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Les quatre saisons de la vie par Eustache Dechamps et quelques réflexions sur la mort médiévale

poesie_ballade_morale_moralite_medievale_Eustache_deschamps_moyen-age_avidite_gloutonnerieSujet : poésie médiévale, littérature médiévale,  auteur médiéval, ballade médiévale, poésie morale, réaliste, ballade, moyen-français, mort, vieillesse
Période : moyen-âge tardif, XIVe siècle
Auteur : Eustache Deschamps  (1346-1406)
Titre :  « Il n’est  chose qui ne viengne a sa fin»
Ouvrage :  Oeuvres complètes d’Eustache Deschamps, Tome V. Marquis de Queux Saint-Hilaire, Gaston Raynaud (1893)

Bonjour à tous,

P_lettrine_moyen_age_passion-copiauisqu’arrive le début du mois de novembre, il est  de circonstance de penser à nos chers disparus et, à cette occasion, de se replonger un peu dans les conceptions médiévales de la mort.

Comme il a porté aux nues l’amour courtois, le moyen-Age a aussi beaucoup chanté le destin inéluctable qui nous conduit à notre propre finitude. De Jean de Meung et Rutebeuf à Villon, en passant par Michaut Taillevent, Jean Meschinot, Eustache Deschamps et bien d’autres encore, la camarde a traversé la poésie médiévale comme un constant rappel. Elle n’est pas tant perçue alors comme un grand vide inconnu, un néant dévoreur de consciences, mais plutôt comme un passage obligé entre deux mondes, au moins autant qu’une guide pour l’action aux services des valeurs chrétiennes.

La mort au présent dans le monde médiéval
remède contre la vanité des hommes.

« Vous vous moqueiz de Dieu tant que vient a la mort,
Si li crieiz mercei lors que li mors vos mort
Et une consciance vos reprent et remort;
Si n’en souvient nelui tant que la mors le mort. »
Rutebeuf – Le dit de la croisade de Tunis

Dans les poésies morales ou satiriques, elle fait ainsi figure indirectement de conseillère, ou disons d’un fait inéluctable à conserver à l’esprit si l’on veut avoir quelque chance d’échapper aux affres des enfers. Etape inévitable précédant le jugement, elle est celle qui rattrapera tôt ou tard, dans sa course, le puissant présomptueux, l’avide, le « convoiteux » ou le tyrannique. Et c’est encore elle dont l’approche fait se retourner le poète, entré dans son hiver, sur le temps passé et sur une vieillesse propice à le faire choir, même si, à l’image de Michaut Caron dans son passe-temps, on craint peut-être même plus le spectre de la misère, que celui de la mort.  Au fil du  moyen-âge, on finira par personnifier cette dernière de plus en plus et elle prendra des formes plus grinçantes et morbides, en s’invitant, dansante et goguenarde, dans ses représentations eustache_deschamps_ballade_poesie_medievale_mort_vieillesse_moyen-ageiconographiques comme un personnage à part entière.

On a quelquefois tendance à penser que le moyen-âge la chantait parce qu’elle était partout et que l’on n’avait finalement le choix que de l’avoir sous le nez. C’est un raccourci hâtif. Les guerres y étaient-elles plus meurtrières que celles de notre temps ? Non. Qu’on se souvienne simplement des millions d’enfants et de civils morts sous les bombes depuis la fin du XXe et le début de notre siècle pour s’en convaincre. Par ailleurs et quoiqu’on puisse, là encore, en préjuger, les auteurs du monde médiéval n’ont pas non plus attendu la peste noire et ses terribles ravages pour invoquer la camarde au secours de la morale. Le fait qu’on la trouve encore exposée aux gibets et aux fourches participe également d’une société qui l’enrôle dans sa marche de multiples façons.

Si la mort est omniprésence dans les esprits, c’est que le moyen-âge « l’embrasse ». Il l’invite même, quand elle n’est pas là, pour des raisons philosophiques et religieuses. Pour l’homme médiéval, elle fait partie d’une vision globale où le monde matériel et le monde immatériel ont le même degré de « réalité ». Elle se tient à leur frontière, prise dans un système de valeurs qui la met au cœur de l’action éthique et morale.

Modernité occidentale, la mort sous cloche ?

Il faut bien le constater, dans notre monde moderne occidental, indépendamment du fait que notre espérance de vie s’est améliorée, on a surtout tout mis en oeuvre pour qu’on meurt en silence et loin des regards : « penser à notre propre fin, certes, mais le plus tard possible » est un peu devenu la ligne à suivre. La mort, la vraie, pas celle de l’univers télévisuel, où se mêlent, derrière l’écran plat, morts d’actualité et morts fictionnels dans une véritable inflation, est-elle devenue indécente ? Recouverte de son terrifiant linceul, c’est en tout cas dans l’ombre qu’on la préfère et l’on rêve secrètement, plus que l’on ne l’a jamais fait, de la vaincre et de la faire reculer dans ce monde de matière même, sous la promesse d’une médecine et d’une science qui s’engagent, chaque jour un peu plus, à nous faire durer.

eustache_deschamps_ballade_poesie_medievale_mort_vieillesse_saison_moyen-ageSous la pression du matérialisme, la mort a donc indéniablement perdu de sa « superbe » même s’il convient, toutefois, de rester prudent dans ce genre d’analyses de surface. La société a certes organisé son éloignement manifeste sous la pression de divers phénomènes : laïcisation et recul de l’éducation religieuse – émergence d’une science moderne « toute puissante » qui allait bientôt prétendre faire reculer tous les mystères et toutes les fatalités – mouvement général d’individualisation (l’individu-client, laissé libre de ses choix, consommateur de spiritualité ou de religion et « faisant son marché ») et encore, corollaire de cette individualisation, éclatement de la famille traditionnelle (éloignement, placements des générations précédentes, et des personnes âgées,…)

De fait, une part importante des problématiques et des conceptions autour de la mort se sont beaucoup recentrées dans la sphère de l’espace privé à individuel mais cela ne signifie pas, pour autant que cette dernière s’y trouve vidée de toute substance spirituelle ou de tout rôle « actif » dans le cheminement de vie. D’ailleurs, hors de la sphère publique et quoiqu’elles projettent sur l’après-vie, nombre de pratiques religieuses ou spirituelles actuelles ont conservé à la camarde un statut « moral » d’importance . On vit alors avec elle, dans un esprit qui n’est sans doute pas très éloigné de celui qui gouvernait déjà au moyen-âge,  même si la société ne vibre plus à cette unisson, au moins dans son espace public.

Eustache Deschamps, ballade Médiévale :
Il n’est chose qui ne viengne a sa fin

Au cœur du XIVe siècle, Eustache Deschamps nous parlait des  quatre saisons de la vie et de la finitude de toute chose et c’est la ballade que nous avons choisi de partager avec vous aujourd’hui. Comme il s’agit de moyen-français, nous ne donnons ici que quelques clés de vocabulaire. Le reste demeure largement compréhensible.

Tout finit

Selon les temps et les douces saisons,
Selon les ans et aages de nature,
Selon aussi .IIII. complexions,
Vient joie ou dueil a toute créature.
Le sec aux champs, autre foiz la verdure,
Folie et sens, povreté et richesce
Es corps humains, force, vertu, jeunesce,
Et puis convient tout aler a déclin,
Arbres, bestes, gens mourir par viellesce :
II n’est chose qui ne viengne a sa fin.

En jeune temps, nous nous esjouissons
Pour le sang chaut; lors sommes plains d’ardure,
Nos jeunesces et folies faisons
Sanz y garder loy, raison ne mesure,
Fors volunté; tout est en adventure,
En cellui temps Cuidier* (croire, être présomptueux) nous point* (pique) et blesce;
C’est le doulz May qui dormir ne nous lesse,
Qui du vert bois nous monstre le chemin ;
Lors a un coup fleur, fruit et vert delesse :
II n’est chose qui ne viengne a sa fin.

Mais assez tost ceste chaleur laissons ;
Après Printemps vient Esté qui po dure,
Ou folement de noz vouloirs usons,
Gastans noz corps en pechié et laidure.
Autonpne après, moyenne saison, dure,
Qui des .II. temps les fruiz meure* (mûrir) et adresse :
Aux bien faisans les donne a grant largesce,
Mais pareceux n’ont d’elle blef ne vin,
Dont mainte gent muèrent en grant destresce :
II n’est chose qui ne viengne a sa fin.

En Décembre fueilles cheoir veons
D’arbres, de prez et venir la froidure ;
Es chaux foyers pour ce nous retraions,
Qui a de quoy, et qui non, si endure.
Recorder fault sa fole nourreture,
Ses maulx soufrir. De legier* (aisément) se courresse* (courroucer)
Homs en ce temps qui de mal sent l’appresce* (l’oppression)
Et li chéent* (choir) par viellesce li crin* (les cheveux);
Ainsis s’en vont roys, ducs, contes et contesse :
Il n’est chose qui ne viengne a sa fin.

Janvier, Février sont neges et glaçons,
Ceuls sont de l’an la fin froide et obscure;
En cel aage la teste blanche avons,
En déclinant vers nostre sépulture ;
Nous sommes lors chargans et plains d’ordure
Hors du doulz May de joie et de leesce* (liesse).
La vient la Mort qui sonne nostre messe,
Car riens qui naist n’eschive son chemin
Qui par ce pas sa voie ne radresce* (redresser) :
Il n’est chose qui ne viengne a sa fin.

L’envoy

Prince, empereurs, rois, dames et barons,
Religieus, peuples, considérons
Que tuit sommes du monde pèlerin
Et qu’en passant nous y trespasserons;
Faisons donc bien et le mal eschivons :
Il n’est chose qui ne viengne a sa fin.

En vous souhaitant une excellente journée et un bon week end de la Toussaint.

Fred
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du moyen-âge sous toutes ses formes.

Sur le sujet de la mort au moyen-âge, nous vous invitons  à découvrir également  l’article suivant:  Mort médiévale, mort moderne : idées reçues, approche comparée et systèmes de représentations 

A la Recherche de Vaubeton, un film documentaire sur les traces de Girart de Roussillon

girart_de_roussillon_vienne_chanson_de_geste_bataille_vaubedon_archeologie_histoire_medievale_film_documentaire_haut_moyen-age_IXeSujet : Girard de Roussillon, chanson de geste,  France carolingienne, monde féodal, histoire médiévale, médiéviste, film, documentaire.
Période
: haut moyen-âge, IXe siècle
Titre : A la recherche de Vaubeton 
Réalisatrice : Michelle Gales
Production  : Le Chemin derrière les murs,  Now & Then et Rivarts  (2018)
Evénement : Projection, échanges
Date : lundi 5 novembre 2018, 19h00
Lieu :  SCAM, Salle Charles Brabant 5, avenue Vélasquez. Paris 5e

Bonjour à tous,

A_lettrine_moyen_age_passionu titre des événements à noter sur les agendas de ceux qui se trouveront en Île de France et à Paris, le 5 novembre prochain, dans les locaux de la Société Civile des Auteurs Multimédias (la SCAM ) sera projeté le film documentaire A la recherche de Vaubeton  de la réalisatrice  Michelle Gales.

Réflexions &  regard poétique au carrefour
du haut moyen-âge  & de la modernité

film_documentaire_video_histoire_medievale_medieviste_chanson_de_geste_girart_de_roussillon_vienne_moyen-ageAu croisement de l’histoire médiévale, de l’archéologie et de l’imaginaire poétique, Michelle Gales s’est engagée sur les traces  de Girart de Roussillon et des légendaires mésaventures de ce Seigneur de Province du temps du haut moyen-âge et de la France carolingienne .

Au cœur d’un petit village de Bourgogne, celui-là même où le célèbre Conte de Vienne avait fondé, au IXe siècle, avec son épouse, une abbaye de femmes, la réalisatrice a suivi les pas d’un médiéviste, à la recherche de possibles vestiges de la bataille de Vaubeton mentionnée dans la célèbre Chanson de Geste (voir plus bas dans l’article)

 » À travers la poésie, la musique, les objets ou les lieux, ces voix du passé nous interpellent. Habitants et visiteurs se réapproprient l’Histoire et la Légende. »  Ardècheimages  (2018)

Précisons-le, il ne s’est pas tant agi pour Michelle Gales de se livrer à un exercice documentaire scientifique et technique, cantonné aux découvertes archéologiques  factuels, mais bien plutôt d’observer et de saisir, au présent, les échos de la légende médiévale dans les esprits et les récits des habitants, artistes ou visiteurs du lieu, avec leurs lots d’imaginaire, de ré-interprétation et de reconstruction. Derrière la caméra, il a donc été question pour elle, de deviner, de lire ou de rêver, des résonances où se mêlent histoire, poésie et modernité, au travers des hommes, mais aussi des paysages et des pierres.

Concernant la projection de ce bel essai documentaire qui pourrait intéresser les passionnés, les initiés ou les amateurs de moyen-âge, autant qu’un public plus large, vous y êtes donc largement conviés. Elle sera suivie d’un échange dans l’ouverture et la convivialité. Attention cependant, les places étant réduites, les réservations sont obligatoires et les entrées seront privatives sur cette base. Pour vous inscrire, merci d’écrire à l’adresse email suivante : chmigabe[@]gmail[.]com

Pour ceux qui ne pourraient pas s’y rendre, voici également un lien utile pour en savoir plus sur ce film-documentaire et pour suivre le calendrier de ses projections : A la recherche de Vaubeton.

Girart de Roussillon :
de l’Histoire à la légende

girart_de_roussillon_vienne_chanson_de_geste_histoire_medievale_moyen-age_france_carolingienne_002Milieu du neuvième siècle, en cette fin de haut moyen-âge, les descendants de Charlemagne et héritiers directs de son fils Louis le Pieux s’entre-déchirent et se jalousent. A la faveur de cette crise, au sein d’un royaume carolingien divisé et affaibli, la féodalité émerge et les grands vassaux tirent déjà leur épingle du jeu. Il en résulte les premières grandes tensions entre pouvoir central et pouvoir délocalisé ou provincial, et il faudra encore de longs siècles de luttes aux couronnes d’Europe pour conquérir à nouveau ce qu’elles considéraient bien leur revenir de droit.

L’apparition de la chanson de geste autour de la vie de   Girart de Roussillon  est bien plus tardive que l’époque dont elle relate les faits puisqu’on la date entre la fin du XIIe et le début du XIIIe siècle. Elle conte en 10 000 vers la vie d’un grand seigneur féodal et ses démêlés avec le roi de France, Charles le Chauve. Largement étudiée par nombre de médiévistes et d’experts, elle contient tous les ingrédients d’une grande aventure épique : amour, jalousie, convoitise, jeux de pouvoir et trahison, batailles sanglantes et absurdes, folie et orgueil et elle n’oublie pas, au passage, l’importance et le grand rôle des femmes et des reines, prises dans la tourmente de toutes ses affaires « d’hommes ».

Girart, comte et puissant vassal
au milieu d’un empire carolingien morcelé

Le personnage historique (810/815 – 877)

Devenu comte de Paris sous Louis le Pieux, quand l’empire sera divisé en trois, Girart de Vienne prendra le partie de Lothaire, en perdant au passage son titre sur le Comté de Paris revenu aux mains de Charles le Chauve.

En charge du duché de Lyon et du comté de Vienne, il élargira, au fil des années, ses possessions du côté de la bourgogne. A la lutte contre les sarrasins et bientôt contre les raids viking venus par le Rhône jusque Valence, Girart se signera par ses faits au Sud, mais il devra aussi se défier, au nord, des ambitions de Charles le Chauve bien décidé à étendre ses terres, au détriment de celles du puissant seigneur et guerrier acquis à la cause de Lothaire.

girart_de_roussillon_vienne_chanson_de_geste_histoire_medievale_moyen-age_france_carolingienne_001Au milieu des luttes de pouvoir qui opposeront alors les nobles de la lignée de Charlemagne et leurs descendants pour la possession de la Provence, le noble réussira longtemps à maintenir son pouvoir sur le Lyonnais et le Viennois, mais les jeux de succession feront bientôt tomber les deux provinces dans l’escarcelle de Charles le Chauve qui s’empressera d’en chasser l’ancien fidèle de son frère pour placer l’un des siens, Après s’être soulevé, Girart renoncera pourtant. Il rentrera en Avignon et avant que le souverain ne s’empare aussi de ses terres bourguignonnes, il fondera avec son épouse Berte (Berthe), deux monastères qu’il placera sous le protection du Pape pour les soustraire à la main du roi. Il mourra quelques années plus tard, en 877, la même année que Charles le Chauve

Sa vie est celle d »un personnage d’importance dans la France féodale du IXe siècle et dans un monde carolingien écartelé entre l’ambition de frères que leur père, Louis le Pieux, avait déjà échoué à unir de son vivant. Charlemagne était mort et, avec lui, son oeuvre, il n’en resterait plus que des jalousies fratricides et pour les siècles à venir, et même au delà du moyen-âge, un rêve de reconquête qui allait hanter nombre de souverains ou d’empereurs du Saint-Empire.

La Légende et la chanson de geste

Pour en dire deux mots et mieux situer le contexte du film documentaire de Michelle Gales, la chanson de geste Girart de Roussillon est une oeuvre littéraire qui prend de grandes libertés avec la réalité historique, même si, pour une part, elle en reprend peut-être des  éléments, en les retraitant de manière allégorique.  Elle conte ainsi la vie du Seigneur de Vienne et sa longue opposition avec Charles le Chauve, née d’une jalousie du souverain mais qui se poursuivra pour prendre des tours inextricables et suggérer des responsabilités aux contours plus partagés.

Les deux hommes s’étant vu promettre chacun une fille de l’empereur de Constantinople, le roi, ayant entendu de ses conseillers que Girart allait marier la plus belle d’entre elles, ne l’entendit pas de cette oreille. Il fit donc changer les termes de l’arrangement pour la prendre en épousailles, laissant finalement l’autre fille, Berte, au seigneur de Lyon et de Vienne. Dans l’opération, Charles le Chauve dut faire quelques sérieuses concessions dont laisser à Girart la totalité du pouvoir sur ses fiefs dont ce denier n’aurait plus à répondre face à la couronne.

girart_de_vienne_chanson_de_geste_moyen-age_france_carolingienne_miniature_enluminures
Chronique de Girart de Roussillon. Le mariage de Girart Codes. 2549, Vienne, Österreichische Nationalbibliothek

La bataille de Vaubeton

Sitôt la concession faite, le roi la regrettant déjà viendra provoquer Girart sur ses terres pour reprendre ses droits sur ce qu’il continuait de considérer à l’évidence comme son bien. Les échauffourées prendront bientôt de plus grandes proportions pour déboucher sur la terrible bataille de Vaubeton dont il est question dans le documentaire de Michelle Gales. L’Ost de Charles le Chauve d’un côté, Girard et ses barons alliés de l’autre, elle verra des pertes sanglantes des deux côtés et la légende conte que Dieu lui-même vint pour y mettre un terme :

« …mais par la volonté de Dieu un orage éclata, fort, fier, horrible et redoutable. Charles vit son enseigne brûler et Girart la sienne tomber en charbon. A la vue de ces signes que Dieu leur manifeste, ils arrêtent le combat. » .
Girart De Roussillon,
Chanson De Geste Traduite Pour La Première Fois,
Paul Meyer 1884

La suite de la geste est une longue suite de péripéties, alternés de conflits et de trêves entre les deux hommes  sur le détail desquels nous aurons l’occasion de revenir plus tard.  L’objectif reste, dans le cadre de cet article, de vous donner quelques clés utiles pour mieux appréhender le film-documentaire de Michelle Gales.

En vous souhaitant une très belle journée.

Frédéric EFFE
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du moyen-âge sous toutes ses formes.

PS : les deux autres images tirées d’une seule enluminure représentant le chantier d’un église au moyen-âge sont également tirées du Codex 2549, Vienne, Österreichische Nationalbibliothek

Clément Marot : « d’un doux baiser », joli huitain galant au moyen-âge finissant

clement_marot_poesie_moyen--age_tardif_renaissanceSujet :  poésie, huitain, poésie courte,
Période : fin du moyen-âge, renaissance
Auteur :  Clément MAROT (1496-1544)
Titre : « D’un doux baiser »
Ouvrage : œuvres choisies de Clément MAROT, (1808)

Bonjour à tous,

Un peu de poésie galante, à  l’hiver du moyen-âge,  avec un huitain à la façon unique de Clément Marot et son sens aiguisé de la chute dans les pièces courtes.

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D’un Doux baiser

« Ce  franc baiser, ce baiser amiable.
Tant bien donné, tant bien receu aussi,
Qu’il estoit doux ! o beauté admirable!
Baisez-moi donc cent fois le jour ainsi,
Me recevant dessous vostre merci
Pour tout jamais; ou vous pourrez bien dire
Qu’en me donnant un baiser adouci,
M’aurez donné perpetuel martire. »

Une belle journée.

Fred
Pour Moyenagepassion.com
A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.

Grand Art, Jean-Pierre Joblin, Bruno Daraquy, François Villon en scène et en chanson : spectacle vivant

françois_villon_piece_recital_chanson_poesie_medievale_moyen-ageSujet : poésie médiévale, poésie, chansons, spectacle vivant, livre, exposition
Période : moyen-âge tardif, XVe siècle.
Auteur : François Villon (1431-?1463)
Parolier, illustrateur : Jean-Pierre Joblin Interprète : Bruno Daraquy.
Evénement : « François Villon, Corps à coeur »   Lieu : Théâtre de la Closerie, Etais la Sauvin Yonne, Bourgogne-Franche-Comté
Dates : Samedi 13 octobre  à 20h30, Dimanche 14 octobre à 16h00 et 20h00

Bonjour à tous,

Q_lettrine_moyen_age_passionue les amateurs de François Villon le rebelle, le truculent, le marginal, le supplicié et encore l’angoissé qui se trouve du côté de l’Yonne, cette fin de semaine, ne passent pas à côté de ce bel événement consacré au poète médiéval. Ce samedi et ce dimanche à Etais la Sauvin, on pourra, en effet, assister tout à la fois à un spectacle-vivant de chansons, poésies, repris ou inspirée de Villon ainsi qu’à une exposition d’illustrations sur l’auteur médiéval.

Si les deux aspects sont mêlés c’est qu’ils sont d’abord le fruit d’une rencontre : celle de l’auteur, illustrateur, parolier Jean-Pierre Joblin et celle du chanteur Bruno Daraquy. Partis d’une idée de evenement_francois_Villon_spectacle_vivant_chansons_poesies_auteur_medieval_moyen-age_tardifcollaboration autour d’un récital  de chansons sur Villon, les deux artistes ont bientôt été rejoints par un musicien compositeur Malto, suivi, un peu plus tard, de quelques autres excellents musiciens et d’un regard extérieur éclairé sur la mise en scène (Maurice Galland).

Jouée pour la première fois au Théâtre Libre de Saint-Etienne en 2012, cette pièce-récital plusieurs fois saluée par la presse, continue de tourner depuis. Elle a notamment été présentée au Printemps de Bourges en Avril dernier et c’est donc celle que vous aurez le plaisir de retrouver ce week-end à quelques encablures au sud d’Auxerre pour trois représentations.

Depuis sa création, l’aventure ne s’est pas arrêtée à ce seul spectacle puisqu’elle a fini par donner le jour, un peu plus tard dans le temps, à une oeuvre totalement originale. Sorti en Janvier 2017, ce livre-CD est enrichi de belles illustrations réalisées de la main même de Jean-Pierre Joblin qui double son talent d’auteur-parolier avec celui d’illustrateur. Les images présentes dans cet article ne vous en donneront qu’un très bref aperçu.

La voix, la chair et le verbe :
Villon à Fleur de peau et de plume

bruno_daraquy_spectacle_villon_poesie_medievale_recital_chansonDu côté du récital, qui est émaillé de textes, de « dits », de mots, de « cris », comme ceux de Léo Ferré pouvaient en contenir, il propose 16 chansons auxquelles Bruno Daraquy prête son talent, et même au delà, son cœur, sa chair et sa peau. Incarne-t-il Villon ou, par un étrange tour de passe-passe médiumnique, le poète médiéval serait-il revenu, le temps d’un spectacle, se rêver dans la peau du chanteur-conteur ? La voix, les intonations, le ton, la révolte, la gouaille, tout est là. Fermez les yeux, Villon est sur les planches et le trouble est entier, et si ce n’est pas lui, sans doute n’aurait-il pu songer à un meilleur tribut, une meilleure incarnation.

Illustration de Jean-Pierre Joblin tirée de l'ouvrage François Villon, Corps à Coeur
Illustration de Jean-Pierre Joblin tirée de l’ouvrage François Villon, Corps à Coeur

Quant au verbe, qui vient au commencement, voilà ce que l’auteur lui-même nous en dit, en guise de préface dans le livre CD illustré dont nous parlions plus haut :

« Soucieux d’épargner au lecteur contemporain l’écueil du « vieil langage françois » je me suis employé à développer un style qui mêle le plus « gustativement » possible la saveur des mots actuels à celles des tournures médiévales » Jean-Pierre Joblin

spectacle_villon_poesie_medievale_recital_chanson_joblin_jean-pierre_album_cdEt si c’est toujours une gageure de se frotter à Villon et un pari sans doute encore plus grand que de décider de ne pas le suivre à la lettre, le défi est là aussi brillamment relevé. Avec une dose copieuse d’argot, (d’aucun diront, à ne pas mettre entre toutes les oreilles, âmes sensibles s’abstenir donc, mais il en est encore ainsi pour les plus chastes, de certains textes de Villon), le verbe du parolier a fait totalement corps avec celui de l’auteur médiéval, dans un processus, là encore, étrangement fusionnel.

La hantise de Villon et le terrible gibet de Montfaucon sous la plume de Jean-Pierre Joblin.

Jean-Pierre Joblin a dû, nous dit-il s’immerger tout entier dans tout ce qui faisait François Villon, dans tout ce qui tournait autour de l’homme, dans l’oeuvre de ses biographes, des plus anciens aux plus modernes : a-t-il  hérité au passage de la  fascination d’un Clément Marot pour le style de l’auteur du Testament ou suivi les pas curieux  d’un Pierre Champion sur la piste du poète, dans le Paris du XVe siècle, ses tavernes et ses quartiers?  Qu’on ne s’y trompe pas pourtant, pour un tel exercice lire ne suffit pas et il a fallu une passion dévorante et une véritable plume pour que la magie opère vraiment et pour que Jean-Pierre Joblin  fasse de Villon sien.

Agenda, informations et Livre-CD

Pour ne pas le manquer  s’il passe près de chez vous. retrouvez plus d’informations sur ce beau projet et son agenda au lien suivant :

françois_villon_album_cd_illustration_chanson_poesie_medievale_moyen-age_XVePour plus d’informations sur le livre CD et pour l’acquérir, voici le lien.

Pour le reste et pour rappel, si vous êtes dans l’Yonne le spectacle, l’exposition, les dédicaces et la rencontre des artistes en vrai, c’est à  Etais la Sauvin, ce samedi  et ce dimanche.

En vous souhaitant une  belle journée et un excellent week end.

Frédéric EFFE.
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du Moyen-âge  sous toutes ses formes