Sujet : poésie médiévale, rondeau Période : moyen-âge central, XIVe siècle
Auteur : Jean Froissart Titre : On doit le temps ainsi prendre qu’il vient.
Bonjour à tous,
ous faisons ici un petit contrepied pour rendre un peu justice à la poésie de Jean Froissart. On s’est en effet souvent accordé à voir en cet auteur médiéval bien plus un excellent chroniqueur, voir historien, qu’un poète, Après la marguerite, voici donc un petit rondeau de lui sur le temps qui passe.
Version originale
en vieux français (très intelligible)
On doit le temps ensi prendre qu’il vient, Toutdis ne poet durer une fortune. Un temps se piert et puis l’autre revient. On doit le temps ensi prendre qu’il vient.
Je me conforte a che qu’il me souvient Que tous les mois avons nouvelle lune. On doit le temps ensi prendre qu’il vient, Toutdis ne poet durer une fortune.
Version adaptée
en français moderne
On doit le temps ainsi prendre qu’il vient, Toujours ne peut durer une fortune. Un temps se part, et puis l’autre revient. On doit le temps ainsi prendre qu’il vient.
Je me conforte à ce qu’il me souvient Que tous les mois avons nouvelle lune. On doit le temps ainsi prendre qu’il vient, Toujours ne peut durer une fortune.
Une excellente journée à tous!
Frédéric EFFE
Pour moyenagepassion.com « A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes »
Sujet : reconstitution d’une rue médiévale, outil de création 3D, monde virtuel, jeu vidéo, Unity3D, Unreal Engine (UDK) Période : moyen-âge central à tardif Média : vidéo, chaîne youtube
Bonjour à tous,
n attendant de vous présenter nos séries de vidéos encore en préparation sur les mottes castrales et autres châteaux-forts, nous vous invitons aujourd’hui à un petit voyage visuel dans le moyen-âge avec une création 3D de taille modeste mais très réussie.
Dans le même registre, nous avions déjà publié ici, il y a quelques temps, une « reconstitution » historique d’un village viking du moyen-âge situé au bord de la mer, mais c’est, cette fois, un petit coin de rue médiévale que nous vous proposons de découvrir. Elle est réalisée par un infographiste de talent qui s’est spécialisé avec sa chaîne youtube dans la création d’environnements ou de paysages virtuels à thème, à l’aide du moteur du software Unity 3D ou de celui de Unreal Engine, ce qui est le cas de cette dernière. La vidéo est accélérée mais le résultat obtenu en quelques heures reste impressionnant : ambiance, lumières, architecture, décoration, saisons, tout y est et il ne manque finalement que les habitants.
Datation de cette rue médiévale
es indices manquent pour dater précisément ce monde mais on peut tout de même se divertir à essayer de le faire. Les maisons à colombages ne sont pas suffisantes pour le déduire puisque cette technique est connue et utilisée depuis des temps reculés (haut moyen-âge) jusqu’à une période avancée (XIXe siècle). Les nombreuses fenêtres sembleraient plutôt indiquer le moyen-âge central à tardif. Elles ne sont, en plus, pas dotées de toile cirée ni même de papier huilé, pas d’avantage que de verre, et les grilles qui les protègent sont en bois. L’indice le plus utile pour approcher une datation reste les encorbellements, ces décrochages et avancées des façades qui permettaient de gagner en surface dans les appartements et habitations des étages supérieurs, mais aussi de protéger les façades des écoulements d’eaux de pluies. Cette technique est, en effet, plutôt datée du XIVe siècle et fut même interdite à partir du début du XVIe siècle. Tout cela semble donc indiquer que ce monde médiéval et cette rue se situent plutôt dans le moyen-âge central à tardif, et très probablement au XIVe ou XVe siècle.
Outils de réalisation :
et
ans la série des outils de création de mondes ou d’environnements virtuels mais également de jeux vidéos, le software Unity 3D permet la réalisation de choses tout à fait honorables et même de grande qualité. De fait, le marché de la 3D et du jeu vidéo ne s’y sont pas trompés et son aspect modulaire autant que sa puissance en font un outil de production utilisé actuellement par de nombreux éditeurs, qu’il s’agisse de modéliser rapidement les principes d’un jeu vidéo et son environnement, ou même, pour certains studios, de finaliser des titres prêts à la vente.
Bien sûr, pour aller plus loin avec Unity que la simple réalisation de décors et développer des applications totalement interactives, il faudra nécessairement passer par le code et la programmation (C#/Javascript) même si l’intégration des scripts est grandement facilitée par la philosophie de l’éditeur et les outils à disposition. Pour réaliser des environnements simples comme celui que nous présentons aujourd’hui. cela n’est, en tout cas, pas utile; il faudra « simplement » compter avec la prise en main de la couche « édition » du software, la bonne nouvelle étant, sur le plan économique, que la société qui produit Unity 3D propose une version totalement gratuite en téléchargement. Cela permet de créer des mondes virtuels avancés sans en être de ces propres deniers. Bien entendu, pour débloquer certaines fonctionnalités comme l’édition sérieuse de jeux vidéo et leur portabilité sur toutes les plateformes, il faudra compter avec des formules d’abonnement ($75 par mois) ou acquérir la licence ($1500).
Le modèle économique d’Unreal vient, de son côté, de passer également sur du gratuit avec royalties au pourcentage (5%) sur la distribution des applications réalisées. Le soft, s’il fonctionne avec la même philosophie avec son Développement Kit semble toutefois trouver sa préférence chez les gros éditeurs qui, s’ils peuvent parfois modéliser rapidement le Jeu sur Unity 3D pour en valider les principes, finissent tout de même souvent par lui préférer Unreal pour la version distribuée officiellement au public.
oté d’un éditeur puissant pour créer des mondes, terrains, matériaux, textures etc, les deux moteurs proposent également un traitement avancé des lumières, gèrent parfaitement l’eau, les particules et les effets atmosphériques ce qui en font des outils particulièrement adaptés à l’heure de réaliser des environnements virtuels. Un autre de leurs avantages est de s’inscrire parfaitement dans le workflow 3D en étant compatible avec la plupart des standards du marché en terme de modélisation d’objets, personnages, etc. On trouve encore pour gagner un temps précieux et si l’on ne connait pas soi-même les arcanes de la modélisation 3D, un nombre important d’infographistes 3D et autres compagnies spécialisées qui fabriquent et vendent des kits additionnels à thème: végétations, architectures, objets divers et variés, etc. Contre deniers sonnants et trébuchants, ce type de kit permet de réaliser des décors ou des mondes thématiques sans avoir à forcément créer tous les objets soi-même. C’est d’ailleurs le cas de l’environnement qui vous est présenté dans cette vidéo puisque les pièces modulaires utilisées pour le réaliser sont issues d’un kit dédié à l’architecture médiévale, proposé par la société Polypixel.
Pour le reste, au niveau du workflow autant que de la portabilité, les plus avancés en termes d’infographie 3D, d’architecture ou de design pourront, bien sûr, valablement importer leurs productions dans Unity: terrains, bâtiments, et autres objets ou personnages 3D réalisés à l’aide de programmes extérieurs à l’application (blender, 3DS Max, etc…).
Pour finir, dans la bataille des deux softs pour gagner les faveurs du marché du Jeu 3D, il semble tout de même que la longueur d’avance d’Unreal n’est pas prête d’être reprise par Unity qui s’adresse à un marché plus intermédiaire et n’a pas, pour l’instant comme son concurrent, les faveurs des plus grands studios d’édition.
Une excellente journée à tous avec tout le bonheur, la santé et la joie qu’il m’est possible de vous souhaiter.
Fred
Pour moyenagepassion.com « A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes »
Sujet : poésie médiévale, poésie satirique, et réaliste, tradition « gollardique », Auteur : François Villon Titre : Ballade et « Oraison », l’âme du bon maistre Jehan Cotard Période : moyen-âge tardif, début renaissance
Bonjour à tous,
oici encore une ballade de François Villon qui nous poursuit de sa belle poésie. Cette fois, nous le retrouvons dans un texte plus « léger » où il ne nous conte pas ses propres souffrances mais nous parle avec humour d’un « supposé » feu maistre Jehan Cotard et de son goût pour la boisson.
Qui était le bon maistre Jehan Cotard ?
Sur la question de qui était ce bon maistre Jehan Cotard, on trouve les traces de deux homonymes portant ce nom là, à Paris, dans une période contemporaine de celle de Villon. Le premier est un procureur en cour d’église mais si c’est bien lui l’homme était encore vivant au moment où Villon lui dédiait ses vers. Etonnant non? Au vue de l’humour de Villon, il se peut très bien qu’il ait rédigé la ballade du vivant de son camarade de beuverie à la manière d’une farce entre amis. L’autre Jean Cotard était, quant à lui, un marchand orfèvre et bourgeois.
En réalité, il demeure difficile en réalité de savoir si l’homme auquel François Villon fait référence ici était l’un des deux homonymes que l’on a retrouvé grâce aux registres de la municipalité de Paris ou un autre que l’Histoire n’a pas retenu, faute de documents existants. *
(Ci-contre, détail d’une scène de Taverne, (à l’évidence arrosée jusqu’au parquet) Manuscrit Valère Maxime, 1470)
Comme Villon semble s’être fait de nombreux amis, à l’occasion de ses études, dont une partie d’entre eux devint plus tard « de grands seigneurs et maîtres », aucune hypothèse ne peut vraiment être écartée sur l’identité de ce maître buveur. On a également avancé, en d’autres endroits, la possibilité d’un troisième Jean Cothard mais avec un H cette fois-ci, qui était inscrit comme doyen de la confrérie Saint Jacques de Paris en 1462 et 1463. Pour être honnête, je ne sais à quel point il faut aller chercher une coquille d’orthographe dans le texte de Villon sur le nom de l’homme. Sauf erreur d’imprimerie, la rigueur de son écriture la rendrait en tout cas surprenante et de fait, à une lettre près, les recherches sur le dit Jehan Cotard pourraient sans doute nous amener assez loin.
Laissons donc le bon maître dont il est question dans cette ballade à son mystère; il reste que Villon nous le décrit comme un boit-sans-soif invétéré ce qui pourrait permettre d’inscrire cette poésie dans la tradition des chansons à boire ou même de la poésie goliardique des XIIe, XIIIe siècles qui encensait, entre autre chose, les plaisirs de la boisson et de la chair, à ceci près que la ballade du bon maistre Jehan Cotard par maistre François Villon n’est pas en latin mais en bon français du XVe siècle.
*Sources : Romaniarevue trimestrielle consacrée à l’étude des langues et des littératures romanes (Volume 2, 1873).
Ballade et Oraison de François Villon
L’âme du bon maistre Jehan Cotard
Pere Noe, qui plantastes la vigne; Vous aussi, Loth, qui bustes au rocher, Par tel party qu’Amour, qui gens engigne, De vos filles si vous feit approcher, Pas ne le dy pour le vous reprocher, Architriclin*, qui bien sceustes cest art, Tous trois vous pry qu’o vous veuillez percher L’ame du bon feu maistre Jehan Cotard!
* Loth : s’enivra dans une caverne et ses filles abusèrent de lui pour concevoir
* Architriclin : Personne responsable de l’ordonnance du festin. allusion à l’Architriclin de l’évangile qui commanda qu’on fit servir le vin en premier aux noces de Cana.
Jadis extraict il fut de vostre ligne, Luy qui beuvoit du meilleur et plus cher; Et ne deust-il avoir vaillant ung pigne,* Certes, sur tous, c’estoit un bon archer; On ne luy sceut pot des mains arracher, Car de bien boire oncques ne fut faitard. Nobles seigneurs, ne souffrez empescher L’ame du bon feu maistre Jehan Cotard!
* Pigne : traduit par peigne dans un ouvrage de 1835. ainsi que dans le glossaire de la langue d’Oil de Alphonse Bos. Pour le sens général de ces deux vers, nous proposons quelque chose comme : « Et même s’il ne possédait pas grand chose
D’entre tous, il n’était pas du genre à lâcher sa prise. »
Comme um viellart qui chancelle et trepign L’ay veu souvent, quand il s’alloit coucher; Et une foys il se feit une bigne,* Bien m’en souvient, a l’estal d’ung boucher. Brief, on n’eust sceu en ce monde chercher Meilleur pion, pour boire tost et tard. Faictes entrer quand vous orrez hucher* L’ame du bon feu maistre Jehan Cotard.
* Bigne: Bosse
*orrez hucher : entendrez frapper à la porte)
ENVOI.
Prince, il n’eust sceu jusqu’a terre cracher; Tousjours crioyt: Haro, la gorge m’ard! Et si ne sceut oncq sa soif estancher, L’ame du bon feu maistre Jehan Cotard.
Aparté Georges Brassens et François Villon
En lisant encore les références à Villon entre les lignes de Brassens, voici un texte assez peu connu du chanteur contemporain du XXe siècle ayant pour titre « la légion d’Honneur ». Il est notoire que Georges Brassens refusa cette légion d’honneur quand on la lui proposa, mais il ne chanta pas cette chanson pourtant de son vivant. On doit à Maxime le Forestier de l’avoir fait connaître, à titre posthume puisque Georges Brassens ne l’enregistra jamais de son vivant. On y trouve quelque vers en référence à ce Jehan Cotard dont Villon nous parle, que je vous livre ici:
« L’âme du bon feu maistre Jehan Cotard
Se réincarnait chez ce vieux fêtard.
Tenter de l’empêcher de boire un pot
C’était ni plus ni moins risquer sa peau.
Un soir d’intempérance, à son insu,
Il éteignit en pissotant dessus
Un simple commencement d’incendie.
On lui flanqua le mérite, pardi !
Depuis que n’est plus vierge son revers,
Il s’interdit de marcher de travers.
Car ça la fout mal d’ se rendre dans les vignes,
Dites du Seigneur, faire des faux pas
Quand on est marqué du fatal insigne.
La Légion d’honneur ça pardonne pas. » Georges Brassens. La légion d’Honneur
Voici l’interprétation de la Légion d’Honneur
de Georges Brassens par Maxime le Forestier
Une très belle journée à tous!
Fred
Pour moyenagepassion.com « A la découverte du moyen-âge sous toutes ses formes »