Sujet : musique médiévale, danse, vièle, rebec, Galice médiévale, Cantiga de Santa Maria, instruments anciens, musiques anciennes, inspirations celtiques. Période : Moyen Âge central, XIIIe siècle Titre : « danses, cantigas & chants de la terre « Auteurs : Anonymes, Alphone X de Castille, Jordi Savall Interprète : Jordi Savall, Pedro Estavan Album : La lira d’Espéria II , Allia Vox ( 2014)
Bonjour à tous,
n 1994-96, Jordi Savall partait sur les traces de la méditerranée médiévale et de ses musiques anciennes. L’album, intitulé La Liria d’Espéria (la lyre d’Hespérie), faisait référence à cette région qui désignait, pour les grecs antiques, les péninsules italiennes et ibériques. Quant au voyage musical, il passait de sonorités espagnoles à des danses italiennes d’époque pour encore faire des incursions du côté andalous et proche-oriental, avec des compositions venues d’Afrique du nord et même encore de la culture juive séfarade.
Accompagné du percussionniste Pedro Estevan, le maître de musiquecatalans’était, ici, doté pour seuls instruments, d’une vièle ténor, d’un rebec et d’un rabab. Un choix de formation audacieux et minimaliste qui allait lui permettre de marier l’essentiel à la pureté dans un album superbe et sans artifice. La critique, comme le public, ne s’y est d’ailleurs pas trompée en réservant un bel accueil à ce premier opus de la Liria d’Esperia.
Danses, cantigas & chants de la terre sous l’archet de Jordi Savall,
La lira d’Esperia II Galicia
Pour le plus grand plaisir des amateurs de musique médiévale et de voyages sonores dans le temps, Jordi Savall allait reprendre, un peu plus tard, le même concept et le même complice pour poursuivre son exploration. Ainsi, en 2014, un deuxième opus intitulé La Lira d’Esperia II allait naître, d’un niveau de qualité égale au premier.
Avec vingt-trois pièces pour près d’un heure quinze d’écoute, comme son titre l’indique, un accent particulier serait mis, dans ce deuxième album, sur les musiques de la Galice médiévale et ancienne, province la plus « celtique » de l’Espagne d’alors, selon les propres mots de Jordi Savall.
Sonorités celtiques et envolées uniques sur fond de Galice médiévale à la main d’Alphonse le sage
Dans cette nouvelle pièce d’orfèvrerie musicale, on reconnaîtra, plus encore que dans le premier opus, l’influence directe et prégnante du règne d’Alphonse le Sage ; aux côtés de pièces anciennes et traditionnelles de Galice, plus de dix compositions sont, en effet, issues des Cantigas de Santa Maria du souverain de Castille. Nous vous avions déjà présenté, ici, la très belle ductia, librement inspirée de la Cantiga de Santa Maria 248, qui ouvrait cet album. Sous le jeu d’archet du musicien catalan et ses sonorités instrumentales si particulières, elle nous entraînait dans une atmosphère toute à fait nouvelle, à des lieux des exécutions classiques habituelles.
Aujourd’hui, c’est une vidéo produite en 2014 par Allia-Vox (la société d’édition de Jordi Savall), que nous partageons avec vous. Elle donne un bel aperçu de la puissance de cette production et, on a, en prime, le plaisir d’y retrouver des extraits d’interviews du talentueux directeur musical.Pour le reste, on trouve toujours ce bel album récent à la vente, sous forme de CD ou même au détail et par fichier, au format MP3 : La Lira d’Esperia II – Galicia.
En vous souhaitant une belle journée.
Fred
Pour moyenagepassion.com A la découverte du Moyen Âge sous toutes ses formes
Sujet : musique médiévale, danse, vièle, rébec, manuscrit ancien, manuscrit de Londres,
manuscrit add 29987 Période : Moyen Âge central à tardif, Titre : Istampitta In Pro Auteur : anonyme Interprète : Jordi Savall Album : La lira d’Espéria (1996), Astree
Bonjour à tous,
n 1994, Jordi Savall enregistrait un bel album instrumental tout entier consacré à la vièle médiévale. Cette production sortit chez Astrée, en 1996. Le titre de l’album, « La lira d’Espéria » renvoie, à la fois, à l’antique instrument à cordes et à l’Hespérie. Durant l’antiquité, les grecs nommaient ainsi les provinces les plus proches de l’ouest de leur territoire et cela désignait la péninsule italienne, mais aussi l’Espagne.
On le sait, le directeur d’orchestre catalan est un grand féru de musiques médiévales (découvrir son autobiographie intellectuelle). mais aussi de leurs apports culturels variées, au sein des territoires de l’Europe du Moyen Âge, comme aux confins du bassin méditerranéen et même au delà.
L’Istampitta « In Pro » du MS par Jordi Savall
Un voyage musical médiéval multiculturel
Premier opus d’une thématique qui connaîtra une suite en 2014, La lira d’Espéria propose ainsi un véritable voyage interculturel au travers de seize pièces du Moyen Âge central.
On passera par des compositions issues du répertoire d’Alphonse X de Castille et ses Cantigas de Santa Maria , avec trois d’entre elles. On aura également le plaisir de retrouver de nombreuses pièces de l’Italie médiévale et notamment des danses dont nous avons déjà parlé ici et dont un bon nombre est tiré du Manuscrit de Londres : trotto, estampitta, ductia, saltarello. A tout cela viendra encore s’ajouter des compositions séfarades de l’Espagne médiévale et même encore des pièces et danses en provenance d’Algérie.
Un son unique pour une formation musicale réduite à l’essentiel
Pour cet album, Jordi Savall a fait le choix d’une formation réduite, en se faisant accompagner uniquement par les percussions de Pedro Estavan. De son côté, on retrouve le directeur d’orchestre catalan aux instruments à cordes (vièle ténor, rebec et rubab). Il ressort de ce parti-pris d’orchestration minimaliste et de ce duo, un son absolument unique. Sous l’archet du maître de musiques anciennes, on redécouvrira même d’un œil nouveau des pièces du répertoire médiéval que l’on connaissait par ailleurs.
L’album La Liria d’Esperia est encore disponible à la vente en ligne au format CD ou même MP3. Pour plus d’informations, merci de consulter le lien suivant : La Lira d’Espéria de Jordi Savall.
Sujet : musique, poésie, chanson médiévale, amour courtois, trouvère, vieux-français, langue d’oil, fine amor. Période : XIIe siècle, XIIIe s, Moyen Âge central Titre:L’amour dont sui espris Auteur : Blondel de Nesle (1155 – 1202) Interprète :Martin Best Mediaeval Ensemble Album : Songs of Chivalry (1983)
Oyez, oyez, bonnes gens,
ujourd’hui, nous vous proposons de nous suivre jusqu’aux abords du XIIe siècle, au temps du Moyen Âge des trouvères et avec l’un des plus célèbres d’entre eux : Blondel de Nesle, noble chevalier croisé, devenu héros de légende et grand compagnon, dit-on aussi, de Richard Cœur de Lion.
Une pièce courtoise dans les règles de l’art
Comme tant d’autres auteurs de son temps, Blondel de Nesle a fait de la courtoisie un de ses cheval de bataille poétique. Avec la chanson du jour, il n’y déroge pas et nous livre la « complainte » d’un fine amant, dans les règles de l’art. Suspendu à la décision de la belle que son cœur a élu, il ne peut qu’espérer : la loyauté dont il a fait preuve, jusque là, sera-t-elle récompensée ? La question restera en suspens à la fin de cette pièce mais, entre-temps, le trouvère nous aura brossé le portrait conventionnel de l’amant idéal, servant, anxieux, souffrant, à la merci d’un acquiescement ou d’un rejet de sa dame.
Sources et manuscrits
On peut retrouver cette chanson du chevalier trouvère dans un certain nombre de manuscrits médiévaux. Dans ces diverses sources, elle lui est, quelquefois, attribuée sous le nom de Blondel de Nesle, de Blondeaus ou encore de Blondiaus.
Sur la photo ci-contre, nous avons choisi de vous présenter la version du Chansonnier Cangé. Conservé au département des manuscrits de la BnF sous la référence Français 846. ce manuscrit du XIIIe siècle, riche de 351 pièces d’époque, a l’avantage de nous fournir une notation musicale de cette composition (pour le consulter en ligne c’est ici). Il n’est d’ailleurs pas le seul dans ce cas. Cette pièce a, en effet, fait l’objet de plusieurs contrefactum, dont l’un d’eux, attribué à Gautier de Coinci, peut être retrouvé dans le Manuscrit de l’Arsenal 3517.
Transcription, interprétation, traduction
Pour la retranscription de cette chanson médiévale en calligraphie moderne, nous nous sommes appuyés sur l’ouvrage de Prosper Tarbé daté de 1862 : Les Œuvres de Blondel de Néele (collection des poètes de Champagne antérieurs au XVIe siècle). Enfin, pour mieux la découvrir, nous vous proposons l’interprétation qu’en fit l’ensemble Martin Best dans le courant des années 80 et nous terminerons, en vous gratifiant d’une traduction maison de l’oïl de Blondel au français moderne.
L’amour dont sui espris , Blondel de Nesle par Martin Best
Martin Best et son album Songs of Chivalry.
Nous avons déjà eu l’occasion de vous présenter la formation Martin Best, ainsi que son excellent album « chansons de chevalerie ». Nous n’allons donc pas y revenir dans le détail et vous pouvez vous reporter à l’article suivant pour en savoir plus : Martin Best Mediaeval Ensemble.
Rappelons simplement que, des années 70 aux 90, l’ensemble médiéval anglais a légué un nombre considérable d’interprétations et d’enregistrements sur la période du Moyen Âge central. Sorti en 1983, Songs of Chivalry n’en est qu’un échantillon mais il présente, tout de même, 19 pièces empruntées au répertoire des trouvères et des troubadours, interprétées de main de maître. Vous pouvez retrouver cet album à la vente en ligne au format CD ou digitalisé Mp3 : plus d’informations sur l’album Songs of chivalry.
L’amour dont sui espris, Blonde de Nesle
Du vieux français au français moderne
Notes sur la traduction : c’est une première approche qui n’a que le mérite d’un premier jet. Dans l’optique d’une publication, elle devrait, bien sûr, faire l’objet de quelques revisites pour être précisée. N’hésitez pas à commenter si vous avez quelques lumières à apporter.
L’amour dont sui espris Me force de chanter, Si fait com hom sorpris Qui ne puet amender. Petit i ai conquis, Mès bien me puis vanter : Que j’ai pièça appris A loyaument amer. A li sont mi penser Et seront a tous dis ; Ja nès en quier oster.
L’amour dont je suis épris Me commande de chanter, Aussi, je le fais comme celui, pris au dépourvu, Qui ne peut s’y soustraire. J’y ai peu gagné Mais je puis bien me vanter Que j’ai appris depuis longtemps À aimer loyalement. À elle vont mes pensées Et y seront toujours ; Jamais je ne voudrais les en ôter.
Remembrance du vis Frés et vermeil, et cler, A mon cuer en tel mis Que ne l’en puis tourner ; Et se j’ai les maus quis, J’es doi bien endurer. Se ai je trop mespris Ains la doi mieux amer. Comment que j’aie comper, N’i ai rien , ce m’est vis Que de merci crier.
Le souvenir du visage Frais et vermeille et clair, A mis mon cœur dans un tel état Que je ne puis plus l’en détourner Et puisque j’ai voulu ces maux Il me faut bien le endurer, Si, en cela, je me suis fourvoyé Alors je dois l’aimer plus encore. Pour ce que j’y ai gagné (1) Il ne me reste plus, à mon avis, Qu’à crier merci.
Lonc travail sans esploit M’eust mort et traï. Mes mes cuers attendoit Ce pour quoi l’a servi. Si pour lui l’ai destroit, De bon cuer l’en merci. Je sai bien que j’ai droit, Qu’onc si bele ne vi. Entre mon cuer et li Avons fait si à droit Qu’ains de rien n’en failli.
Une long effort (tourment, peine) sans réussite (avantage, gain) m’eut tué et trahi Mais mon cœur attend Ce pour quoi il la servit. Si pour elle je l’ai tourmenté (destreindre : tourmenter, torturer, contraindre) Je l’en remercie de tout cœur. Je sais bien que j’ai bien agi Car jamais je ne vis si belle, Entre mon cœur et elle Nous nous sommes comportés si justement Qu’ainsi rien ne faillit (ne fut mal fait, ne fit défaut)
Dex ! pourquoi m’occiroit, Quant ainz ne li menti ? Sé ja joians en soit Li cuers, dont je la pri ! Je l’aim tant et convoit Et cuid pour voir de li Que chascuns, qui la voit La doie amer ausi. Qu’est ce, Dex, que je di ! Non feroit, ne porroit Nul ne l’ameroit si.
Dieu ! Pourquoi m’occirait-elle Quand jamais je n’ai failli à ma parole (je ne lui ai menti) Si c’est le cas (2), qu’en soit heureux mon cœur, je l’en implore ! Je l’aime et la désire tant Et crois à la voir Que chacun qui la voit Doit l’aimer aussi. Mais, Dieu, qu’est-ce que je dis ? Nul ne le ferait, ni ne pourrait l’aimer autant, ni aussi bien que moi.
Plus bele ne vit nus Ne de cors ne de vis ; Nature ne mist plus De biauté en nul pris. Pour lui maintiendrai l’us D’Enéas et Paris, Tristan et Piramus, Qui amèrent jadis, Et serai ses amis. Or pri Dieu de lassus Qu’à l’eure soie pris.
Jamais je ne vis plus belle qu’elle, Ni de corps ni de visage : La nature ne mit plus De beauté en personne. Pour elle, je suivrais l’usage D’Enéas et Paris, Tristan et Piramus, Qui aimèrent jadis, Et je serais leur égal (ami, parent ou « je serais son amant » (?)) , Or, je prie Dieu du ciel Qu’il en prenne acte sur le champ. (que le sort en soit scellé)
Sé pitiez ne l’en prent, Je sai qu’a estovoir M’ocirra finement : Ce doi je bien voloir. Amé l’ai loiaument, Ce me doit bien valoir, Amors de gréver gent N’eust si grant pooir. De grans maus m’a fait hoir. Dont Tristans soffri tant : D’ameir sens decevoir.
Si elle ne me prend pas en pitié, Je sais que, nécessairement, Elle finira par me tuer. Mais je dois bien le vouloir. Je l’ai aimé loyalement, Cela doit bien me valoir, Que l’amour me fasse souffrir aimablement S’il n’avait un si grand pouvoir. Il m’a fait hérité de biens grands maux. Dont Tristan souffrit tellement Pour aimer sans tromperie.
(1) « Comment que j’aie comper » : Pour ce que j’y ai gagné ? Comperer : acheter, gagner, acquérir, expier, être puni – comment que : quoique, de quelque manière que )
(2) « Sé ja » : « Si c’est le cas » Si jamais (?)
En vous souhaitant une belle journée.
Fred
Pour moyenagepassion.com. A la découverte du Moyen Âge sous toutes ses formes.
Sujet : troubadour, lyrique courtoise, galaïco-portugais, poésie, chansons médiévales, cantigas de amor, galicien-portugais, musique médiévale Période : Moyen Âge central, XIIIe, début XIVe Titre :Amigo, queredes vos ir ? Auteur : Denis 1er du portugal (1261-1325) Interprète : Paulina Ceremuzynska Album : Cantigas de amor y de amigo, 2004
Bonjour à tous,
u Moyen Âge central, de nombreux seigneurs et même rois se sont adonnés à l’art des troubadours et à l’exercice de la poésie courtoise. On en trouve de célèbres dans le sud, comme dans le nord de la France, mais de nombreux autres pays d’Europe ne sont pas en reste. C’est notamment le cas de la péninsule ibérique.
En Espagne, on connaîtra des lignées de grands rois et seigneurs, grand amoureux de littérature et férus de rimes, dont Alphonse X de Castille n’est pas le moindre, bien sûr. Quant au Portugal des XIIIe et XIVe siècles, il léguera aussi de beaux auteurs et troubadours à la postérité, dont l’un des plus célèbres n’est autre qu’un monarque du Portugal lui-même : Dom Dinis, connu encore sous le nom de Denis 1er du portugal, grand roi laboureur, fin politique, homme de lettres et poète à ses heures qui laissera de très belles pièces courtoises. C’est donc une d’entre elles que nous vous présentons aujourd’hui, et sa belle interprétation par la talentueuse Paulina Ceremuzynska. Cette chanson d’amour médiévale a pour titre « Amigo, queredes vos ir ? » : Ami, (ainsi) vous voulez partir ? »
Une cantiga de amor
Cantiga de amor plus que cantiga de amigo, en fait de belle esseulée chantant l’absence de son amant, le Roi Denis nous propose plutôt ici un dialogue entre un amant courtois et sa dame. Sur le thème de la séparation et du déchirement, on peut lire entre ses rimes ce qui pourrait être une situation digne de celle de Tristan et Yseult : amour interdit ou illégitime qui semble même peut être déjà consommé ? La liaison qui sous-tend cette pièce poétique est, en tout cas, réciproque et bien engagée mais elle doit se terminer à l’initiative de l’amant.
On peut trouver notamment cette pièce dans le Cancioneiro da Vaticana. Cet impressionnant manuscrit du XVIe siècle est la copie d’un original daté du XIIIe-XIVe siècle. Il contient plus de 1200 cantigas, pour près d’une centaine d’auteurs. Voir également cet article.
Bien qu’à la torture, ce dernier prend en effet sur lui de se « départir » de la dame. Dut-il en mourir, il lui faut s’en aller pour la sauver, elle ou sa réputation. L’amour impossible, illicite, trouve ici ses limites et découvre toute l’étendue de son drame.
Du point de vue du style, le choix des mots reste celui de la simplicité comme c’est presque toujours le cas dans le genre des cantigas de amigo ou de amor espagnoles et portugaises. En fait de refrain formel, c’est le thème de la mort qui vient ici scander cette poésie, en faisant planer sa menace sur les deux amants meurtris d’avance à l’idée de la séparation.
Amigo, queredes vos ir par Paulina Ceremuzynska
Cantigas de amor y de amigo
l’album de Paulina Ceremuzynska
En 2004, Paulina Ceremuzynskasortait un superbe album sur le thème des Cantigas de amor y de amigo du Moyen Âge central qu’elle affectionne particulièrement. On se souvient, en effet, que cette talentueuse chanteuse soprano et musicologue portugaise s’est installée à Santiago de Compostelle où elle a eu l’occasion d’étudier de près la musique ancienne et les manuscrits du Portugal et de l’Espagne médiévale. Cet album présente treize pièces superbement interprétées : neuf cantigas sont issues du répertoire de Don Denis du Portugal. Quatre autres proviennent de celui du célèbre troubadour Martin Codax.
A ce jour, cette production ne semble pas avoir été rééditée. Les seuls exemplaires qui se trouvaient disponibles à l’import sur Amazon, sont, à date de cet article, écoulés : voir cantigas de Amor e Amigo. On pourra peut-être la retrouver sur quelques plateformes dématérialisées légales mais il faut espérer qu’il sera également disponible à nouveau au format CD : la voix et les performances de Paulina Ceremuzynska ont toujours quelque chose de très spéciale et de très pur et, à l’image de son travail, cet album est un véritable réussite.
« Amigo, queredes vos ir ? » du roi Denis
traduit en français moderne
Amigo, queredes vos ir? Si, mia senhor, ca nom poss’al fazer, ca seria meu mal e vosso; por end’a partir mi convem d’aqueste logar; mais que gram coita d’endurar me será, pois m’é sem vós vir!
– Mon ami, vous voulez partir ? – Oui, ma dame, puisque je ne peux faire autrement, car rester serait mon malheur et le vôtre : c’est pourquoi il convient,
pour finir, que je quitte cet endroit. Mais quel grand malheur vais-je devoir endurer Puisque je ne vous verrai plus !
Amigu’, e de mim que será? Bem, senhor bõa e de prez; e pois m’eu fôr daquesta vez, o vosso mui bem se passará; mais morte m’é de m’alongar de vós e ir-m’alhur morar. Mais pois é vós ũa vez ja!
– Mon ami, et de moi qu’adviendra-t-il ? – Et bien, belle dame de grande valeur Quand je serais parti, cette fois Votre bonheur disparaîtra, Mais m’éloigner de vous me tuera, Et pourtant il me faut m’éloigner Même si c’est pour vous que je le fais!
Amigu’, eu sem vós morrerei. – Nom querrá Deus esso, senhor; mais pois u vós fôrdes, nom fôr o que morrerá, eu serei; mais quer’eu ant’o meu passar ca assi do voss’aventurar, ca eu sem vós de morrer hei!
Queredes-m’, amigo, matar? Nom, mia senhor, mais por guardar vós, mato-mi que m’o busquei.
– Mon ami, moi sans vous, je mourrai – Je ne veux pas cela, madame, Mais puisque là où vous irez, je ne pourrais aller, Celui qui mourra, ce sera moi Mais je veux mourir avant De vous causer des mésaventures Car sans vous je mourrais.
– Ami, vous voulez-me tuer ? – Non ma dame, mais pour vous protéger C’est moi que je cherche à tuer (c’est moi que je veux tuer puisque je l’ai mérité).
Note : cette traduction mériterait quelques vérifications aussi disons que c’est une premier jet.
En vous souhaitant une belle journée.
Fréderic EFFE
Pour moyenagepassion.com A la découverte du Moyen Âge sous toutes ses formes.