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Lecture audio : la paix de Rutebeuf, trouvère du XIIIe siècle

pauvre_rutebeuf_poesie_medievale_occitan_joan_pau_verdierSujet : poésie médiévale, réaliste, satirique, trouvère, vieux français, langue d’oil, adaptation, traduction.
Période : moyen-âge central, XIIIe siècle
Auteur ; Rutebeuf (1230-1285?)
Média ; lecture audio
Titre : La paix Rutebeuf, la paiz de Rutebuès

Bonjour à tous,

I_lettrine_moyen_age_passion copial semble que nos pas  nous conduisent du côté du trouvère Rutebeuf depuis quelques jours. Nous allons donc en faire un de plus dans sa direction, aujourd’hui, en vous proposant la lecture audio de la poésie  « la paix de Rutebeuf ».

rutebeuf_lecture_audio_paix_poesie_litterature_medievaleNous avions publié, il  y a quelque temps, un article assez long sur le ce texte avec sa version en vieux-français, son adaptation en français moderne et encore  quelques réflexions  d’ordre plus général sur l’auteur médiéval, aussi nous vous invitons à vous y reporter. Tout est là :  La « paix » de Rutebeuf et quelques reflexions sur le « je » et le « jeu » du poète médiéval.

Comme dans la plupart des lectures audio que nous avons proposées jusque là, les deux versions du texte  ancienne et moderne sont mises en miroir pour vous permettre de mieux suivre et comprendre.

 Pour information et si cela vous intéresse, il existe aussi une  playlist youtube de toutes nos lectures de poésie médiévale ici.

En vous souhaitant une belle journée.

Fred
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du moyen-âge sous toutes ses formes.

Eric Fraj, Pauvre Rutebeuf en Catalan & un mot sur le Catalan

rutebeuf_troubadour_medieval_musique_moyen_age_passionSujet : poésie médiévale, chanson, complainte, catalan, langue catalane
Période : ^Moyen Âge central, XIIIe siècle
Titre
: Pauvre Rutebeuf,  Complainte
Auteur : Rutebeuf  (1230-1285), Léo Ferré.
Interprète : Éric Fraj
Album : Arranca-me (2014)

Bonjour à tous,

D_lettrine_moyen_age_passionans les  diverses versions que nous avons déjà postées ici de la complainte de Rutebeuf de Léo Ferré en voici une qui nous donne l’occasion d’écouter un peu de poésie d’inspiration médiévale en catalan. Nous en profitons aussi pour toucher un mot de cette langue qui s’enorgueillit d’une histoire de plus de 1000 ans et qui continue de connaître un destin particulier que bien des catalans ont à coeur de continuer de faire vivre.

Pauvre Rutebeuf de Léo Ferré en catalan

Eric Fraj, auteur compositeur interprète

Nous devons cette très belle interprétation  à Eric Fraj, un artiste qui chante en Occitan, en français, en Castillan, mais aussi en Catalan, comme ici. Actif dans le domaine de la diffusion de la langue occitane, qui est une de ses langues de coeur, il a monté de nombreux spectacles originaux, mixtes au niveau des langues et il a même, au début des années 2000, incarné le troubadour occitan Jaufre Rudel dans un spectacle vivant qui retraçait des épisodes de la vie de l’artiste médiéval. Pour le reste, quand Eric Fraj ne chante pas l’occitan, il l’enseigne, comme la philosophie, dans un lycée de la région de Toulouse.

Voici une belle vidéo qui permet d’en savoir un peu mieux sur l’univers de cet artiste à la trajectoire unique entre catalan, occitan et français.

Cette belle interprétation de la complainte de Rutebeuf de Léo Ferré est tiré de son album Arranca-Me, sorti en 2014 et dont il nous parle dans cette vidéo.


Pauvre Rutebeuf, paroles et
adaptation en catalan de Eric Fraj

Els meus amics on han passat,
Els que tenia al meu costat
I que estimava ?
I tot d’un cop s’han escampat ;
Amb un sol buf de tramuntana,
l’amor és morta…

Són amistats que el vent emporta,
I en feia molt davant ma porta ;
Se’ls va emportar…

Un vent dolent qu’arbres despulla,
Les branques ja no tenen fulla
Sense anar a terra.
Una misèria que em desferra,
De tot costat me fa la guerra,
L’hivern m’aterra…

No val la pena que faci esment
De ma vergonya i mon torment,
De cap manera…
Els meus amics on han passat,
Els que tenia al meu costat
I que estimava ?

I tot d’un cop s’han escampat ;
Amb un sol buf de tramuntana,
L’amor és morta…
Un mal ja no vé mai tot sol
I tot el que porta el seu dol
M’ha ben desfet…

Pobres sentits, pobre memòria,
M’ha donat Déu el rei de glòria
I pobre renda…
I dret al cul quan bufa el vent
M’agafa el vent i el seu torment,
L’amor és morta…

Són amistats que el vent emporta
I en feia molt davant ma porta,
Se’ls va emportar.


Concernant cette complainte de Rutebeuf, revisité par Léo Ferré, nous lui avons déjà dédié plusieurs articles que vous pouvez valablement consulter. Aussi, descendons sans attendre vers le sud des terres de France et  longeons la côte de Perpignan et du Languedoc jusqu’à Barcelone, aux Baléares ou à Valencia pour partir à la rencontre de la langue catalane.

Le catalan, une langue à part entière parlée et formée depuis le Moyen Âge central

poesie_medievale_leo_ferre_eric_fraj_catalan_langue_catalane_moyen-age_centralPour ceux qui ne sont pas familiarisés  avec la langue catalane, vous y trouverez, en tendant l’oreille, une proximité indéniable avec le français, le provençal, le latin et même certains mots d’italien.  Comme toutes les langues romanes, elle est née du latin qu’on parlait sur les terres romanisées durant le haut Moyen Âge.  En l’écoutant, nos oreilles profanes pourraient être tentées quelquefois de la considérer  comme un patois tant ses accents peuvent nous faire penser à certaines dialectes  provençaux de nos terroirs, mais cela est une erreur qui n’en finit pas de déplaire aux catalans et à juste raison.  Le catalan est, en effet, une langue à part entière et pas une forme dialectale dérivée du français ou de l’espagnol. Elle existait déjà dans sa forme établie au Xe siècle quand, de son côté, l’Oïl balbutiait encore et  continuait de muer en ce qui allait devenir le français.

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Les origines: ibéro-romanes ou gallo-romanes ?

Concernant l’origine du Catalan, un débat existe entre les linguistes, qui est, tout de même, relativement tranché. Le Catalan faisait-il partie du berceau occitan et de la famille des langues en provenance de l’héritage gallo-romain, duquel il se serait différencié ou était-il déjà une langue d’origine différente ?  Les linguistes catalans ont définitivement opté pour cette dernière option, en rattachant la langue catalane au berceau Ibérico-roman septentrional, ce qui la différencierait indéniablement de l’Occitan qui lui est issu du berceau dialectal gallo-roman méridional. Cette théorie, a semble-t-il rallié la plupart des linguistes, même si certains continuent d’attribuer au catalan, une origine gallo-romane qui en langue_catalane_pauvre_rutebeuf_leo_ferre_eric_fraj_version_catalaneferait une forme de la langue occitane. Au niveau écrit, elle ressemble en bien des points au français, mais au niveau de sa prononciation elle se rapproche bien plus de l’espagnol.

Au niveau historique, les proximités politiques et linguistiques du Languedoc et de la Catalogne ne suffirent pas à résister à l’emprise des rois et à constituer ce qui aurait peut-être pu devenir, dans le courant du Moyen Âge central, un état à part entière. Les deux provinces se retrouvèrent, en effet, bientôt rattachées à des blocs différents, France d’un côté et Espagne de l’autre, au moment où les couronnes d’Europe exerçaient de fortes pressions militaires et politiques et cherchaient à renforcer leur pouvoir en étendant leur hégémonie territoriale. Elles finirent donc par se différencier et une partie de la Catalogne se retrouva même du côté de la frontière française. ( voir article sur Perpignan la Catalane)

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A ce jour, toutes provinces confondues, le catalan est parlé par plusieurs millions de personnes entre la France, la péninsule ibérique et la Sardaigne. Certaines sources indiquent  des chiffres dépassant les 10 millions. Province autonome espagnole, la Catalogne offre un large soutien au catalan qui est reconnu langue officielle de la province. Ses habitants le parlent depuis des siècles et se le transmettent comme une langue maternelle depuis des générations. La langue est aussi la langue officielle de la province d’Andorre. A travers leur langue, les catalans défendent à la fois une identité, une culture et une Histoire, et même si, officiellement, vous vous trouvez en Espagne, vous êtes d’abord en Catalogne.

 En vous souhaitant une belle écoute et une très belle journée.

Fred
Pour moyenagepassion.com
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Pastourelle & trouvères du moyen-âge : le jeu de Robin et Marion par l’ensemble Perceval (extrait)

musique_poesie_chanson_profane_medievale_pastourelle_adam_de_la_halle_trouvere_arrasSujet :  musique, poésie, chanson, médiévale,  trouvère, pastourelle,
Epoque : moyen-âge central,
Auteur :  Adam de la Halle  (1220-1288)
Titre : le jeu de Robin & Marion
Interprète : Ensemble Perceval
Album : 
« Adam de la Halle : Le jeu de Robin et Marion» (1981   Arion)

Bonjour à tous,

N_lettrine_moyen_age_passionous avions déjà parlé, il y a quelques semaines, de la pastourelle médiévale « le jeu de Robin et Marion » du trouvère Adam de la Halle et nous vous en présentons, aujourd’hui, un autre extrait musical. Cette fois-ci, nous le devons à l’excellentissime Ensemble Perceval et il faut bien avouer qu’au niveau vocal tant que pastourelle_trouvere_adam_de_la_halle_jeu_marion_et_robin_enluminuresmusical, cette pièce nous transporte d’emblée dans un ailleurs poétique sublime.

(ci-contre le jeu de Robin et Marion, enluminures, Ms. 166,  XIVe, Bibliothèque Méjanes , Aix en Provence)

Ce n’est qu’un extrait de la scène II entre Marion et son  promis et amant Robin. Il finit un peu en queue de poisson et nous nous en excusons.  Le morceau dure en réalité 11 min 20. Sous la direction de Guy  Robert, l’album dédié dans son entier au jeu de Robin et Marion est accessible sur  Amazon et d’autres  sites de vente en ligne.  Le travail  artistique  de la formation y est résolument ouvert  à des morceaux hors  de l’oeuvre de  Adam de La Halle.

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Pour plus d’informations sur les productions Perceval,  vous pouvez consulter l’article que nous leur avions dédié précédemment ici:

La complainte de Richard 1er par l’ensemble Perceval.

En vous souhaitant une bonne écoute et une très belle journée.
Fred
Pour moyenagepassion.com
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« Joie, plaisance et douce nourriture », un chant royal du XIVe siècle de Guillaume de Machaut

Guillaume-de-Machaut_trouvere_poete_medieval_moyen-age_passionSujet : musique médiévale, chant royal, maître de musique, chanson, amour courtois.
Titre : Joie, plaisance et douce nourriture
Auteur: Guillaume de Machaut (1300-1377)
Période : XIVe siècle, Moyen Âge central
Interprète : Ensemble Gilles de Binchois
Album : Guillaume de Machaut,  le jugement du roi de Navarre  (1999)

Bonjour à tous,

A_lettrine_moyen_age_passionujourd’hui, nous vous proposons un peu de la belle musique et de la poésie de  Guillaume de Machaut, grand compositeur de musiques du moyen-âge central, et une pièce interprétée ici pour nous par le très talentueux ensemble Gilles de Binchois.

Ce chant royal puise dans les œuvres profanes du grand compositeur du XIVe et  est extrait d’un  album que la formation Gilles de Binchois  dirigée par  Dominique Vellard  lui dédiait alors entièrement, en 1999.

Le remède de la fortune : pièce d’amour courtois

 La nature monophonique de ce chant le situe encore dans l’héritage des trouvères et des troubadours.  Il est tiré de  la longue poésie  « Le remède de Fortune » que l’auteur écrivit et mit en musique, autour de  l’année 1341. Cette longue pièce d’amour courtois qui contient sept poésies est considérée  comme ayant notablement influencé  son temps, au niveau musical comme au niveau poétique. L’œuvre conte les déboires d’un poète amoureux de sa dame et qui tardera à lui confesser, mais finira tout de même par oser s’en ouvrir à elle.  Elle  lui fournit l’occasion d’une initiation à l’amour courtois autant qu’à l’art poétique.

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Manuscrit ancien et sources médiévales

On retrouve le remède de fortune ainsi que huit autres pièces et poèmes de  Guillaume de Machaut dans le manuscrit ancien référencé Manuscrit Fr 1586  datant de 1356-1360 et donc contemporain de l’auteur.  Le titre en est :  Œuvres poétiques de Guillaume de Machaut. Et Si le cœur vous dit de le consulter, vous pourrez le trouver à l’adresse suivante sur l’excellent site Gallica de la BnF : Manuscrit FR 1586, manuscrit ancien fr1586 musique poesie medievale guillaume de machautGuillaume de Machaut.

Il y a décidément autour de ce compositeur de l’excellence autant  dans sa musique et  sa plume que dans les manuscrits dont le monde médiéval nous a gratifiés à son sujet. Outre qu’il est parfaitement conservé, l’ouvrage en question  contient, en effet, des enluminures d’exception et est même, à ce jour,  considéré par des historiens et experts de ces questions comme  une des œuvres majeures du XIVe siècle en matière d’enluminures. Son commanditaire autant que son destinataire nous sont restés inconnus autant que le nom de  l’artiste principal qui  l’a illustré.

Le remède de fortune, référence musicale et poétique du XIVe siècle, enluminure Manuscrit FR1586 Gilles de Machaut (1356-1360)
Le remède de fortune, référence musicale et poétique du XIVe siècle, enluminure Manuscrit Gilles de Machaut (1356)

Les paroles de Joie, plaisance et douce norriture  de Guillaume de Machaut

Joie, plaisance, et douce norriture
Vie d’onnour prennent maint en amer;
Et pluseurs sont qui n’i ont fors pointure,
Ardour, doulour, plour, tristece, et amer,
Se dient, mais acorder
Ne me puis, qu’en la souffrence
D’amours ait nulle grevance,
Car tout ce qui vient de li
Plaist a cuer d’ami;

Car vraie Amour en cuer d’amant figure
Trés dous Espoir et gracieus Penser:
Espoirs attrait Joie et bonne Aventure;
Dous Pensers fait Plaisence en cuer entrer.
Si ne doit plus demander
Cils qui a bonne Esperance,
Dous Penser, Joie et Plaisance,
Car qui plus requiert, je di
Qu’Amours l’a guerpi.

Dont cils qui vit de si douce pasture
Vie d’onneur puet bien et doit mener,
Car de tous biens a comble mesure,
Plus qu’autres cuers ne saroit desirer,
Ne d’autre merci rouver
N’a desir, cuer, ne bëance,
Pour ce qu’il a souffissance;
Et je ne say nommer ci
Nulle autre merci.

Mais ceaus qui sont en tristesse, en ardure,
En plours, en plains, en dolour sans cesser,
Et qui dient qu’Amours luer est si dure
Qu’il ne peulent sans morir plus durer,
Je ne puis ymaginer
Qu’il aimment sans decevance
Et qu’en eaus trop ne s’avance
Desirs. Pour ce sont einsi,
Qu’il l’ont desservi.

Qu’Amours, qui est de si noble nature
Qu’elle scet bien qui aimme sans fausser,
Scet bien paier aus amans leur droiture:
C’est les loiaus de joie säouler
Et d’eaus faire savourer
Ses douceurs en habundance;
Et les mauvais par sentence
Sont com traïtre failli
De sa court bani.

Amours, je say sans doubtance
Qu’a cent doubles as meri
Ceaus qui t’ont servi.


En vous souhaitant une  merveilleuse journée.

Frédéric EFFE
Pour moyenagepassion.com
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