détaille par le menu une liste impressionnante de maladies allant jusqu’à la psychiatrie : méningite, cataracte, ulcère à l’estomac, affections cutanées, paralysies faciales, tuberculose, diabète et obésité, etc… Pour ceux qui sont convaincus que la médecine était totalement aveugle jusqu’au siècle dernier, bien avant Molière et ses médecins pétris d’ignorance, Avicenne mettait à jour et partageait des centaines de découvertes dans ce domaine et ce dès le XIe siècle. Prônant encore une médecine préventive, insistant aussi sur l’importance de l’hygiène autant que de l’entourage du patient dans le processus de rémission, il listera encore dans son « canon » plus de 800 médicaments et démontrera dans tout l’ouvrage d’un grand travail de formalisation, déployant de louables efforts pour ramener la médecine à une véritable science du concret qui obéit à des lois et doit s’opérer dans un cadre rationnel. (photo ci-dessus et ci-contre enluminures du Canon Medicinae)
Avicenne dans les universités médiévales
De fait, les universités prestigieuses de médecine de Montpellier, Toulouse et Louvain du moyen-âge ne s’y tromperont pas et feront du canon d’Avicenne, pendant de longs siècles, leur bible de médecine et il faudra attendre la renaissance pour que l’influence de l’ouvrage commencera à diminuer de manière sensible. Les bases de l’Anatomie d’Avicenne seront d’abord rejetées par Léonard de Vinci, tandis que Paracelsus, de son côté, brûlera l’ouvrage, de manière symbolique et théâtrale, dans la cour de l’université de Bâle après l’avoir copieusement critiqué.
Dans le courant de ce même XVIIe siècle , la découverte de la circulation sanguine par Harvey achèvera de signer la fin du canon comme œuvre de référence en matière médicale, en remettant notamment en cause les préceptes de la « théorie des humeurs ». A titre anecdotique, on trouvera pourtant encore à Bruxelles, jusqu’au début du XXe siècle, un cours sur la médecine d’Avicenne même si l’on convient que les progrès de la science occidentale, à compter de la renaissance, lui auront définitivement fait perdre les belles lettres de noblesse qu’il aura su tenir dans la médecine occidentale pendant plus de cinq siècles.
Pour finir, nous vous laissons sur une belle citation de cet étonnant médecin et savant du moyen-âge, emporté à l’âge de cinquante sept ans par une crise intestinale qu’il ne parvint pas à soigner :
« Quand je grandis, cité ne fut à ma mesure ; quand mon prix s’éleva, je manquai d’acheteurs. » Avicenne
Une excellente journée et même une bonne santé, c’est de circonstance!