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Un conte médiéval « moderne » par des troubadours catalans

Sujet : troubadour et trouvère, conte médiéval
Type de musique : folk médiévale, folk catalan
Groupe : Esquirols (les écureuils)
Auteur de la chanson : Joan Vilamala
Période :  moyen-âge imaginaire, monde féodal
Tiré de : album « Fent Cami » sorti en  1975

Le conte médiéval folk d’Esquirols 

Nous continuons aujourd’hui notre ballade dans le moyen-âge rêvé ou imaginaire avec une pièce de musique et un conte évocateurs du monde médiéval mais plus moderne que véritablement anciens.

Les langues des troubadours du moyen-âge

O_lettrine_moyen_age_passionn peut difficilement éviter les langues provençales  ou encore le vieux français quand on s’intéresse de près aux auteurs, poètes, trouvères ou troubadours du moyen-âge. Or, dans le berceau de nos langues latines, il en est une encore bien vivante qui court de l’Espagne au Sud de la France et qui est le Catalan.

La Catalogne au Moyen-âge, Anton van den Wyngaerde 1563

Attachée autant à la défense de sa langue qu’à celle de sa propre culture, la Catalogne se passionne beaucoup de moyen-âge et d’Histoire et à travers ces thèmes de sa propre histoire et ses propres racins. L’avocat et écrivain Ildefonso Falcones, à qui l’on doit un certain nombre de beaux romans historiques ayant pour théâtre la Catalogne et, notamment, la cathédrale de la mer, est bien loin, en effet, d’être le seul à se passionner de ces questions et nombre d’amis troubadour_trouvere_monde_medieval_moyen_age_feodal_enluminurecatalans pourraient vous surprendre tant ils sont intarissables sur ces sujets. Pour toutes ses raisons, c’est un plaisir pour nous de vous faire partager, aujourd’hui, ce « conte médiéval » catalan, sur une musique et un texte moderne aux accents anciens et qui nous vient d’un groupe catalan mythique des années soixante-dix. Ils s’appellent « Esquirols » (les « écureuils ») et pour vous faire apprécier pleinement cette belle chanson, nous nous sommes fendu d’en traduire et d’en adapter les paroles en français.

conte_medieval_catalan_moyen-age_passion_vilains_seigneur
Moyen-âge et monde féodal : serfs moissonant le blé dans leur champ


Traduction libre  du  « conte médiéval »


Je vous propose, ici, une traduction « libre » de ce conte, en ce sens que j’ai revu quelques tournures pour la rime et pour l’adapter, autant qu’il était possible de letroubadour_menestrel_moyen-age_conte_medieval_esquirols faire, sans le dénaturer.  Peut-être vous plaira-t-il de vous y essayer, à l’occasion d’une veillée entre amis  ?

L’histoire se passe donc durant le moyen-âge féodal et nous parle d’un seigneur et baron abusif, mauvais et cupide, dont le peuple finira par se défaire à l’aide d’un troubadour. Le petit ménestrel itinérant leur donnera, en effet, avec une simple chanson, la force de se soulever.


Temps era temps hi havia
en un poblet medieval
un baró de mala jeia
que a tothom volia mal

Il était, il y avait une fois
dans une ville médiévale
un baron méchant et mauvais
Qui à  tous voulait du mal

Amb carrossa d’or i plata
passetjava tot superb
pel seu terme que moria
d’esquifit i famolenc

En  carrosse d’or et d’argent
Il passait tout fier de lui
sur ses terres qui mouraient
de faim et de rachitisme

Xics i grans mig morts de gana
li sortien al seu pas
demanant-li amb ulls plorosos
que tingués d’ells pietat

Jeunes et Vieux moitié mort de faim
sortaient tous sur son chemin
l’implorant les yeux embués
qu’il les prenne en  pitié

Però ell somreia, i burleta
els cridava amb veu de tro:
« A pencar males abelles,
necessito molt més or »

Mais lui souriait et se moquait
Leur criant d’une voix de tonnerre
« Au travail, mauvaises abeilles
J’ai besoin de bien plus d’or »

Els diumenges a la tarda
organitzava un gran joc.
« Villageois venez à la fête,
Vilatans vinga a la festa,
a la festa de la mort »

Les dimanches après-midi
Il organisait un grand jeu
« Villageois, venez à la fête,
A la fête de la mort »

« Vull setze joves per banda
amb espases i garrots
a fer d’escacs a la plaça
i que guanyin els més forts »

Je veux seize jeunes en bandes
avec épée et bâtons
croisant le fer sur la place
et que gagne le plus fort!

Xics i grans mig morts de pena
li sortien al seu pas
demanant-li amb ulls plorosos
que tingués d’ells pietat

Jeunes  et Vieux moitié mort de peine
Sortaient tous sur son passage
L’implorant les yeux mouillés
Qu’il les prenne en pitié

Però ell somreia, i burleta
els cridava amb veu de tro:
« A jogar batua l’olla,
que a mi m’agrada aquest joc »

Mais lui souriait et se moquait
Criant d’une voix de tonnerre
« Tous au jeu, Diables de vous,
A moi ce jeu plait beaucoup »

Un juglar passà pel poble
avançada la tardor
que amb senzilla veu cantava
i així deia la cançó:

Au village vint un menestrel
Tandis qu’avançait l’automne
qui d’une voix simple chantait
Et ainsi son chant disait

« Ai! del poble, ai! de la vila
que té un lladre per senyor
si vol pau que sigui justa
l’haurà de guanyar amb suor »

Hélas, gens  du    peuple! Hélas gens de la ville
Qui avez un voleur pour seigneur
si vous voulez paix et justice,
les devrez gagner par la sueur

Xics i grans tots l’escoltaven
li donàven la raó
els neixia l’esperança
van anar a trobar el baró

Jeunes et vieux  l’écoutèrent
Et raison il lui donnèrent
Une  espérance était née
Et baron s’en furent trouver

Però ell somreia, i burleta
els cridava amb veu de tro:
« Us faré tallar una orella
si escolteu el trobador »

Mais lui souriait et se moquait
Criant d’une voix de tonnerre
« Je ferais couper l’oreille
de qui écoute ce trouvère »

Els vilatans es negaren
a pagar més els tributs,
a palau armats anaren
i parlaren sense embuts:

Les villageois refusèrent
de payer plus de tributs,
Au palais venus armés,
Ils parlèrent sans retenue

« No et volem per baró nostre,
no et volem ves-te’n d’aquí
que si et quedes ai! de tu,
a la forca has de morir »

Ne te voulons pas pour Baron, 
pars d’ici, ne te voulons plus,
car si tu restes, Hélas!
tu devras mourir pendu

Xics i grans tots a la una
li cantaven la cançó,
« Ai! del poble, ai! de la vila
que té un lladre per senyor »

Jeunes et vieux tous ensemble
entonnèrent la chanson
Hélas, du peuple, Hélas de la ville
qui avez  un voleur pour seigneur

I ell callava, i de ràbia,
se li corsecava el cor
mentre el poble repetia
la cançó del trobador:

Et lui  se tut, et de rage
son cœur se consuma
tandis que tous entonnaient
la chanson du troubadour

« Ai! del poble, ai! de la vila
que té un lladre per senyor
si vol pau que sigui justa
l’haurà de guanyar amb suor »

Hélas du peuple! Hélas de la ville!
Qui avez un voleur pour seigneur
Pour avoir paix et justice,
les devrez gagner par la  sueur.


Une très belle journée à tous!

Frédéric EFFE
Pour moyenagepassion.com

« L’ardente passion, que nul frein ne retient, poursuit ce qu’elle veut et non ce qui convient. » Publiliue Syrus  Ier s. av. J.-C

Chanson et poésie médievale : « la complainte du prisonnier » de Richard Coeur de Lion

Sujet : poésie médiévale, musique médiévale, chanson, trouvère, troubadour, complainte.
Titre : la complainte du prisonnier ou  Ja nuns hons pris
Auteur : le roi Richard Coeur de Lyon.
Langue originale : provençale
Genre musical : rotruenge*
Epoque : moyen-âge central , fin du XIIe siècle (1193-1194?)
Interprète-compositeur dans la vidéo : Owain Phyfe

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oici une pièce et un texte qui nous viennent tout droit du monde médiéval et du XIIe siècle. On dit, en effet, de cette complainte qu’elle a été composée, en langue provençale, par le célèbre  Roi et Chevalier Richard Coeur de Lion en personne, durant sa captivité en Autriche autour des années 1193-1194. Elle est interprétée, ici, de fort belle manière et dans sa langue originale, par feu le troubadour moderne Owain Phyfe (1949-2012).

Un peu d’Histoire : une querelle de Rois

Richard Ier, par Merry Joseph Blondel, 1841.
Richard 1er, dit Coeur de Lion, Merry Joseph Blondel, 1841.

Revenant de croisades, Richard Ier d’Angleterre, dit « Coeur de Lion » est capturé par le duc Léopold V de Babenberg, autour de Vienne, en Autriche. En réalité, ce dernier agit pour le compte du roi de France Philippe Auguste. vieil « ami » de Richard, mais devenu au fil du temps son ennemi.  Dans le cas précis, Philippe Auguste fait arrêter Richard Ier au motif que ce dernier l’aurait insulté publiquement durant une croisade. Les deux souverains avaient, en effet, « pris la croix », ensemble, pour la troisième croisade,  lancée par le pape Grégoire VIII dans l’intention de reprendre Jérusalem et la terre sainte à Saladin, et pour laquelle l’empereur germanique Frédéric Barberousse avait déjà embarqué.

La querelle de Richard Coeur de Lion et Philippe Auguste, enluminure du XIVe siècle (bnF)
La querelle de Richard Coeur de Lion et Philippe Auguste, enluminure du XIVe siècle (bnF)

C’est durant cet emprisonnement que Richard Coeur de Lion va composer ce poème et cette complainte du prisonnier dont nous vous livrons ci-dessous la traduction/interprétation de la langue originale vers le français moderne.

Traduction, adaptation des paroles de la complainte du prisonnier de Richard Ier

Ja nus hons pris ne dira sa raison
Adroitement, se dolantement non;
Mais par effort puet il faire chançon.
Mout ai amis, mais povre sont li don;
Honte i avront se por ma reançon
Sui ça deus yvers pris.

Jamais nul homme pris ne dira sa pensée
De manière juste et sans fausse douleur ;
Mais il peut faire l’effort d’une chanson ;
J’ai beaucoup d’amis, mais pauvres sont leurs dons.
La honte sera sur eux si, faute de rançon,
Je reste deux hivers prisonnier.

Ce sevent bien mi home et mi baron
Ynglois, Normant, Poitevin et Gascon
Que je n’ai nul si povre compaignon
Que je lessaisse por avoir en prison;
Je nou di mie por nule retraçon,
Mais encor sui [je] pris.

Ils le savent bien, mes hommes et mes barons,
Anglais, Normands, Poitevins et Gascons :
Que jamais je n’eu si pauvre compagnon
Pour le laisser, faute d’argent, en prison.
Je ne le dis pas pour leur en faire reproche
Mais je suis encore prisonnier.

Or sai je bien de voir certeinnement
Que morz ne pris n’a ami ne parent,
Quant on me faut por or ne por argent.
Mout m’est de moi, mes plus m’est de ma gent,
Qu’aprés ma mort avront reprochement
Se longuement sui pris.

Maintenant,  je sais pour vrai et certain
Que morts ou prisonniers n’ont amis ni parents,
Quand ils me laissent ici pour or ou pour argent
C’est bien mal pour moi, mais pire pour mes gens,
Qui jusqu’après ma mort en auront le reproche,
S’ils me laissent  ici prisonnier

N’est pas mervoille se j’ai le cuer dolant,
Quant mes sires met ma terre en torment.
S’il li membrast de nostre soirement
Quo nos feïsmes andui communement,
Je sai de voir que ja trop longuement
Ne seroie ça pris.

Je ne m’étonne plus si j’ai le coeur souffrant
Car mon seigneur* met ma terre en tourment
Il ne se souvient plus de notre serment
Que nous fîmes ensemble au Saint,
Mais je sais bien en vérité que guère longtemps
Je ne serai, en ces lieux, prisonnier

(* Richard fait référence ici au roi Philippe Auguste)

Ce sevent bien Angevin et torain,
Cil bacheler qui or sont riche et sain
Qu’encombrez sui loing d’aus en autrui main.
Forment m’amoient, mais or ne m’aimment grain
De beles armes sont ores vuit li plain
Por tant que je suis pris.

Ils savent bien Angevins et Tourangeaux,
Ces jeunes gens désormais riches et forts :
Que suis captif, loin d’eux, aux mains d’autrui.
Ils m’aimaient fort alors, ne m’aiment plus du tout.
Les belles armes ont déserté les plaines
Depuis que je suis prisonnier.

Mes compaignons que j’amoie et que j’ain
Ces de Cahen et ces de Percherain
Di lor, chançon, qu’il ne sunt pas certain,
C’onques vers aus ne oi faus cuer ne vain;
S’il me guerroient, il feront que vilain
Tant con je serai pris.

Mes compagnons que j’aimais et que j’aime,
Ceux de Caen et ceux du Perche,
Conte pour moi, chanson, qu’ils ne sont pas fidèles
Quand jamais envers eux, mon coeur ne fut faux ou vide.
S’ils guerroient contre moi, ils se portent en vilains
Tant que je serais prisonnier.

Contesse suer, votre pris souverain
Vos saut et gart cil a cui je me clain
Et por cui je sui pris.
Je ne di mie a cele de Chartain,
La mere Looÿs.

Soeur comtesse, votre titre souverain
Vous sauve et vous garde de celui à qui je fais appel
Et qui me tient  prisonnier !
Je ne le dis pas pour celle de Chartres*,
Le mère de Louis.

(* la comtesse de Chartes)

*rotruenge : « genre de poésie lyrique des troubadours et trouvères, caractérisé par un refrain interne, situé dans le corps de la strophe, au milieu ou à la fin » (http://cnrtl.fr/definition/rotruenge)

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Une très belle journée à tous!

Fred
Moyenagepassion.com
A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.

Le Château-fort de Bodiam, témoin de la guerre de cent ans, Episode 2

Second et dernier épisode de notre vidéo-documentaire sur le château de Bodiam au moyen-âge et sur l’architecture médiévale

Sujet : châteaux et forteresses, architecture médiévale. le château anglais de Bodiam et la guerre de cent ans.
Période : 1385-1390, XIVe siècle,  bas moyen-âge.
Média : vidéo documentaire, reconstitution du château et de son intérieur en 3D d’après les sources archéologiques.
Outil : sand box du jeu 3D médieval engineers.

Château Bodiam, merveille de l'architecture médiévale
Château Bodiam, merveille de l’architecture médiévale

Bonjour à tous bonne gens, passionnés de moyen-âge et de monde médiéval ou simplement curieux des choses de notre belle Histoire!

N_lettrine_moyen_age_passionous poursuivons donc aujourd’hui la présentation du château-fort de Bodiam, superbe édifice de la fin du XIVe siècle, inspiré de l’architecture Philippienne et qui se tient en Angleterre, dans l’Est du Sussex, non loin des côtes françaises et de Calais.

Pour mieux comprendre ce château et son domaine, approcher de plus près le contexte historique de la guerre de cent ans, mais aussi l’économie médiévale et féodale, n’hésitez pas à consulter le premier épisode sur le sujet ici :  le Château fort de Bodiam, témoin de la guerre de cent ans, Episode 1.

Guerre de cent ans,
grandes compagnies et grande chevauchée

jean_de_gand_guerre_de_cent_ansDans ce deuxième épisode et cette nouvelle vidéo, nous parlons encore de la guerre de cent ans et des compagnies de routiers,  ces grandes compagnies qui terrorisèrent les campagnes françaises d’alors et auxquelles le chevalier Edward Dalyngrigge, propriétaire et bâtisseur du château de Bodiam, aurait appartenu. Nous touchons également un mot de la « Grande Chevauchée » de Jean de Gand et  la déroute subi par le Duc de Lancastre nous permettra, au passage, d’appréhender la réalité des grandes pandémies du moyen-âge (peste noire et dysenterie) et leur « rôle » jusque dans les batailles. Nous abordons aussi dans cet épisode les débats soulevés par les historiens anglais sur l’efficacité défensive réelle de Bodiam et nous penchons de manière plus précise sur l’architecture du château et ce que l’on peut trouver à l’intérieur de son enceinte.

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Bodiam : splendeur et merveille des châteaux du moyen-âge

L’architecture médiévale  défensive
du château de Bodiam

chateau_bodiam_merveilles_du-monde_medievalDu point de vue de son architecture défensive, le château de Bodiam de 1390 dispose de haut murs, de nombreuses tours, de belles douves, ainsi que d’une barbacane doublée d’un haut corps de garde doté de mâchicoulis et d’assommoirs. Ses nombreuses grilles d’entrée sont aussi comme autant de sas pour freiner tout envahisseur parti à sa conquête. On y trouve encore une poterne avec sachateau_moyen_age__puit_bodiam sortie discrète à l’arrière du château en cas de siège, un puits comme dans toute bonne forteresse qui se respecte, de nombreux pont-levis et finalement, tout ce qui en fait, en apparence au moins, un véritable château-fort apte à résister et défendre son territoire.

Pourtant,  malgré tous ces dispositifs défensifs et comme nous le mentionnions plus haut, de  nombreux débats ont eu cours, auprès des historiens anglais de la période médiévale, pour savoir si ce beau architecture_medievale_assommoirs_chateau_bodiamchâteau aurait été réellement efficace en cas d’invasion des côtes anglaises  par les armées du roi de France. Un certain nombre d’arguments sont, en effet, soulevés sur ces questions que nous détaillons dans cette vidéo.

Tout le confort et le nécessaire
entre quatre murs d’enceinte

chateau_porterie_corps_de_garde_monde_medieval_bodiamComme nous le disions dans notre premier article, nous avons reconstitué ce château sur plans archéologiques. A ce jour, il ne reste, en effet, du Bodiam médiéval que les murs d’enceinte et les tours, et de nombreuses interrogations subsistent encore sur certaines de ses salles. On connaît, de manière certaine, la forme générale et la hauteur qu’avaient ses bâtiments mais l’on n’est pas sûr, pour une bonne partie d’entre eux, de leur affectation ni de leur usage.

Château fort Bodiam Angleterre

GPELe château de Bodiam est aussi un mélange de « classicisme » et de modernité. Inspiré d’une architecture symétrique du XIIe, XIIIe siècle, il dispose de nombreux éléments qui l’inscrivent bien dans son époque et dans la « modernité » du XIVe, avec ses défenses militaires qui anticipent déjà l’arrivée, encore récente alors, de la poudre et de l’artillerie et qui ménagent des trous à canon dans ses murs d’enceinte, avec ces vingt-huit latrines qui se déversent dans l’eau de ses douves ou encore avec ses grandes cheminées et cette impression de confort qu’il donne quand on se plonge dans sa reconstitution.

chateau_bodiam_moyen-age_cheminee_interieurA l’intérieur de ses quatre ailes, on retrouve un ordonnancement qui, même s’il reste partiellement inconnu, semble pourtant se dessiner clairement en divisions sociales, fonctionnelles, militaires ou festives. On y trouvera, notamment, une grande salle de banquet et ses grandes cuisines, une aile seigneuriale nantie d’une chapelle, des logis et cuisines pour les serviteurs, et encore d’autres choses que nous vous proposons de découvrir dans ce vidéo documentaire historique.

L’histoire de Bodiam du XIVe au XXe siècle

Pour revenir un peu sur l’histoire de Bodiam, au delà du moyen-âge qui l’a vu s’ériger, après qu’il fut construit en 1385 par Edward Dalyngrigge le château resta la propriété de sa lignée jusqu’à la mort de ce dernier. En 1470, Sir Thomas Lewknor en hérita, mais son soutienchateau_bodiam_moyen_age_reconstitution_historique_barbacane à la maison Lancastre durant « la guerre des deux roses » lui valut un siège en 1483 dont on ne connaît pas la durée mais à l’issu duquel Bodiam lui fut confisqué. Au seizième siècle, en 1542, quelques rois et passations de pouvoir plus loin, le château revînt finalement à nouveau à la  lignée Lewknor.

chateau_bodiam_moyen_age_reconstitution_historique_cour_interieureA partir de là, Bodiam passera dans les mains de plusieurs générations de la famille Lewknor jusqu’au début du XVIIe siècle et sera ensuite vendu à John Tufton en 1639. Ce dernier s’étant rangé du côté des royalistes durant la  première Révolution anglaise se verra condamné par le parlement anglais à payer une amende, et devra vendre Bodiam pour s’en acquitter. Il vendra le château à un membre de ce même parlement : Nathaniel Powell. C’est autour de cette période que lechateau_bodiam_moyen_age_reconstitution_historique_chapelle_medievale château de Bodiam sera démantelé partielle-ment. Après la première révolution anglaise, on a, en effet, détruit, de manière volontaire, de nombreux châteaux et édifices défensifs de crainte qu’ils ne puissent servir à nouveau aux partisans royalistes. La barbacane, les ponts et ponts levis ainsi que les bâtiments situés à l’intérieur du Château seront ainsi démantelés, ce qui explique, en grande partie, l’état dans lequel il se trouve aujourd’hui.

video_documentaire_moyen-age_bodiamLe château restera dans la famille Powell jusqu’en 1722, date à laquelle il sera vendu à Sir Thomas Webster. Il restera dans la famille de ce dernier pendant plus d’un siècle et deviendra d’ors et déjà populaire, faisant l’objet de visites à la découverte de cette « ruine pittoresque » du XIVe siècle. Il sera à nouveau vendu en 1815 et passera ainsi dans différentes mains dans le courant du XIXe siècle, jusqu’à son acquisition par George Curzon au début du XXe, en 1916. Conscient de la valeur inestimable de ce patrimoine historique, ce dernier déploiera de grands efforts pour restaurer certaines parties du château et faire conduire également une étude archéologique et architecturale sur l’édifice. A sa mort en 1925, le château sera légué à l’institution National Trust (National Trust forchateau_bodiam_moyen_age_reconstitution_historique Places of Historic Interest) et sera déclaré « monument historique classé ». C’est cette institution qui, aujourd’hui encore, prend grand soin de préserver le château médiéval de Bodiam et y organise les visites au public.

Voilà, mais assez parlé et place à la vidéo! Nous espérons que cette ballade dans ce beau château-fort du moyen-âge vous plaira autant qu’il nous a plu de le reconstituer et de le faire revivre pour vous à travers ce documentaire.

Une très belle journée à tous et un grand merci encore de votre présence.

Votre dévoué.
Frédéric E.
Pour Moyenagepassion.com

« L’ardente passion, que nul frein ne retient, poursuit ce qu’elle veut et non ce qui convient. » Publiliue Syrus  Ier s. av. J.-C

L’épitaphe de Villon ou la ballade des pendus de François Villon

françois_villon_poesie_francais_moyen_ageSujet : Ballade, poésie médiévale, poésie satirique, réaliste, prière, frères humains.
Titre : L’Épitaphe de Villon ou  » Ballade des pendus  » (appelé aussi « frères humains »)
Auteur : François Villon (1431-1463)
Période : XVe siècle, moyen-âge tardif
Thème : poète médiéval, troubadour et trouvère du moyen-âge.

S_lettrine_moyen_age_passionur François Villon et sa vie de bohème, de prisonnier et de hors la loi, beaucoup a été dit et écrit,  sur son chemin de misère et d’anticonformiste, ses douleurs du fond de ses geôles, son humour, ses amitiés, et bien sûr sa poésie réaliste ou satirique dans un  moyen-âge finissant qui se prépare déjà à renaître bientôt en siècle « des lumières », mais, au bout du compte et par delà toutes les analyses de textes ou de sens, le plus beau que nous laisse cet auteur magistral,  poète marginal et éclairé, reste et restera toujours à lire ou à écouter.

Cet Epitaphe de Villon ou « ballade des pendus » a été conté, lu ou dit maintes fois, chanté aussi bien sûr par Léo Ferré dans une version très inspirée mélangée de sa propre poésie, mais pour varier un peu cette fois et pour rester totalement fidèle au texte de François Villon qui se suffit à lui-même, nous avons choisi la version d’un troubadour des temps troubadour_poete_moyen_age_villon_monde_medievalmodernes.

Son nom est Mil Marie Mougenot et il est tout à la fois, chanteur, musicien, artiste, joueur de vièle à roue et autres instruments anciens qui nous apportent un peu de ce monde médiéval lointain. Cet artiste troubadour des temps modernes que vous croiserez peut-être, à l’ombre d’un rempart ou d’une tour maîtresse au hasard d’un festival ou d’une fête médiévale, propose aussi dans son répertoire, en dehors des chansons en provenance du moyen-âge, d’autres chants populaires ou encore des chants spirituels. Je vous encourage à le découvrir sur son site web ici.

« L’épitaphe de Villon »
interprété par Mil Marie Mougenot

Sur une musique de sa propre composition, filmé au Château de Crosville sur Douve en Mars 2014.

Les paroles de « Epitaphe de villon »
dans le français original de François Villon

Frères humains, qui après nous vivez,
N’ayez les cueurs contre nous endurciz,
Car, si pitié de nous povres avez,
Dieu en aura plustost de vous merciz.
Vous nous voyez cy attachez, cinq, six:
Quant de la chair, que trop avons nourrie,
Elle est piéça dévorée et pourrie,
Et nous, les os, devenons cendre et poudre.
De notre mal personne ne s’en rie ;
Mais priez Dieu que tous nous vueille absoudre!

Se vous clamons, frères, pas n’en devez
Avoir desdaing, quoyque fusmes occis
Par justice. Toutesfois, vous savez
Que tous hommes n’ont pas bon sens rassis.
Intercédez doncques de Cueur rassis,
Envers le Fils de la Vierge Marie
Que sa grâce ne soit pour nous tarie,
Nous préservant de l’infernalle foudre.
Nous sommes mors, ame ne nous harie,
Mais priez Dieu que tous nous vueille absoudre!

La pluye nous a débuez et lavez,
Et le soleil desséchez et noirciz;
Pies, corbeaux nous ont les yeux cavez,
Et arraché la barbe et les sourcilz.
Jamais nul temps nous ne sommes rassis
Puis ça, puis la, comme le vent varie,
A son plaisir sans cesser nous charrie;
Plus becquetez d’oyseaulx que dez à couldre.
Hommes, icy n’usez de mocquerie ;
Mais priez Dieu que tous nous vueille absoudre!

Prince Jésus, qui sur tous seigneurie
Garde qu’Enfer n’ayt de nous la maistrie:
A lui n’ayons que faire ne que souldre.
Ne soyez donc de notre confrairie;
Mais priez Dieu que tous nous vueille absoudre!

francois_villon_ballade_des_pendus_auteur_médiéval

Une excellente journée à tous dans la bonne humeur et la joie de ne point nous trouver pendus!

Fred
pour moyenagepassion.com